« Le plus malheureux c’est Luis Suarez, un athlète à la fois très fort et très fragile »

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Ancienne psychologue de l’INSEP, Meriem Salmi estime que l’Uruguayen Luis Suarez est la première victime de son agression contre Giorgio Chiellini.

Comment analysez-vous le geste incroyable de Luis Suarez ?

Meriem Salmi : Je pense que cette réaction est le signe d’un trop plein d’anxiété. C’est un joueur qui revient de blessure, qui est revenu sur le terrain plus tôt que prévu. Il n’était pas forcément prêt physiquement et surtout psychologiquement, justement parce qu’il savait qu’il n’était pas au « top » physiquement. On mobilise beaucoup plus d’efforts et d’énergie dans ce contexte que lorsque l’on est à 100% de sa forme. Suarez, on peut dire qu’il est épuisé. Il arrive d’une longue saison à Liverpool (où il a terminé meilleur buteur de Premier League) puis il y a eu cette opération d’un ménisque. Même pour les grands champions, l’épuisement peut contribuer à expliquer ce comportement. Suarez craque et passe à l’acte alors que lorsqu’il utilise bien ses pulsions, c’est un joueur magnifique. L’investissement de soi, la passion peuvent être à double tranchant. Un athlète de haut niveau est à la fois très fort et très fragile. Il pousse au maximum ses ressources mais c’est aussi comme ça qu’il se blesse psychologiquement et physiquement.

Pensez-vous que le sport, qui est par nature une tentative de dominer l’autre, est propice à ce genre d’actes ?

M. S. : D’abord, rien ne nous échappe parce que c’est une Coupe du monde mais si on regarde ce qui se passe dans le métro… Je ne pense pas qu’il y a plus de violence dans le sport. C’est la médiatisation qui fait caisse de résonance. C’est comme les bêtises des sportifs de haut niveau. On en parle parce que ce sont eux, parce qu’ils ont, dit-on, un devoir d’exemplarité… Mais il y a proportionnellement très peu d’actes violents dans le sport parce qu’on ne peut pas être sportif de haut niveau et ne pas savoir se contrôler. Cela dit, le discours de l’encadrement est inacceptable quand il utilise des phrases meurtrières par rapport aux adversaires. Il ouvre la porte à la transgression. Quand on entend sur un banc, « on va les bouffer », c’est un appel clair.

Un appel que Suarez a dû entendre souvent: il n’en est pas à sa première morsure…

M. S. : Visiblement, puisqu’il a déjà commis ce genre d’actes, c’est que personne de son entourage n’a su l’aider, l’accompagner. Il faut qu’il travaille là-dessus parce qu’il va être en détresse. Il va être exposé et humilié. Il en a pour longtemps avant de s’en remettre. A l’époque de son coup de tête sur Materazzi en finale de la Coupe du monde 2006, Zinedine Zidane avait avoué qu’il avait honte de son acte. Suarez aujourd’hui, il faut l’aider pour que ce genre de choses ne se reproduise pas. C’est lui le plus malheureux.

Eurosport.fr par AFP

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