La surchauffe politique, à la veille des échéances électorales de 2015, fait les choux gras de la presse ivoirienne. Le Front populaire ivoirien (FPI, parti de l’ex-président Gbagbo) est à la croisée des chemins, ne sachant sur quel pied danser et surtout quel accueil réservé à l’invitation, le 17 juillet 2014, du président français François Hollande à prendre part aux élections à venir: «Ce parti, s’il veut exister demain, doit être présent aux élections». Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA, ex-parti unique) est, lui aussi, tiraillé entre divers courants après le ralliement de son président à la candidature du chef de l’État sortant à la prochaine présidentielle.
Et comme toujours, la presse ivoirienne, prise d’ivresse dans ces moments de tension, perd son trône de quatrième pouvoir (qu’elle n’a jamais voulu occuper), pour être le valet et l’otage du pouvoir politique. Et le tableau est saisissant dans un pays où la quasi-totalité des quotidiens sont ou dans l’escarcelle de la coalition politique au pouvoir ou proches de l’opposition.
Du côté des «Journaux bleus» regroupés sous l’appellation des «Journaux victimes du 11 avril 2011» ou JV11 (Notre Voie, Le Temps, Le Quotidien d’Abidjan, Aujourd’hui, Le Nouveau Courrier, LG Infos, Révélation…), c’est-à-dire proches du régime déchu de Laurent Gbagbo, c’est la guerre fratricide des tranchées. Ici deux lignes éditoriales, conduites l’une par Notre Voie et l’autre par Le Temps, s’affrontent, à coup de plumes, pour soutenir les tendances qui se livrent une guerre sans merci à l’effet de contrôler le FPI.
Le problème du respect des institutions.
Du côté des quotidiens proches du pouvoir et baptisés Journaux pour la sauvegarde des acquis du 28 novembre 2010 ou J28 (Le Patriote, Le Nouveau Réveil, Nord-Sud quotidien, L’Expression, L’Intelligent d’Abidjan, Le Jour plus, Le Mandat, Le Démocrate et La Matinale), c’est la veillée d’armes. Ainsi, si L’Expression n° 1542 de ce jeudi 9 octobre 2014, reste sobre en soutenant que «Le J28 soutient Bédié», le quotidien Le Mandat n° 1467 de ce même jour est tout feu tout flamme : «Appel de Daoukro : des patrons de presse prêts pour le combat.» Tout est dit dans ce petit résumé: le journaliste ivoirien, combattant de la liberté, n’est qu’un soldat confiné dans le rôle de simple exécutant ou de courroie de transmission.
Et tant pis si, après le mépris souverain réservé à notre Conseil constitutionnel, dont l’arrêt pourtant insusceptible de recours, a été superbement ignoré à la présidentielle du 28 novembre 2010, «L’appel de Daoukro» remet le couvert. Car cette déclaration qui s’est faite en violation flagrante des résolutions du 12è Congrès du PDCI-RDA (instance suprême du parti), devrait interpeller chacun des Ivoiriens sur la force de nos textes et le sérieux des engagements, car posant le vrai problème du respect sacro-saint des institutions ivoiriennes. «L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais de fortes institutions», disait Barack Obama, le 13 juillet 2009 au Ghana, pour prêcher dans le désert.
Presqu’aucune rédaction, dans la querelle de chiffonniers, ne se pose cette question qui engage la vie de la nation et aucune, au front, ne semble avoir cure de la situation délétère de la presse au regard des chiffres sur les volumes de vente du 3è trimestre 2014: pléthore de journaux, 24 quotidiens, face à un lectorat insignifiant, désaffection des lecteurs désabusés face à un traitement partisan de l’information, ventes donc en chute libre malgré les réductions des tirages et menace de disparition de nombre de quotidiens qui sont de véritables gouffres à sous.
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