Côte d’Ivoire présidence du FPI – Gbagbo et Affi du duo au duel

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Alea jacta est. La bataille pour la tête du FPI est lancée. Face-à-face, deux candidats: d’un côté, Pascal Affi N’Guessan, l’actuel chef de file, et de l’autre, Laurent Gbagbo, le chef de l’État déchu et père fondateur du parti. Combat de gladiateurs descendus dans l’arène. Affi N’Guessan a été l’alter ego de Laurent Gbagbo: directeur de cabinet du secrétaire général du FPI, directeur national de campagne du candidat Gbagbo à la présidentielle d’octobre 2000, Premier ministre des trois premiers gouvernements sous la présidence de Laurent Gbagbo et président du FPI, avec la caution de son mentor.

Le disciple va croiser le fer électoral avec son maître au 4è Congrès du FPI (11, 12, 13 et 14 décembre 2014). Car, il a refusé de s’en faire conter par ses adversaires en interne qui animent le courant «Gbagbo ou rien». Affi a assimilé la candidature de Gbagbo à la présidence du parti que ces derniers ont déposée le 31 octobre à un chiffon rouge qu’ils veulent agiter pour qu’il renonce à briguer un autre mandat dans un seul objectif : les laisser en roue libre afin de faire main basse sur le parti, sans coup férir. Surtout que l’ex-président du FPI n’a pas encore produit l’acte de candidature manuscrit et signé.

«Les gens exploitent le nom de Gbagbo pour leurs propres intérêts. Ce n’est pas tous ceux qui disent Jésus, Jésus qui sont les bons pasteurs. Il m’a donné le parti; s’il veut le reprendre, il va me le dire,» a argumenté, avec une pointe de frustration, Affi qui a donc franchi le Rubicon, ce 12 novembre, en déposant sa candidature. Il justifie cet acte par «une motivation d’ordre militant, c’est mon appartenance au FPI, c’est-à-dire la liberté et le droit qu’a tout militant d’un parti démocratique, de briguer la présidence du parti s’ il remplit les conditions». «Il existe, développe l’écrivain russe Fiodor M. Dostoïevski pour expliquer ces sortes de duel, une loi politique et peut-être naturelle qui exige que deux voisins forts et proches, quelle que soit leur mutuelle amitié au début, finissent toujours par en venir à un désir d’extermination réciproque.»

L’ambiance est donc électrique; la raison a fait ses adieux et la compétition électorale sacrifie à la bonne tradition ivoirienne: les quolibets, les inimitiés, les insanités et les invectives. Au PDCI-RDA, les militants qui avaient rejoint, sous la transition militaire, le général Robert Guei, chef de la junte qui a renversé l’ex-parti unique le 24 décembre 1999, avaient été traités de Judas, c’est-à-dire des fourbes et des hypocrites «qui voulaient donner leur mère en mariage à celui qui a tué leur père». Au FPI, c’est le même son de cloche. Affi et ses partisans sont assimilés à Brutus, c’est-à-dire des traîtres qui, à l’instar de Brutus qui donna la mort à Jules César, son beau-père, sont en train de commettre un parricide en poignardant Laurent Gbagbo, le père-fondateur du parti.
C’est la guerre des tranchées, à laquelle refuse de se livrer officiellement Affi. «Je suis candidat par devoir envers Laurent Gbagbo,» indique-t-il, martelant que, contrairement à ce que ses détracteurs pensent, il est «candidat pour la libération du président Laurent Gbagbo» détenu à La Haye après les violences post-électorales et à qui la Cour pénale internationale (CPI) vient de refuser, pour la septième fois, la liberté provisoire. Son procès pourrait s’ouvrir, selon la proposition de la procureure Fatou Bensouda, en septembre 2015 pour quatre charges de crimes contre l’humanité (meurtre, viol, autres actes inhumains ou, à titre subsidiaire, tentative de meurtre et persécution).

Le président sortant du FPI veut ainsi éviter l’affrontement direct avec Laurent Gbagbo dans un jeu d’équilibre politique: si sa candidature n’est pas dirigée contre le pensionnaire de la prison de Scheveningen dont il revendique l’héritage, il se trouve opposé à lui dans la course. Sur ce chapitre, Affi rejoint, un an plus tard, Alphonse Djédjé Mady, ex-secrétaire général du PDCI-RDA. Candidat au 12è Congrès (3, 4 et 5 octobre 2013) à la présidence du plus vieux parti de Côte d’Ivoire, il devait affronter Aimé-Henri Konan Bédié, le président sortant. «On n’est pas candidat contre quelqu’un; on est candidat pour proposer ses services. Je suis candidat, je ne suis pas candidat contre quelqu’un. Je suis candidat pour servir mon parti et, à travers mon parti, servir mon pays,» assenait-il pour montrer patte blanche.
Le sort en est donc jeté. De duettistes, Gbagbo et Affi deviennent des duellistes d’un combat politique qui oppose deux lignes de fractures irréconciliables: l’abstention, voire le boycott de toute participation au jeu politique sans le préalable de la libération de Laurent Gbagbo et l’entrisme dans le jeu politique comme moyen de l’élargissement de Gbagbo et de conquête démocratique. C’est un dialogue de sourds et un conflit de leadership que le 4è Congrès va souverainement arbitrer. Dans un climat chargé d’électricité.

FB
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