C’est une autre pomme de discorde qui met dos à dos les membres de la famille de Gado Marguerite. La nonagénaire, génitrice de l’ex-président Laurent Gbagbo, est décédée le mercredi 15 octobre, alors que ses enfants tentaient de la ramener à Blouzon, son village natal. Sa dépouille est conservée, depuis, à la morgue de Gagnoa, en attendant que la famille décide du lieu de l’enterrement et des funérailles. Sur la question, les réunions se tiennent à n’en plus finir. Jusque là, la fumée blanche tarde à sortir. Selon des proches de la matriarche, elle avait souhaité, de son vivant être enterrée à Blouzon, le village qui l’a vu naître, il y a de cela quatre vingt quatorze hivernages. Blouzon est un village du canton Nékédi, séparé de Ouragahio la sous-préfecture, par 35 kilomètres. Elle quitte ce patelin, lorsque son mariage
avec Koudou Paul, le père de ses deux enfants – Laurent Koudou Gbagbo et Koudou Jeannette – bat de l’aile. Gado Marguerite s’installe, ensuite, à Gnaliépa où elle mène une vie paisible. Si elle n’a pas eu d’enfants de ce second mariage, elle a eu, en revanche, à s’occuper des rejetons de son époux, Robert Séry. Gnaliépa, le village de son dernier époux devrait être, en tout cas au regard de la tradition bété assez formaliste, le lieu où doit reposer la défunte. C’est ce que revendique, d’ailleurs, la communauté villageoise de Gnaliépa. Qui a dépêché, dimanche, une délégation dirigée par le chef Barthélémy Dalys Moloko et composée en grande partie des enfants de l’ex-défunt mari, à Blouzon pour annoncer le décès de la matriarche et revendiquer que les funérailles se tiennent à Gnaliépa, qu’elle a quitté en raison de la crise postélectorale. Mais l’affaire n’est pas aussi simple. D’abord parce que, explique une source au fait de la procédure, Gado Marguerite aurait expressément demandé à retourner à Blouzon et pas à Gnaliépa. Ensuite, parce que n’ayant pas eu d’enfants dans ce second village, cela la libérait de cette obligation. Une source proche de la famille indique, en sus, que durant son exil ghanéen, la mère de Laurent Gbagbo n’a bénéficié d’aucun acte de solidarité de ses parents de Gnaliépa, ni individuellement, ni collectivement. «Personne ne s’est jamais rendu au Ghana, ni à titre individuel ni à titre collectif pour montrer un quelconque attachement à la vieille. Chez nous les bété, il n’y a pas mille façons de montrer l’appartenance à une communauté mais il n’y a pas aussi mille façons d’en exclure quelqu’un. Ce désintérêt manifeste a été perçu par la concernée comme un reniement», a expliqué notre informateur. Qui tranche en affirmant que pour ces raisons, «c’est certainement Blouzon qui sera choisi pour l’enterrement de Gado Marguerite». De sa cellule de Scheveningen, à La Haye, l’ex-chef de l’Etat en deuil, a confié l’organisation des funérailles de sa mère à Aboudrahamane Sangaré l’une des têtes fortes de son parti, le Front populaire ivoirien (Fpi). Ce dernier a rendu visite, vendredi, aux habitants de Mama et de Blouzon.
Il se rendra, à nouveau, dans la région, mais comme le dit notre interlocuteur, son premier choix est révélateur de l’état d’esprit tant de Gbagbo que de la famille. Aboudrahamane Sangaré n’étant pas bété, donc pas au fait des subtilités de la tradition, son choix n’aurait pas été fait au hasard. Dans le mêmetemps, la famille Koudou, installée à Abidjan reçoit les condoléances, au domicile d’Henri Gossé, un des neveux de la défunte. Les cadres de la région se réunissent, eux aussi, certainement pour évaluer leur participation à l’organisation des obsèques de la disparue. «(…) Je voudrais rassurer qu’il n’y a aucun problème concernant le lieu d’inhumation de la vielle. Ceux qui informent dans ces villages ne sont forcément pas au courant des grandes décisions», a temporisé un responsable du Fpi. Qui ajoute que «ce décès ne devrait pas créer de polémique». «C’est encore Gbagbo qui avait demandé que sa mère soit transférée à la morgue de Gagnoa. C’est lui seul qui décidera au moment opportun du lieu d’enterrement et pour l’heure, rien n’est encore fait dans ce sens», at-il conclu.
L’Expression
Par M’Bah Aboubaka
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