Le premier recensement depuis 1998 a débuté lundi en Côte d’ivoire. L’opposition dénonce une manoeuvre politicienne, ce que réfute le gouvernement.
Lundi 17 mars, 30 000 agents supervisés par l’Institut national de la statistique (INS) ont débuté le 4e recensement général de la population et de l’habitat (RGPH 2014), sur fond de tension entre le pouvoir et l’opposition menée par le Front populaire ivoirien (FPI de Laurent Gbagbo).
Même s’il a concédé dans un communiqué, le 16 mars, que cette opération était « hautement stratégique pour l’avenir du pays », le FPI s’y oppose. Selon Jean-Gervais Tchéidé, secrétaire national du parti chargé de la population, des programmes de reconstruction et du développement solidaire, le RGPH 2014 « intervient dans un contexte sociopolitique d’insécurité généralisée, d’ostracisme, de traque et d’exil forcé d’une grande partie de la population », allègue-t-il.
« Pas d’opération politique »
Le gouvernement, de son côté, dit vouloir des statistiques fiables pour améliorer la programmation du programme de développement du président Ouattara, candidat à sa propre succession en 2015. « Soyons clairs, il ne s’agit pas d’une opération politique », relativise le ministre du Plan et du Développement, Albert Mabri Toikeusse. « Le dernier recensement en Côte d’Ivoire date de 1998, sous le président Henri Konan Bédié. Ce n’est pas que le parti de ce dernier qui a utilisé les chiffres qui ont été produits. Tous les hommes politiques doivent se les approprier, en vue de proposer des projets de société cohérents à leurs militants », dit-il.
Le budget de cette 4e phase du RGPH est de 12 milliards de F CFA, dont 20% financé par la France sur le mécanisme du Contrat de désendettement et développement (C2d). Il bénéficie aussi d’un appui du Brésil et du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA). L’opération prend fin le 16 avril.
Par Issiaka N’Guessan (Jeune-Arique)
Déclaration du Front Populaire Ivoirien sur le Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH 2013)
Déclaration 005/2014
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Dans une déclaration rendue publique le 27 décembre 2013, le Front Populaire Ivoirien appelait le Gouvernement à surseoir à l’opération RGPH 2013, non sans démontrer, force arguments à l’appui, que les conditions n’étaient pas réunies pour la réussite de cette opération.
Malheureusement, le FPI observe que le Gouvernement, faisant fi des fortes réserves objectives qu’il avait émises dans cette déclaration, s’entête à vouloir organiser le recensement général de la population, au risque de bâcler cette opération hautement stratégique pour l’avenir du pays.
Dans un Etat moderne, le Recensement Général de la Population et de l’Habitat répond à un souci régalien de disposer de données géo sociologiques exhaustives, fiables et détaillées, sur la population et l’habitat, en vue de concevoir des politiques et programmes de développement socio-économique. Il est un outil stratégique pour les planificateurs et décideurs de tout pays soucieux de son développement harmonieux et durable.
En Côte d’Ivoire, le 4èmeRecensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH-2013), qui doit fournir des informations fiables sur la structure et la dynamique de la population ivoirienne et mettre à jour la base de données géo-référencées permettant de localiser avec précision les populations, intervient dans un contexte sociopolitique d’insécurité généralisée, d’ostracisme, de traque et d’exil forcé d’une grande partie de la population. A l’Ouest et au Sud du pays, depuis l’avènement de la gouvernance de M. Ouattara, de nouveaux immigrants, massivement convoyés des pays limitrophes, ont systématiquement repeuplé les villages et campements des autochtones spoliés et contraints à l’exil.
– Considérant que la structure démographique de la Côte d’Ivoire est à l’heure actuelle des plus brouillée sociologiquement, du fait de la guerre et de l’insécurité, notamment dans l’ouest du pays ;
– Considérant que les citoyens Ivoiriens, ostracisés et spoliés de leurs terres chez eux, verront dans cette opération de recensement un subterfuge pour légitimer la perte définitive de leurs biens ;
– Vu que les DOZOS et les FRCI, bourreaux des Ivoiriens, continuent d’entretenir un climat d’insécurité à travers tout le pays ;
– Vu que le recrutement des 30 000 agents recenseurs s’est fait sur des bases politico ethniques, déjà exacerbées pendant la longue crise sociopolitique ;
– Attendu que le travail de ces agents aux ordres compromettra gravement la fiabilité et la crédibilité des données démographiques et socioéconomiques à recueillir ;
Le Front Populaire Ivoirien
1) Dénonce l’entêtement du Gouvernement à vouloir opérer un passage en force, pour organiser le Recensement général de la population ;
2) Dénonce le dessein inavoué du pouvoir d’exclure une grande partie des ivoiriens de ce recensement et de consacrer le fait accompli au profit des nouveaux immigrants qui sont massivement entrés en Côte d’Ivoire à la faveur de la guerre postélectorale, pour des visées électoralistes ;
3) Rappelle au pouvoir Ouattara que le recensement de la population est une opération trop importante pour être sacrifiée sur l’autel d’ambitions politiques mal dissimulées ;
4) Invite à nouveau instamment le pouvoir à différer cette opération et à œuvrer avec responsabilité à la normalisation de la vie sociale et politique en Côte d’Ivoire, ce qui commande les actions préalables suivantes :
– Régler la question de l’insécurité pour rassurer les populations, aujourd’hui traumatisées ;
– Mettre un terme définitif à l’utilisation des Dozos par l’Etat et les ramener dans leur aire culturelle traditionnelle ;
– Mettre en œuvre l’encasernement effectif des FRCI ;
– Organiser le retour sécurisé des exilés et des refugiés.
5) Le FPI en appelle à la vigilance de la communauté nationale et interpelle la communauté internationale, les partenaires au développement, sur les risques d’échec de cette opération ;
6) Le FPI déclare solennellement qu’il demeure saisi de la question. Il suivra avec une grande vigilance les développements de ce recensement à géométrie variable afin de prendre les décisions idoines dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire et de sa population au moment opportun.
Fait à Abidjan, le 16 mars 2014
TCHÉIDÉ Jean-Gervais
Secrétaire National chargé de la Population, des Programmes de Reconstuction et du Developpement Solidaire
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