FPI Côte-d’Ivoire CEI, Congrès…Comment AFFI a reculé pour mieux sauter

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(Une analyse de Philippe Kouhon)

A la veille du comité central du FPI qui se tient ce samedi 30 août 2014, elles sont nombreuses les mauvaises langues qui prédisent déjà la chute programmée du président Pascal Affi Nguessan.
Après près de deux mois de crise profonde au sein de la famille bleu-blanc, crise qui a failli emporter les fondamentaux du parti de Laurent Gbagbo, peut-on vraiment dire que le camp des modérés conduit par AFFI tient encore la barque ?
Qu’en pensent les plus pessimistes ?
A en croire ces derniers, les radicaux et non des moindres composés d’anciens syndicalistes et autres militants de premières heures auraient réussi à tordre le bras de leur chef (Pascal Affi Nguessan). Aux premières heures des discussions suite à la crise née du réaménagement technique du 4 juillet, sur 117 interventions au cours d’une réunion de crise, une centaine était contre la position de Affi. Secondo, alors que Pascal Affi avait voulu passer en force en rétrogradant plusieurs cadres du parti, celui-ci a été rappelé à l’ordre en réhabilitant tout le monde à l’exception du secrétaire général, Laurent Akoun. Troisièmement, toujours pour ces pessimistes, la moitié des membres du comité central serait en désaccord avec les orientations de AFFI. Enfin, alors qu’il a désigné le représentant du parti à la CEI, Affi est sommé de retirer ce dernier. Voici autant de signes qui font croire que si le président du FPI a pu étouffer le feu, il ne l’a pas éteint définitivement.
Qu’en pensent alors les plus optimistes ?

Pour ces derniers, si la démocratie suppose qu’on prenne toutes les décisions après débat, la raison ne doit pas toujours fonder l’action. « Il faut parfois recourir à l’absurde pour régler certaines questions d’ordre politique ». En outre, si on tient compte du communiqué final du dernier comité central d’avant la crise et qui exigeait une CEI « équilibrée » avant toute entrée, une position suivie par Affi Nguessan lui-même en tant que président du Comité central, il est clair que Pascal Affi aurait dû attendre le second Comité central (instance de décision et qui se réuni entre deux Congrès) pour arracher cette nouvelle décision d’envoyer un représentant à la CEI. Mais il faut le savoir, le comité central se tenant tous les 3 mois, fallait-il attendre tout ce temps avant de prendre une décision même si l’urgence s’impose ? En cas de ballotage au sein du parti, que fait-on du pouvoir discrétionnaire du président ? Affi Nguessan aurait dû attendre la tenue du prochain Comité central avant de rencontrer François Hollande ou avant de répondre aux invitations des diplomates internationaux ? Entre deux comités centraux, le monde devrait-il s’arrêter ? Existe-il une vraie crise de confiance au sein du FPI ? Comment Affi a-t-il trahi la ligne politique du parti ? Finalement, n’est-ce pas l’individu Affi qui est contesté ? Une autorité que l’aile dure n’a jamais respectée. Là où Laurent Gbagbo avait le loisir de prendre des décisions parfois contre l’avis du parti. Pourquoi ce deux poids deux mesures ?
L’esprit de notabilité (militants de premières heures), l’esprit de famille (bété ou baoulé) ou encore l’esprit syndical (recherche d’intérêt de groupe) a-t-il pris le dessus sur l’esprit national ?
La politique de résultat ou la politique du woodysme ?

Là où le père fondateur du FPI lui-même prône « la transition pacifique à la démocratie » avec son slogan « asseyons-nous et discutons », on trouve encore dans le rang des disciples de Gbagbo des gens qui jouent les va-t-en guerre. « Il faut rendre ce pays ingouvernable. Pourquoi Affi ne programme-t-il pas des marches dans le pays ? » Voilà les reproches faites à Affi. Mais alors, ont-ils tiré les leçons de l’échec de la politique du FPI et qui l’a conduit à la perte du pouvoir ? N’est-il pas lucide de fonder toute action politique vis-à-vis de l’opinion nationale et internationale ? Quelle est la marge de manœuvre du FPI pour obtenir la libération de leur champion contesté par l’ensemble de la communauté internationale ? Finalement qui travaille d’entre Affi et les radicaux contre le FPI et contre Laurent Gbagbo ?
Aussi, concernant la CEI, en quoi l’entrée du FPI arrête-elle la poursuite du combat ?

Du comité central du samedi prochain.

