Par Jean-Claude Coulibaly in Le Patriote
“Je tiens, j’ai le moral. … Et que tant que Sangaré Abou Drahamane tiendra, je tiendrai. […] Si vous tenez, je tiendrai». Cette phrase prononcée le 18 juin 2012 à La Haye par Laurent Gbagbo à un proche venu lui rendre visite paraît anodine. Mais, elle traduit éloquemment la situation qui prévaut en ce moment au FPI. Ces propos lancés par l’ex-chef d’Etat, quelques semaines seulement après son transfèrement, est en réalité un mot d’ordre voilé. La ligne de conduite que se doivent de suivre les gardiens dutemple FPI, dans le strict secret, en mettant bien sûr en garde ceux qui la dévoilerait au grand jour. Au risque de se voir banni par les vrais gourous de la secte. Laurent Gbagbo, martelant cette phrase à son visiteur du jour, voulait lancer un message clair aux chefs de file des ultras de son camp, qui l’ont poussé jusqu’au bout de son aventure suicidaire. A savoir Abou Drahamane Sangaré, son vieil ami de tous les jours. Sangaré est un proche de l’ancien chef d’Etat qui l’a empêché d’écouter la voix de la raison pendant qu’ils étaient acculés dans le bunker. Laurent Gbagbo est conscient que sa présence à La Haye, il la doit en grande partie à celui qui a toujours été son compagnon de lutte. C’est la raison pour laquelle, dans son entendement, c’est à lui qu’il revient de le tirer de cette mauvaise passe. Le deuxième vice-président du FPI a une dette morale très lourde vis-à-vis de Laurent Gbagbo. Il sait pertinemment que si son vieil ami est au centre pénitentiaire de Scheveningen, c’est en grande partie sa faute. Comment donc faire pour le sortir de là ? C’est aujourd’hui la question qui hante les jours et les nuits de l’ancien ministre des Affaires étrangères. Abou Drahamane Sangaré est convaincu que la surenchère politique est la solution. Pour lui, obliger par tous les moyens les autorités à négocier selon les conditions du FPI reste la seule issue de sortie pour Laurent Gbagbo. Toutes les revendications brandies par le FPI doivent avoir pour point d’ancrage la libération de Laurent Gbagbo.
Toute autre vision doit être combattue.
Au sein de l’appareil FPI, cette ligne dure est soutenue par certains cadres comme Laurent Akoun et le Dr Kadjo Richard. Actuellement, c’est ce clan qui dirige en réalité le parti fondé par Laurent Gbagbo. C’est Abou Drahamane Sangaré et ses camarades qui impriment le rythme à tenir. Affi N’Guessan, l’actuel président du FPI, est pris en otage par ce clan. Il est constamment menacé par le camp des ultras lorsqu’on lui soupçonne une quelconque mollesse ou modération dans sa manière de conduire les affaires du parti. Une fronde anti-Affi Récemment, les propos tenus par le président du FPI, dans la presse, en ce qui concerne la succession de Laurent Gbagbo, a provoqué l’ire des tenants de cette position. Au point qu’aujourd’hui, Abou Drahamane Sangaré rechigne à adresser la parole à l’ancien Premier ministre. « Connaissez- vous un homme politique qui n’a pas d’ambitions ? Toute ambition est légitime. Ce ne serait pas honnête de ma part si je vous disais que je n’ai pas d’ambitions, même pour la présidentielle en Côte d’Ivoire. L’important est qu’une ambition ne soit pas démesurée et que l’on ne soit prêt à tout pour l’assouvir », a rétorqué Pascal Affi N’Guessan sur la question de ses ambitions présidentielles, le 23 avril dernier dans une interview accordée à un confrère. Actuellement même, un rapport encore secret de l’ONU fait mention d’une farouche fronde anti-Affi au sein du FPI. Cette fronde s’apprêterait à couper la tête au président du FPI qui commence apparemment à gêner les aspirations profondes des Cerbères dela maison FPI. Toutefois, cette présence étouffante du vieil ami de Laurent Gbagbo fait grincer des dents. Les modérés qui trouvent dangereux cette politique de la surenchère, commencent sérieusement à être agacés par les agissements du sieur Abou Drahamane Sangaré et de ses amis. Ces derniers estiment qu’avec tant de gages de bonne volonté donnés par le pouvoir, il est vraiment insensé de toujours rechercher la confrontation et la défiance inutile. Ces cadres qui sont pour un réel dialogue avec le pouvoir ne comprennent pas l’entêtement puéril que partagent certains de leurs camarades. De plus en plus de voix se lèvent en ce moment pour protester contre cette prise en otage en règle qu’ils trouvent de plus en plus inacceptable. Si pour l’instant la grogne est interne, elle risque dans les jours à venir d’éclater au grand jour. Car, nombreux sont les contestataires qui envisagent de créer un autre parti politique si la situation ne change pas. Les tenants de cette thèse sont d’autant outrés que pour eux il est inadmissible que l’avenir du Front populaire ivoirien soit subordonné à une hypothétique libération de Laurent Gbagbo. En outre, ils comprennent difficilement que ce soit Abou Drahamane Sangaré, qui a vu ses avoirs et comptes dégelés, qui soit à la pointe de cette ligne de conduite insensée. Pendant qu’eux sont encore frappés par cette mesure, à cause justement de cet irrédentisme qui n’encourage pas les autorités à se pencher sur leur sort. Pour l’heure, le calme semble régner au sein du FPI. Mais de gros nuages s’amoncellent sur le « Gbagboland ». Et l’apparente quiétude qui enveloppe actuellement le FPI risque d’être le calme qui précède la tempête. JC
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