Front populaire ivoirien: Le ballet des pions et les fossoyeurs sournois du peuple

claude-koudou

Le Masque ne tient plus. Il est même tombé, dirait-on. Entre ceux qui cultivent la posture d’opportunistes professionnels et qui ne résistent pas aux épreuves lorsque celles-ci se font dures et ceux qui sont guidés par la force de convictions, quels sont ceux qui l’emporteront dans cette Côte d’Ivoire où il faudra se serrer les coudes pour conquérir des espaces qui garantissent le minimum, pour une vie décente aux populations ? Si nous pouvons concevoir que des ambitions – parce que humaines – s’expriment, il est malsain que la promotion personnelle, qui s’affirme comme un intérêt particulier, aille à contre-courant de la bataille pour l’intérêt collectif.

L’histoire récente nous a montré que parce que des camarades étaient préoccupés par des enjeux accessoires, s’ils n’étaient pas parfois mesquins. Pour cela, nombreux sont ceux qui – alors qu’ils détenaient des leviers de décision – n’ont pas travaillé à contenir la rébellion alors que sa tentative de déstabiliser le pays et sa ruse ostensible à ne pas désarmer étaient manifestes. A cause des erreurs parfois collectives, parfois individuelles dont nous connaissons les conséquences, nous devons gagner en vigilance car des postures de félons doivent être mises hors d’état de nous nuire une autre fois
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Des agissements de camarades nous interpellent sérieusement. Sont-ils dans une dynamique de consommer définitivement la logique de la co-signature des accords de Marcoussis ? Celle qui est à la base de la posture de prédation du pays ? Si tel est le cas, il nous faut acter le décret qui indique la ligne de démarcation entre ceux qui luttent pour le bien-être du peuple et ceux qui veulent accompagner la logique de prédation du pays en échange de postes et/ou d’avantages matériels. Il nous semble que la période actuelle devrait servir à constituer la base de la culture de « l’Ivoirien nouveau ». Pourquoi des camarades peuvent faire semblant de lutter avec nous alors qu’ils sont prêts à plier quand ils n’ont plus leurs facilités d’antan ?

L’entrée dans le gouvernement de Ouattara, par la volonté de certains camarades a fait couler beaucoup d’encre. D’abord sous la présidence de Miaka, cette question a alimenté de vifs débats. La pression de la base a été entendue par le sommet et cette direction a coupé court aux rumeurs en prenant une position ferme de refus. La base en a été rassurée.
Après la sortie d’Affi N’guessan et d’autres camarades de prison, le débat a ressurgi. A leurs rencontres avec les ambassadeurs de France et des Etats-Unis, ils ont été persuadés qu’il faut entrer dans le gouvernement pour avoir une prise sur les élections et participer à la vie politique en étant acteurs de gouvernance. Nous dénoncions en interne l’envie de camarades qui voulaient entrer dans le gouvernement de Ouattara. Cette entrée s’est même faite imminente un temps quand les camarades concernés ont replié.

Que ce soit dans un cas comme dans l’autre, on oublie les convictions – si tant est qu’elle reste ferme chez des camarades – pour manifester de la vengeance. En fait, certains camarades pensent qu’ils devraient éternellement être à des commandes (ministres ; hauts fonctionnaires ; …). Quand cette envie n’a pas été satisfaite à la réélection de Laurent Gbagbo en 2010, des rancoeurs, des ressentiments, des aigreurs et des rancunes sont nées qui continuent de se ruminer froidement.

