Par Alex Njeru article publié en collaboration avec Libre Afrique
Pour mettre fin aux crises persistantes en Afrique, le président zimbabwéen Robert Mugabe a renouvelé ses appels en faveur d’un président panafricain capable de diriger les États-Unis d’Afrique. Il a repris le refrain du panafricanisme de l’ex-dirigeant libyen Mouammar Kadhafi comme un moyen de développement de l’Afrique. Plus les choses changent, plus elles restent les mêmes. Quelle nouvelle voie pourrait permettre de redonner un sens à l’union?
En Afrique, durant les périodes coloniale et post-coloniale, le «panafricanisme» était très populaire. On comptait d’ardent défenseur tel que Kwameh Nkrumah alors que d’autres comme Haille Sellasie, Ahmed Sékou Touré et Mouammar Kadhafi en étaient les prosélytes. Ils trottaient aux quatre coins du continent à la recherche de nouveaux adhérents pour les convertir. Ce fut l’une des raisons de la création de l’Union africaine.
Cependant, très peu d’efforts ont été déployés pour penser ce panafricanisme et ce qui devrait être, dans sa forme, sa substance et sa philosophie. Son attrait émotionnel a bien fait de dynamiser la lutte pour l’indépendance des pays africains. Malheureusement, il n’est pas allé plus loin que d’appeler à un agenda pour le développement. Le panafricanisme était censé être la force qui allait galvaniser la cause africaine. Il était censé donner à l’Afrique une identité postcoloniale, un sens à son existence, une rupture avec l’hégémonie eurocentrique. Mais, parce que dans son essence même, le panafricanisme était très amorphe, aucun de ces objectifs n’a été atteint.
Aujourd’hui, de nombreux jeunes Africains inconscients des fondements du panafricanisme s’agitent pour sa réanimation. Ils viennent avec toutes sortes de concepts tels que «afro-optimistes» et ont cette noble idée que l’orientation de l’Afrique vers l’insularité peut porter ses fruits. Ils ont tort. D’abord, parce qu’ils n’ont pas pris assez de temps pour comprendre l’agenda panafricaniste des anciens. Ensuite, parce qu’il est insensé de penser que la renaissance de l’Afrique peut résider dans un programme africain qui sacrifie la forêt pour les arbres. Le panafricanisme aura un véritable sens lorsque le libre-échange sera autorisé, que les droits individuels seront respectés et que le pouvoir politique appartiendra vraiment au peuple africain.
Avons-nous vraiment identifié le véritable sens du panafricanisme? Ou au moins les valeurs sous-jacentes au panafricanisme? La forme primordiale du panafricanisme, celle proposée par Nkrumah et ses autres contemporains était essentiellement fondée sur « la consolidation du pouvoir en Afrique». En d’autres termes, c’était la tentative pour l’Afrique de prendre la place qu’elle mérite sur l’échiquier international. C’était le désir égocentrique de Nkrumah de devenir l’ « Asantehene » de l’Afrique. Ces géocentricismes par les partisans du panafricanisme, ne sont pas étrangers à notre indifférence et notre scepticisme à l’idée du panafricanisme de Mugabe. C’est parce que ca manquait de profondeur et ne favorisait aucune unité entre les peuples africains.
Avec des promoteurs comme les présidents du Zimbabwe Mugabe et celui de la Gambie Yahya Jammeh, d’un coté pérorant le mantra de la justice sociale et d’un ordre social unifié, et de l’autre faisant exactement le contraire en méprisant les droits de propriété et les libertés individuelles, il n’est pas étonnant que le panafricanisme des politiciens et des bureaucrates soit mort alors que le panafricanisme du peuple survit.
Il est encore difficile de voyager à travers l’Afrique et le transport coûte plus cher que dans n’importe quelle région du monde en raison de nombreuses restrictions et règlementations frontalières. Rien ne favorise la paix plus que le commerce et rien n’est plus fatal aux communautarismes que le voyage.
Si le panafricanisme avait réussi à briser les frontières coloniales et recomposer une Afrique unie à nouveau, alors peut-être qu’il aurait eu une certaine crédibilité. Ce n’était pas le cas pour des raisons diverses, notamment parce que les dirigeants africains étaient trop protecteurs des petits fiefs post-coloniaux et ont échoué à réaliser l’intégration politique et l’intégration économique. À ce jour, l’Afrique demeure le continent le plus fragmenté dans le monde. La réalisation optimale du commerce intra-africain a été semblable à la résolution de l’infâme Rubik’s cube. Il y avait et il y a eu une cohérence au sujet du panafricanisme ; sa sur-dépendance au socialisme et son affection pour Marx, signifient que rien de bon ne sortira de celui-ci. C’est pourquoi ses ramifications ou plutôt l’indépendance idéologique qu’elle prétendait soutenir ont été désastreuses.
Le panafricanisme a besoin d’une pause dans les pages ésotériques des bureaucrates de l’Union africaine et d’un nouveau sens populaire dans les sommets où les dirigeants africains sont réunis. Il doit être libéré de la planification humaine et être laissé à l’action humaine. C’était la façon dont il était à l’époque pré-coloniale, lorsque le commerce transsaharien prospérait sans restrictions frontalières. La transmission sans frontières des idées et des valeurs des peuples de l’Afrique à travers l’industrie du divertissement est la voie à suivre.
La renaissance du panafricanisme dépend de sa capacité à livrer des fruits tangibles du développement. Le panafricanisme n’aura aucune valeur psychologique réelle s’il n’est pas associé au fait d’être citoyen d’un continent cosmopolite avec le respect des droits et des politiques qui induisent le développement continental.
Alex Njeru, analyste pour africanliberty.org
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