Position du problème
Né en réaction d’une pratique politique monolithique et d’une pensée unique cultivées pendant des décennies en Côte d’Ivoire, le FPI se veut un parti pour le peuple et par le peuple. Ce parti a le vocable « front » dans son appellation parce qu’il se veut celui qui sait conjuguer et gérer tant les contradictions qui peuvent le traverser que la diversité des opinions que peuvent à juste titre porter ses militants et ses sympathisants. Au total, l’intérêt général venant toujours l’emporter sur toutes autres considérations. Suite à la guerre que Nicolas Sarkozy a menée à la Côte d’Ivoire en instrumentalisant l’ONU, le FPI a été mis à mal et presque désorienté.
Grâce à la mobilisation de ses soutiens et l’endurance de la direction intérimaire, le FPI a su graduellement se relever. Cela dit, il importe de noter que dans un environnement qui se veut démocratique, la direction d’un parti vertueux doit présenter sa démission lorsqu’il arrive des évènements graves pendant sa mandature. Ceci afin de s’interroger pour comprendre et intégrer ses insuffisances. Si la direction du FPI n’a pas présenté de démission ni après le 19 septembre 2002 ni après le 11 avril 2011, elle doit en compensation faire preuve d’humilité – ne serait-ce que pour promouvoir le respect mutuel -. Puisque les militants, les sympathisants de ce parti et tous ceux qui soutiennent Laurent Gbagbo et/ou la Côte d’Ivoire relativisent les choses sur la base du contexte et de l’environnement socio-politique.
Par ailleurs, à la faveur d’un vote le 13 septembre dernier, le Comité central de ce parti a tranché la question de la participation du FPI à la CEI, en décidant souverainement de quitter cette structure, que le président du parti avait au préalable intégrée sans l’onde de consensus dans son parti. Il convient aujourd’hui de se réinterroger sur la posture de ceux qui reviennent sur la question de la CEI, alors qu’aucun élément n’est venu apporter une amélioration au vécu de nos concitoyens.
Y a-t-il un pacte occulte que le président du FPI a signé avec le pouvoir (et ses parrains) pour qu’il s’accroche à l’idée de participer à cette CEI dans les conditions actuelles ?
Nous entendons ici que la Communauté internationale est plus forte et qu’il faut se plier à ses exigences ; nous entendons là qu’il faut (re)intégrer la CEI sinon le parti disparaîtra. Cela nous amène à poser la question de savoir pourquoi le président du FPI a accepté d’être le Premier ministre de la Refondation qui est censée lutter contre l’impérialisme. Les contradictions – exposées, chaque jour qui passe – nous interpellent non seulement sur les réelles visées de camarades qui veulent faire la part belle à Ouattara, mais également sur leurs capacités à respecter les règles démocratiques. Il faudrait nécessairement remettre les choses à l’endroit. La direction du FPI doit mesurer les vrais enjeux pour appréhender les véritables attentes des Ivoiriens. Plutôt que de voir les interpellations comme une question de personne, il convient d’intégrer que les cultures et aventures périphériques sont non seulement hasardeuses mais aussi fragilisent le parti, vu que la direction navigue en décalage avec les choix de la base. L’incarnation actuelle pose donc clairement la question de la vision et de la ligne. La question de la CEI étant tranchée depuis un mois, il nous semble que la direction du FPI doit revenir dans son rôle. Celui qui est d’agréger ses différentes ressources – tant financières qu’humaines – pour se donner les moyens de représenter une opposition qui peut reconquérir le pouvoir pour le bien-être des Ivoiriens. Le FPI doit se battre avec des convictions. Souvenons-nous que Sarkozy a fait la guerre à la Côte d’Ivoire sous le prétexte de la promotion de la démocratie. C’est donc sur ce terrain-là – de l’expression plurielle, de la liberté de penser et de manifester, du respect des Droits de l’homme, … – que le FPI doit rassembler pour mettre à nu l’imposture. A la lumière des observations de la posture des uns et des autres, nous constatons qu’au-delà des approximations conjoncturelles, des arrangements marginaux et des considérations opportunistes, le FPI n’a toujours pas envoyé un signal clair pour motiver ses partisans, en se mettant à leur diapason, aux fins de les placer en ordre d’une bataille qui en vaut la peine. Le communiqué du Comité central du 14 août 2014 indique en son point 9 : « 9. Le Comité Central, soucieux de préserver l’esprit démocratique et l’unité du Parti par la solidarité, la discipline, la critique, l’autocritique et la tolérance, décide :
…
– De s’abstenir de toute attitude et comportement en parole et/ou en acte, susceptibles de porter atteinte à l’unité du Parti ou de la fragiliser ;
– De renforcer la pratique de la confiance dans les actes et les paroles de chaque militant;
– D’éviter la formation de groupes et mouvements politiques à l’intérieur du Parti, en dehors des dispositions statutaires en la matière, notamment l’article 5 des Statuts ;
– De mettre en place des critères objectifs et concertés pour la promotion des militantes et militants au sein des organes du Parti, afin de garantir la justice, la transparence et la cohésion ;
– De renforcer l’observance du principe socialiste de la résolution des contradictions internes par des débats démocratiques, ouverts et responsables ;
– De mettre à débat, prestement, avant l’échéance du Congrès, au sein des instances compétentes, les grandes questions qui engagent le Parti, notamment les élections, la CEI, les négociations avec le Gouvernement et la politique en matière de relations extérieures.
– De concilier l’exigence de l’efficacité et la cohésion du Parti, notamment par l’action concertée ;
– De promouvoir le bon fonctionnement démocratique à l’intérieur des différents organes, notamment par le respect de la règle de la majorité, aux dépens de stratégies pouvant prêter à confusion… ».
Il nous a semblé qu’au cours de ce même Comité central, le président du FPI avait regretté sa gestion solitaire des grands problèmes qui engagent le parti. S’il s’agissait d’une posture, il faudrait déplorer la méprise qui consiste à penser qu’on peut persister à instrumentaliser des camarades. En fait, au regard des expériences diversement vécues, il est temps de « mettre les cartes sur la table ». Le FPI exprime sans nuances ses besoins d’hommes et de femmes capables de s’ouvrir, d’accepter les contradictions, d’être à l’écoute et qui sachent gérer les différentes ressources au moins humaines. Il faut rappeler au président du FPI que des Ivoirien(ne)s de fortunes diverses sont éparpillé(e)s à travers le monde contre leur gré. En faisant objectivement le point, ceux qui appelaient tout le monde à s’empresser à rentrer au pays, doivent se raviser que le compte n’y ait pas. Pourquoi donc cette attitude d’entêtement qui refuse de voir les ratés sur le chemin parcouru ? Le président du FPI a-t-il véritablement compris ce qui est arrivé aux Ivoiriens ? Les fuites en avant, les tergiversations, les atermoiements et les élans de dévoiements ne peuvent que faire douter.
A la lumière de ce qui précède, il faut déjà rappeler que le FPI est un parti démocratique. Cette valeur qui est le moteur de rassemblement du parti ne saurait être bradée pour des intérêts personnels et égoïstes. Le congrès à venir devra mettre en place une équipe soucieuse des intérêts des populations. Cela suppose des hommes et femmes à l’écoute de la base et qui acceptent des élans d’imagination, d’inventivité et d’innovation. En clair, il faudra des animateurs qui aient épousé une façon contemporaine de faire de la politique.
Claude KOUDOU
Analyste politique
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