«Si je tombe, vous tomberez avec moi ». Cette maxime est de l’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo. Et quand celui-ci tombe le 11 avril 2011, plusieurs de ses proches sont emprisonnés et d’autres sont contraints à l’exil. Seulement, ils sont nombreux ces personnes qui n’avaient vraiment pas compris le sens de cette maxime. Pour beaucoup qui se sont réjouis par la suite de la chute de Wade au Sénégal ou encore de la chute de Sarkozy aux élections de 2012 puis de ses récents ennuis judiciaires, la prophétie de Gbagbo venait de s’accomplir. Ses ennemis viennent de tomber. Refusant de faire leur mea-culpa, des caciques du FPI continuent de maintenir ce qui reste encore des militants du FPI et des sympathisants de Laurent Gbagbo dans l’ignorance. Brandissant la menace de « trahison » lorsque quelqu’un veut s’éloigner des premières lignes du parti.
Que veulent les faucons du FPI ?
Le FPI a été de tout temps un parti où les contradictions sont à la fois un principe et une règle. Et il ne faudra rien attendre des radicaux qui estiment qu’il ne peut y avoir de Chef au FPI en dehors de Laurent Gbagbo. C’est leur droit. D’ailleurs selon les tenant de cette thèse, c’est Gbagbo qui porterait mieux le projet et les idéaux du parti. Mais là où ces mêmes personnes pensent qu’il faut une dynamique du parti pour la reconquête du pouvoir, ils traitent en coulisse tous ceux qui empruntent une voie différente pour y arriver, de traites. Aujourd’hui avec l’absence de Gbagbo, c’est un FPI à double visage et en quête d’une nouvelle identité, qui nous est servi en Côte d’Ivoire.
Ainsi, comment recoller les morceaux du parti sans Laurent Gbagbo pourtant loin des objectifs immédiats à atteindre ? Tel est le dilemme auquel est confronté Pascal Affi Nguessan, qui devra désormais affronter les radicaux de son camp, une base déboussolée, le régime de Ouattara et la communauté internationale s’il veut porter à nouveau le parti au pouvoir. Lui qui a cru en un parti d’intellectuels et politiquement bien formés doit désormais mouiller le maillot pour imprimer sa marque au FPI.
Mais il le sait, cela ne va pas être facile. Face à des personnes encore accrochées à leur ancienneté au sein du parti et autres militants de première heure et qui refuseraient de voir celui qui essuyait hier leurs souliers devenir subitement Chef, Affi a du pain sur la planche.
Gbagbo ou rien
Au FPI, la seule personne qui a le droit de tout se permettre se nomme, Laurent Koudou Gbagbo. C’est lui seul qui peut amener les socialistes du FPI dans une alliance politique avec les libéraux du RDR. C’est encore lui seul qui peut faire de Ouattara candidat à la présidentielle là où la Constitution et le code électoral le lui interdisent. C’est l’unique Laurent Gbagbo qui peut organiser les élections dans un pays où des gens sont en armes. C’est enfin lui et lui seul qui peut boire avec ses ennemis d’hier du champagne à Kleber, danser au stade de Yopougon et faire d’eux des intouchables à Abidjan sans que personne ne grogne.
Laurent Gbagbo est tellement vénéré que certains de ses partisans ne jurent que par la prophétie de Malachie sur son retour imminent au pays, faisant fi de l’agenda de la CPI et de la communauté internationale.
Quelle stratégie pour la libération de Laurent Gbagbo ?
Cela fait 3 ans que ses partisans surtout ceux résidents en France arpentent les rues de Paris et de la Haye pour dénoncer la détention « arbitraire » de leur champion par la Cour pénale internationale. Cela fait 3 ans que personne ne semble les entendre. Et s’ils sont convaincus tous qu’un jour, Laurent Gbagbo reviendra, la question de « en attendant son retour, on fait quoi » est une question tabou au FPI. Il est même interdit de dire « on n’abandonne pas Gbagbo mais il faudra trouver d’autres voies pour sa libération ». Mais à quand va-t-on affronter les réalités du monde nouveau ?
Pendant plus de 10 ans de pouvoir, Laurent Gbagbo et ses camarades n’ont tissé aucune relation avec l’extérieur qu’on soit en Europe, dans les Amériques, en Asie ou tout près de chez nous en Afrique. On comprendra comment son allié naturel de l’international socialiste, le (PS) français avait eu tant de mépris pour Laurent Gbagbo, le traitant d’infréquentable ! Mieux, c’est le même François Hollande devenu président qui s’apprête à aller légitimer le pouvoir, donc l’élection de Ouattara à la tête de notre pays, pendant que le socialiste ivoirien, Laurent Gbagbo est à la CPI.
Les dirigeants du FPI se posent-ils la question d’un tel désamour de la France envers eux ?
En s’attaquant à la France et à ses dirigeants successifs, ou encore en remettant en cause les institutions de la CPI, on est en droit de se demander, mais avec qui le FPI de Laurent Gbagbo compte le défendre ?
Aussi, ceux qui comparent la situation de Gbagbo à celle de Mandela oublient que l’ANC , le parti de Mandela avait une branche armée et des soutiens à l’international. Tout le contraire du FPI.
A quel prix compte-t-on libérer Laurent Gbagbo ?
Après avoir boycotté toutes les élections locales, le FPI refuse encore de siéger au sein de la CEI, la toute dernière instance de décision et de pression démocratique que notre pays ait connue.
Alors que pour le pouvoir d’Abidjan, le FPI n’a toujours pas posé d’actes concrets allant dans le sens de la réconciliation, des cadres du FPI continuent de s’accrocher à l’ultra extrémisme, trouvant leur chef (Affi Nguessan) très mou et trop petit pour porter le manteau de Gbagbo.
Mais comme nous l’avions déjà écrit, Pascal Affi Nguessan, lui avance. Et il avance à un rythme et à pas mesurés qui surprendront plus d’un au moment venu. Le dernier réaménagement du Bureau National du parti devrait faire réfléchir. En politique, on ne gouverne qu’avec ses hommes. Point besoin de faire science po pour le savoir. Et tous ceux qui s’étonnent du comportement de AFFI devraient réviser leurs leçons d’histoire. Tous les grands HOMMES politiques ont eu leurs pré-carré et hommes de confiance. C’est cela aussi l’élégance de la politique. Doit-on brûler AFFI, préparer du AFFI et le manger avec la sauce « trahison » ? Malheureusement ce disque semble être rayé. Alors reste à faire un coup de palais. Le problème, c’est qui portera le brassard et pour vendre quel idéal et à quel militant du FPI tant que Laurent Gbagbo himself n’est pas sur le terrain ou n’a pas donné le mot d’ordre ? Ca sera certainement du déjà vu. Ce qui s’est passé sous la direction intérimaire de Miaka Ouretto se répète sous AFFI. Sacré FPI !
Enfin, si le FPI rate les présidentielles de 2015 et certainement les élections locales qui suivront, on se pose la question d’où le parti tirera les moyens pour 2020, un autre grand rendez-vous qui opposera d’autres nouveaux acteurs politiques et au cours duquel le FPI devra tout prouver s’il ne veut pas être effacé de la carte des partis politiques en Côte d’ivoire.
Philippe KOUHON (AFRICA TV)
Tél : 00336 47736264
Mail: pkouhon@gmail.com
[Facebook_Comments_Widget title= » » appId= »331162078124″ href= » » numPosts= »5″ width= »470″ color= »light » code= »html5″]
Les commentaires sont fermés.