Là où le comité de contrôle devait jouer son rôle, celui-ci a cédé la place à un comité de médiation qui a fini par arrondir les angles sans régler définitivement le problème. Et si la feuille de route de cette médiation continue d’être discutée, il appartient au prochain comité central d’entériner les décisions prises après que ce même comité central réuni en sa session extraordinaire la semaine dernière ait pris acte de la nouvelle décision. Mais alors, que peut-on attendre de ce comité central de ce week end ? « Remettre à débat l’entrée du FPI à la CEI et fixer la date du prochain Congrès le 30 août », voilà les deux points essentiels programmés par le dernier comité central extraordinaire. Si la seconde question a déjà trouvé une réponse (un congrès prévu pour la première semaine de décembre 2014), la première, elle suscite encore débat.
En effet, pour les adversaires de Affi, une participation du FPI à cette CEI serait la preuve de la reconnaissance du pouvoir et de l’autorité du président Alassane Ouattara là où la question de qui a gagné les élections de 2010 est encore pendante à la CPI. Le problème, c’est comment obtenir la libération du même Laurent Gbagbo en continuant de pratiquer la politique de la chaise vide ou de la terre brûlée ? « Le comité central ne peut pas se substituer au congrès qui est la seule instance qui a un pouvoir électif. Le comité central peut condamner un acte, peut prononcer un avertissement, un blâme ou une suspension d’un militant. Il peut aussi désavouer le chef pour une raison. Il peut enfin mettre en minorité les décisions du président. Mais seul le congrès peut contraindre le président à la démission. Enfin, en cas de suspension, il faudra attendre le congrès pour trancher » nous confie un cadre du FPI. Ce qui signifie qu’en cas de décision d’un éventuel retrait du FPI de la CEI, il faudra attendre le prochain congrès pour rendre effective cette décision. « Ils peuvent nous mettre en minorité, mais nous ne démissionnerons pas. Seul le congrès pourra mettre fin à notre action » nous révèle un proche du président Pascal Affi Nguessan.

Comment AFFI a vaincu à moitié ses adversaires
« Ils ont tiré sur nous à bout-portant mais nous ont raté » révèle un lieutenant de Pascal Affi Nguessan qui a requit l’anonymat. Pour ce dernier, le fait de répondre à une convocation du secrétariat exécutif, ou du secrétariat général ou enfin du comité central, tous présidé par le président du parti est une victoire là où un boycott pouvait pousser celui-ci à la démission parce que contesté.
Et si cette crise a révélé au grand jour les ennemis du président Affi, cela lui donne un net avantage pour le prochain Congrès.
Car voilà enfin un président averti qui s’apprête à aller à une élection. Seulement, même si la politique demeure la juste appréciation des réalités du moment, un message bien compris par Affi Nguessan et s’il est vrai qu’un semblant d’accalmie est revenu au sein du FPI, les observateurs les plus avertis pensent que la bataille aura tout de même lieu.
On le sait, ce qui vient de se passer n’est nullement un jeu d’enfant. C’était bien la guerre des héritiers. Affi qui semblait être le digne héritier de Gbagbo avait voulu imprimer sa marque et l’imposer aux autres. Sa démarche était simple :
S’imposer en prenant le contrôle total du parti afin de lui inculquer sa propre orientation du combat. D’où le dernier réaménagement qui prenait en compte certes les autres membres du parti mais les noyautait. Et si le pari avait été gagné, les partisans de cette nouvelle configuration allaient l’aider à asseoir ses idées et sa stratégie dans le cadre d’un débat contradictoire avec ses pourfendeurs déjà mis en minorité dans ce bureau.
Ainsi ces derniers partageraient sans le vouloir les positions du parti qui était en fait, étaient celles de Affi sur la sortie de crise et sur l’avenir du parti.
Mais c’était sans compter avec la combativité et la grande vigilance de ses adversaires qui ne sont pas nés eux aussi de la dernière pluie. Voilà le fond de la crise qui secoue actuellement le parti de Laurent Gbagbo. Et si cela a fini par aboutir à un comité de médiation qui a réussi à calmer les ardeurs, on pourrait y voir de près une victoire de Pascal Affi Nguessan. Qui connait désormais ses ennemis et ses soutiens. Et quand ont regarde bien tous ceux qui l’ont soutenu et qui sont des caciques du FPI, AFFI peut se frotter les mains. En acceptant d’aller au Congrès, il y va avec sa propre équipe et dieu seul sait comment attend-t-il mettre à profit le temps qui reste pour mieux affuter ses armes. Au total, le congrès qu’on prétend être la fin de règne du président Pascal Affi Nguessan peut-il être sa prise du pouvoir effectif ?

Philippe Kouhon/ Journaliste d’investigation
Africa TV
Site : www.africa-tv.info
Mail : pkouhon@gmail.com

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