L’émergence économique en Côte d’Ivoire ne se fera pas sans l’industrie minière

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PRAO Yao Séraphin

La Côte d’Ivoire est l’une des économies les plus performantes de la région ouest-Africaine. Elle représente environ 40% de l’activité de l’Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA). Sur le plan agricole, le pays est le premier producteur mondial de cacao, avec 40% du marché mondial. Le secteur agricole (24% en 2013) est le moteur de l’économie ivoirienne. Il emploie 70% de la population active, contribue à hauteur de 30% au produit intérieur brut (PIB) et représente 60% des recettes d’exportation. En plus, près de trois quart du PIB sont constitués du secteur non échangeable (non marchand) qui comprend notamment l’agriculture vivrière. Le pays pourrait diversifier son économie en exploitant les nombreuses ressources minières du pays.

Une faible contribution de l’industrie minière en Côte d’Ivoire

Le sous-sol ivoirien regorge d’une grande diversité de richesses. Le sous-sol ivoirien dispose de richesses évaluées à plus de 3 milliards de tonnes de fer, 390 millions de tonnes de nickel, 1.2 milliard de tonnes de bauxite, 3 millions de tonnes de manganèse et 100 000 carats de diamant. Les perspectives concernant les ressources fossiles (pétrole brut et gaz naturel) sont également prometteuses au regard des récentes découvertes d’hydrocarbures.
L’exploitation minière en Côte d’Ivoire concerne actuellement l’or (12,66 tonnes en 2012), le manganèse (256 089 tonnes en 2012), le sable lagunaire (338404 m3 en 2012), le granite alluvionnaire (1 644 m3 en 2012), le granite concassé (1, 46 millions de tonnes en 2012). L’or et le manganèse sont les deux produits qui sont exploités de façon industrielle. La production nationale d’or provient de 5 mines : Ity, Angovia, Bonikro, Tongon et Agbaou. Celle de manganèse se localise à Bondoukou.

Avec la nouvelle mine d’or d’Agbaou, d’un coût de 80 milliards de FCFA, la production aurifère nationale est portée à 20% supplémentaire, passant de 13 à 16 tonnes par an. Le potentiel minier ivoirien est important en Côte d’Ivoire. Pourtant le secteur minier contribue peu au PIB. L’activité minière ne représente pas plus de 5% du PIB ivoirien, selon le ministère des Mines. Le secteur emploie environ 30 000 personnes.

La Côte d’Ivoire peut compter sur son industrie minière

Même si aux temps présents, l’industrie minière est marginale, elle est appelée à jouer un rôle important dans les années à venir. D’importants minerais (diamant, manganèse, bauxite, cuivre, fer, nickel, etc.) ont été également mis en évidence dans différentes régions du pays. A l’image du gisement de fer du mont Klahoyo-Tia (1,2 milliard de tonnes), celui du mont Gao (1 milliard de tonnes) et du gisement de nickel latéritique de Sipilou (205 millions de tonnes).
La Côte d’Ivoire ambitionne de relancer son économie en s’appuyant sur le potentiel de ses mines, évalué à 800 milliards de dollars. Pour cette année, les prévisions pour la seule mine de Tongon sont evaluées à 260 000 onces.

Les retombées de l’industrie minière sont importantes. Une industrie minière commerciale peut représenter une source importante de revenu en devises pour un gouvernement de même que de recette fiscale. La mine fournit de l’emploi à de milliers de chômeurs. Le développement de l’industrie minière entraine celui de l’économie locale. On peut voir que les grandes mines investissent beaucoup dans le développement de l’économie locale en assurant la formation des services publics tels que l’éducation et les services de santé et la fourniture de biens publics tels que le transport, l’énergie et les infrastructures. Et pourtant, le pays dispose d’une fenêtre d’opportunités.

Les mesures nécessaires à prendre

Le potentiel minier ivoirien est important mais reste peu exploité. Il est impératif de lever certains obstacles. Les données géologiques et minières sont insuffisantes, les prospections et les recherches ne sont pas importantes, et les ressources humaines sont peu qualifiées. En plus, le cadre législatif doit être adapté aux évolutions du secteur. Le 24 mars 2014, le Président de la République de Côte d’Ivoire, a promulgué la Loi No. 2014-138 portant Code Minier adoptée par l’Assemblée Nationale en date du 5 mars 2014. Le Nouveau Code Minier vient modifier et remplacer la Loi No. 95-553 du 18 juillet 1995 portant Code Minier. Il est donc nécessaire de créer un cadastre des droits miniers.

Etablir une règlementation incitative et un cadre administratif pour l’extraction des ressources minérales doit permettre d’accorder des licences, de définir les conditions dans lesquelles l’exploration ou l’extraction peuvent se dérouler. Il faut multiplier les permis de recherche et les autorisations. Pour combattre l’exploitation clandestine, il est urgent de donner les permis de recherche et des autorisations à des privés nationaux organisés en groupement d’intérêt économique (GIE). Ce serait la meilleure façon de lutter contre l’exploitation clandestine des produits miniers. Cela permettra de stabiliser la production nationale car la durée de vie des mines n’est pas longue. Par exemple, la durée de vie de la mine d’or de Tongo oscille entre 6 et 7 ans. La mine d’or d’Agbaou qui a une capacité de réserve estimée à « 35 tonnes » sera exploitée pendant 8 ans. Les deux nouveaux permis d’exploitation (Tingrela sud et Kouassi-datekro) obtenus par Randgold vont dans le bon sens. Le gouvernement doit également faciliter l’obtention des agréments de vente et d’achat d’or afin d’éviter que ce commerce profite aux pays voisins car il se fera sans prélèvement des taxes de l’Etat (Ad valorem, taxe sur l’or). Les ex-chefs de guerre continuent de perpétuer l’économie de guerre en développant un commerce illicite avec des hommes d’affaires des pays voisins. Le projet de traçabilité de la production du diamant ivoirien mis en place par le gouvernement revêt tout son intérêt dans la lutte contre l’économie souterraine.

Au niveau politique, les dirigeants ne doivent pas utiliser leur accès aux ressources financières que procurent les industries extractives pour promouvoir leurs propres intérêts. Les ressources doivent être utilisées au mieux dans l’intérêt des populations. Comme avec les autres secteurs, il importe d’élaborer et de conserver un cadre de gouvernance fondé sur l’État de droit, et de soutenir les institutions qui offrent un environnement incitant les entreprises à investir dans des activités productives. Pour attirer les investissements miniers, il faut préserver la primauté du droit et respecter les contrats négociés ainsi que les droits de propriété. Les juridictions qui ne le font pas ne peuvent être compétitives sur un marché mondial.

Les gouvernants doivent également signer des contrats équitables. En effet, leur but n’est pas simplement d’assurer à leur pays des revenus plus élevés, mais également de prendre en compte les préoccupations depuis longtemps exprimées par les populations sur les questions de la pollution de l’environnement et de l’indemnisation des habitants déplacés par les exploitations minières.

Conclusion

Le secteur minier peut créer un effet multiplicateur en contribuant au développement d’activités connexes qui intéressent des entreprises nationales et internationales. La demande de nouvelles technologies et l’adaptation de celles existant déjà s’est renforcée et continuera à croître. En participant aux chaînes de valeur mondiales, les économies africaines s’offriraient la possibilité d’échapper à la seule production de matières premières et de créer des secteurs industriels dynamiques et compétitifs, capables de transformer l’abondante production minière du continent africain. Ils s’offriraient en outre la possibilité de créer des emplois viables et de d’étendre la croissance.

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