Par Venance Konan
Deux mille quinze, année qui verra l’élection présidentielle au mois d’octobre, approche à grands pas. Et les différents partis affûtent leurs stratégies de combat. À quoi assiste-t-on ? Combat de chefs au Front populaire ivoirien (Fpi). Qui doit diriger le parti aux deux doigts ? Pour certains, il n’a qu’un propriétaire et dirigeant naturel, Laurent Gbagbo.
Certes, il est en prison aux Pays-Bas et, selon toute vraisemblance, n’est pas prêt d’en sortir, surtout que son procès n’a même pas commencé. Peut-on diriger une formation politique qui a vocation à conquérir le pouvoir d’état depuis une cellule de prison à La Haye? Pour les thuriféraires du prodige de Mama, cela n’a aucune importance. Ce qui compte, c’est qu’il soit le président de Son parti et qu’il indique la marche à suivre. Pour eux, cela peut se faire depuis la prison et l’histoire regorge de cas de personnes qui ont dirigé leurs partis à partir de leurs cellules et en sont sorties pour diriger leur pays. Il en existe, au Fpi, pour qui ce parti a été créé par et pour Laurent Gbagbo, pour ne pas dire pour lui et les siens. Il ne saurait donc être question que quelqu’un qui ne ferait pas partie de ce cercle de proches prétende être calife à la place du calife.
évidemment, Affi N’Guessan qui brigue, lui aussi, la présidence de cette formation politique, n’entend pas les choses de cette oreille. Pour lui, un parti sérieux qui a déjà dirigé le pays et aspire à le faire à nouveau se doit, avant tout, de se conformer à ses textes. Et selon ceux-ci, Laurent Gbagbo, tout fondateur du Fpiet ancien Président de la République qu’il est, ne remplit pas toutes les conditions pour être candidat. Mais surtout, il risque de paralyser le parti, si jamais il est porté à sa tête. Ailleurs, on a pu diriger une formation politique depuis une prison et la conduire au pouvoir, mais ici, en Côte d’Ivoire, compte tenu denotre situation et de notre histoire récente, cela risque d’être très compliqué.Par ailleurs, Affi N’Guessan estime que l’une des missions de son parti est d’œuvrer à la libération de Laurent Gbagbo. Or il sera difficile, voire impossible à ce dernier de faire campagne ou du lobbying pour lui-même, tout en étant en prison. La bataille fait rage, en ce moment, au Front populaire entre les deux tendances et à notre connaissance, personne n’a encore eu le dessus. En filigrane, il s’agit de savoir si le parti à la rose devrait aller aux élections, surtout à la présidentielle, ou non. Pour certains de ses membres, aller à la présidentielle, c’est accompagner la victoire probable de M. Ouattara, ce qui est vraiment trop leur demander.
En face du Fpi, il y a le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Là-bas, le débat est articulé autour de ce que l’on a baptisé « l’Appel de Daoukro ». Le 17 septembre dernier, dans sa bonne ville de Daoukro, le président Henri Konan Bédié, ancien Chef de l’état et président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda), a appelé sa formation politique à soutenir sans réserve la candidature du Président Alassane Ouattara et, par conséquent, à ne pas présenter de candidat à la prochaine élection présidentielle. Une bonne partie des militants du Rhdp a soutenu cet appel qui, pour eux, est celui du bon sens. En effet, le Rassemblement participe au gouvernement présidé par Alassane Ouattara et se déclare satisfait des résultats obtenus. Dès lors, le candidat naturel du Rhdp ne pouvait être que Ouattara, à moins que ce dernier ne renonce à l’être, ce qui n’est pas le cas. Seulement, il existe au sein de ce regroupement de partis, surtout au sein du Pdci-Rda, des personnes qui auraient bien voulu être adoubées par leur parti pour aller croiser le fer avec le « Brave tchè ». Pour certaines d’entres elles, l’élection de 2015 est la dernière occasion qu’elles auront de se porter candidates à un scrutin présidentiel, à cause de leur âge. Et sans l’aval de leur parti, leurs chances de victoire semblent bien compromises. Que leur reste-t-il, alors, à faire en dehors de maudire l’auteur de « l’Appel de Daoukro » ? Renoncer, au risque de passer pour une poule mouillée ? Y aller quand même, en sachant que la victoire relèvera du miracle ? Ou encore, y aller, en discréditant au maximum l’adversaire et ses proches par officines interposées, afin de l’affaiblir malgré sa victoire ?
Pour d’autres personnes, l’idée avancée par Henri Konan Bédié de parvenir, à terme, à un parti unifié Pdci-Rdr porterait en gestation un futur parti unique. C’est aller vite en besogne ou être de mauvaise foi. Henri Konan Bédié n’a proposé ni au Fpi, ni au Pit, encore moins à tous les autres partis qui se réclament de la gauche de se joindre à son parti unifié, à notre connaissance.
Venance Konan
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