Billet d’humeur n°006 d’André Silver Konan :
C’est un virus aussi vieux que mon âge. Qui sévit depuis plus de trois décennies, uniquement qu’en Afrique, avec aussi bien des victimes africaines qu’européennes (généralement des religieux catholiques). Pendant plus de 30 ans, nos chers dirigeants africains n’ont pas songé à constituer une équipe de chercheurs, de savants et de scientifiques, pour « travailler » sur le virus Ebola, afin de trouver un remède.
Et voilà, il a fallu que deux Américains soient contaminés en Afrique, pour qu’on découvre que depuis un certain temps, des chercheurs américains expérimentent un sérum anti-Ebola. Et pendant ce temps, que croyez-vous que nous faisons en tant qu’Africains ? Eh bien, nous pleurnichons pour que les Américains nous donnent ce sérum, qui je le précise, n’est qu’expérimental, donc non validé et pas certain.
Bien sûr, les théoriciens du complot viendront encore nous rabâcher les oreilles sur un complot international contre les Africains (pour tuer les Africains, il suffit que les pays occidentaux et les institutions financières qu’ils contrôlent ne nous donnent plus de l’aide, Lol) mais le fait est là : un virus né sur les bords de la rivière Ebola dans l’ex-Zaïre, sévit en Afrique depuis plus de 30 ans, et aucun chercheur africain ne s’y est encore sérieusement penché. Ceci est une fuite en avant de nos autorités depuis plus de trente ans et nous devons le leur rappeler.
De l’autre côté, nous devons rappeler à nous-mêmes, en tant que simples citoyens, notre propre irresponsabilité. Nous devons relever cette détestable propension à la banalisation du risque (assimilable à l’inconscience) de certains Africains, y compris des Ivoiriens (il faut saluer, en passant, la réactivité du gouvernement, dont les mesures aux deux frontières de l’ouest, ont permis jusque-là d’épargner la Côte d’Ivoire). L’on a dit: ne mangez plus les rongeurs. Eh bien, que faisons-nous ? Nous prenons nos voitures à Abidjan, nous nous arrêtons aux carrefours des villages en province et nous achetons des rats à des paysans. Pire, nous prenons plaisir à aller manger de la viande de brousse dans les « maquis », alors que nous savons qu’en le faisant, nous encourageons les chasseurs et ceux qui touchent cette viande jusqu’à sa cuisson, à s’exposer au risque.
Mon message est clair. Autorités africaines, il est bien d’arrêter des mesures préventives, mais je pense qu’il serait mieux indiqué de combattre ce mal africain à la racine : dégager en toute urgence des fonds en vue de permettre à une équipe de scientifiques africains, de « travailler » sur le virus, pour trouver un remède efficace. L’intelligence n’a ni couleur, ni continent, c’est le fonds qui manque le moins en Afrique, sinon la volonté étatique. Je suis donc absolument convaincu qu’avec un peu de moyens, nos scientifiques africains arriveront à bout d’Ebola.
En attendant, respectons scrupuleusement les mesures de prévention, Ebola, c’est pas du jeu !
André Silver Konan
Journaliste-écrivain
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