France – La droite dans le piège de l’argent fou

Photo AFP Kenzo Tribouillard
Photo AFP Kenzo Tribouillard

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La droite sent le soufre. L’argent la rattrape comme au temps des grands scandales politico-financiers qui avaient marqué les années 1990.

Les révélations du Monde, vendredi 7 mars, selon lesquelles Nicolas Sarkozy a été placé sur écoute par deux juges dans le cadre de l’enquête sur un éventuel financement de sa campagne de 2007 par la Libye, sont un premier coup de tonnerre.

Le fait, toujours selon Le Monde, que l’ancien président de la République se retrouve en première ligne dans un dossier de trafic d’influence lié à l’affaire Bettencourt en est un second.

L’épisode clôt une quinzaine horrible pour la droite, déjà marquée par l’affaire Buisson et l’affaire Copé. A chaque fois, une lumière crue est portée sur le fonctionnement de l’Elysée et du parti du temps de Nicolas Sarkozy.

Affairisme et boules puantes : Patrick Buisson qui s’était emparé du cerveau du président se gavait et trahissait. En même temps qu’il commandait des sondages à sa propre société au mépris de toutes les règles de la dépense publique, le conseiller enregistrait à son insu le président de la République.

Et pendant ce temps à l’UMP, soupçons de surfacturation liés à la campagne de 2012 : la société Bygmalion, proche de Jean-François Copé, organisait sans appel d’offres les meetings de Nicolas Sarkozy. Les comptes de campagne furent invalidés et les sympathisants durent mettre la main à la poche pour renflouer les finances du parti.

François Mitterrand avait vu juste. « Il y a des gens très bien à droite mais ils seront emportés par les grandes forces de l’argent. Battez-vous dos au mur », avait lancé l’ancien président de la République lors du conseil des ministres du 23 mars 1993, le dernier qu’il avait tenu en présence de ministres de gauche.

Aujourd’hui, François Hollande se bat dos au mur sans être assuré de remporter le morceau. La « présidence normale » qui était son slogan de campagne était une réponse à ces « forces de l’argent » dans lesquelles régulièrement la droite se noie.

Mais à peine son quinquennat commencé, l’affaire Cahuzac éclatait. Elle annihilait les efforts faits pour réhabiliter le crédit de la gauche, lui aussi fortement marqué par les affaires politico-financières de la fin du siècle dernier.

Le président de la République resta cependant inflexible. Il imposa à son propre camp une nouvelle loi de moralisation, diminua son salaire et celui de ses ministres, imposa aux patrons d’entreprises publiques de réduire leur rémunération. Et aujourd’hui, il tente de faire de même dans les groupes où l’Etat possède une partie du capital.

François Hollande a compris qu’en ces temps de crise et de disette budgétaire, l’argent fou marquait au fer rouge une droite incapable de tirer le pays de la crise. Il veut réhabiliter la gauche morale et s’y emploie avec d’autant plus de vigueur que la mauvaise conjoncture l’oblige à conclure un pacte avec le patronat pour tenter de sauver son quinquennat.

Mais dans cette opération « réhabilitation », il doit compter avec la concurrence de Marine Le Pen qui, comme son père, englobe dans le même slogan du « tous pourris » l’UMP et le PS. En pleine campagne des élections municipales, le Front national exploite à fond le discrédit dont souffrent les partis, la défiance qui, sondage après sondage, monte à l’égard des politiques. Il met dans le même sac les « barbouzeries » de Patrick Buisson, les affaires qui menacent Nicolas Sarkozy et l’impuissance de François Hollande à renouer avec la prospérité.

C’est pourquoi, pour remonter la pente, la gauche ne pourra pas se contenter d’être morale face à une droite qui a perdu la boussole. Elle devra aussi obtenir des résultats.

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