« La population d’ici (ne nous) est pas favorable, on a l’impression que notre présence les dérange », affirme d’un ton grave un soldat à Grabo, sous-préfecture du département de Tabou dans le sud-ouest ivoirien (proche du Liberia), à la suite d’une attaquee perpétrée samedi par un groupe d’individus armés, faisant un mort.
Dans un petit commerce de boissons discret et loin des rues principales de cette localité, ce soldat estime sous couvert de l’anonymat que les inconnus armés qui ont attaqué leurs positions (camps de l’armée de l’air et des forces républicaines, au cœur de Grabo) n’ont pas pu y arriver sans « traverser » des villages où leur présence a « forcément » dû être remarquée.
« Il y a des gens qui les cachent », avance-t-il, tirant sur une cigarette d’une main et tenant une arme automatique de l’autre.
Les yeux rougis par quatre jours d’éveil consécutifs, G. G, un autre soldat, soutient que des efforts ont pourtant été faits pour gagner la confiance des populations « mais rien n’a changé », alors que leurs contributions, par dénonciation de toute personne suspecte notamment, faciliteraient le travail des militaires.
Ces affirmations semblent choqués certains habitants de Grabo semblent qui estiment qu’il ne faut pas « confondre » tout le monde. Hermann, une quarantaine d’années, attablé devant des bouteilles de bière en compagnie de ses amis, propose pour lever toute équivoque que les forces de défense « présentent » tous ceux qu’ils disent avoir « attrapé » après les attaques.
« Qu’ils nous les présentent et si on les connait on dira : voici le papa de tel ! », ainsi les FRCI (armée) « iront accuser directement son père au lieu d’accuser quelqu’un d’autre », hausse-t-il le ton tout en agitant les bras, visiblement en colère.
A Dahioké, un village de la sous-préfecture d’Olodio où une attaque perpétrée le même jour a fait deux morts dans les rangs du Bataillon de sécurisation de l’ouest (BSO, armée), les militaires jouent la carte de la modération: « On ne peut pas dire que personne ne collabore avec nous, il y en a avec qui on s’entend très bien », lance l’un d’entre eux, gêné par les propos rapportés de ses frères d’armes de Grabo.
L’un des témoins de l’attaque de Dahioké, surnommé Ben, raconte néanmoins avoir reconnu deux fils du village parmi les huit assaillants qu’il a vu: « Il y en a qui parlaient anglais mais il y en a deux dont j’ai reconnu les voix. Je jouais au foot avec l’un avant et la famille de l’autre est encore dans le village », assure-t-il.
Assis sous un vieil hangar isolé, il baisse le ton de sa voix pour éviter que les rares personnes qui passent ne l’entendent, avant de continuer : »il y en a même un qui est monté chez ses parents », pour signifier sa présence, avant de repartir.
Les jeunes qu’il dit avoir reconnu ont tous les deux quitté Dahioké pour s’installer avec la milice de « Rasta », dans la forêt bordée par le fleuve Cavally, faisant office de frontière avec le Liberia, confie-t-il.
La sous-préfecture de Grabo et le village de Dahioké, situé dans la sous-préfecture d’Olodio, deux localités du département de Tabou (environ 450 Km d’Abidjan), ont été samedi les cibles d’individus armés, qui ont attaqué des positions des FRCI, faisant trois morts dont le « chef » des assaillants.
MYA
Par Manuella YAPI
Alerte-info.net
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