Affi N’guessan et ses camarades dans la logique d’aller avec Ouattara, ont intégré la CEI qu’ils disent consensuelle sans en avoir au moins discuter avec d’autres. Mais le plus préoccupant est qu’ils n’ont pas obtenu de consensus dans le Parti. Quand nous alertions les militants, on nous taxait de ceux qui voulaient accabler le président du FPI. Il ne s’agit pas d’accabler qui que ce soit. Forts d’expériences de nature diverse, il est de notre devoir d’alerter par le débat. Il est donc insensé de créer des artifices d’intimidation aux fins de masquer des impostures. Au vu de tout ce qui se déroule sous nos yeux, il nous semble que nous pouvons aujourd’hui partager que la logique de nos camarades, nageurs en eau trouble, apparaît au grand jour, puisque patente. Ceux qui nous invitaient aux débats en interne voulaient nous prendre en otage. Puisque ceux-là, au contraire de promouvoir le débat démocratique – qui a toujours été la force du FPI –, s’accrochent obstinément à leur inclination inébranlable à la frilosité, à la logique du complot et à la manipulation.

Intégrer un gouvernement Ouattara ? Cela signifie que nos camarades se détournent de la ligne que nous avons jusque-là défendue, à savoir qu’il faut tout remettre sur la table. Quand le président de la CEI défunte (Youssouf Bakayoko), seul proclame Ouattara vainqueur en violation de toutes les règles du code électoral et que la décision du juge défunt des élections – alors que son mandat n’était pas arrivé à échéance (Conseil constitutionnel, de présidence Paul Yao N’dré) -, est remise en question en violation de la Constitution ivoirienne, il convient de rester dans la cohérence même si les privations sont nombreuses. C’est en mettant en oeuvre un dialogue ouvert et franc qu’une réconciliation viable peut naître, au bénéfice de toutes les populations. Les comptes sont gelés, des camarades sont emprisonnés et exilés, et ce, depuis plus de trois ; des tortures continuent de se faire dans les geôles de Ouattara et des enlèvements se poursuivent ; … Rompre avec cette ligne pour adhérer à la logique de la survie matérielle, serait impardonnable au nom de la trahison de la mémoire de tous ceux qui sont tombés pour défendre le pouvoir du Parti d’Affi N’guessan.

Nous savons depuis que la logique du pouvoir d’Abidjan est de casser le FPI. Guillaume Soro était pour cela aller jusqu’à traiter le FPI d’un groupe terroriste. Mais la ficelle était grosse quand on sait que le FPI est le géniteur du multipartisme ; quand on sait que le FPI est le promoteur de l’expression plurielle ; quand on sait que le FPI est le parti qui était en train de construire une jeune démocratie ivoirienne. Certains de nos camarades soutiennent de continuer d’appuyer Affi N’guessan, sans réserve, pour ne pas fragiliser le Parti. Les plus réalistes – parce qu’ils sont prospectifs –, pensent que c’est plutôt crever l’abcès maintenant qui contribuera à régénérer le Parti.

Le président du FPI s’est-il désormais inscrit dans la tendance de pactiser avec son adversaire politique pour abattre son propre parti, en échange de subsides de survie matérielle ?

Répondre par l’affirmative serait franchir un pas. Il nous faut attendre pour voir le déroulé de toute la scène. Mais la logique est lancée et le mal semble être fait. Dans ce contexte, l’entêtement à sauver un amour-propre et le malaise suscité par le climat d’une confiance sérieusement mise à rude épreuve, pourront l’emporter sur la sagesse de se replier, aux fins de ne pas décevoir les millions d’Ivoiriens, qui ont cru au leader du FPI, pour la vigueur qu’il a déployée, à sa sortie de prison, pour redonner de l’espoir aux Ivoiriens. Attendons de voir si un marqueur pose sans nuance la question de savoir si cet élan était artificiel.
A notre sens, il importe dans une mesure de prévention, de se mobiliser dès à présent, dans la tête, pour se révolter contre ceux qui feraient l’erreur historique de participer à la tentative d’extinction du Parti de Laurent Gbagbo. Puisque ce Parti se révèle être un grand élément d’émancipation du peuple ivoirien, au regard de son passé. En tout état de cause, c’est une étape qui se joue pour ce grand parti ivoirien contraint à l’opposition, et chacun prendra ses responsabilités devant l’histoire de la Côte d’ivoire.

Dr Claude KOUDOU
Analyste politique

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