Les militaires ivoiriens rentrés d’exil ces dernières semaines ont été accueillis vendredi 24 janvier lors d’une cérémonie sur la place d’armes du ministère de la Défense. Près de 1 300 ont répondu à l’appel au retour lancé par le président Ouattara, qui leur a garanti la sécurité. Un signe de plus d’une détente qui semble s’installer.
Ils avaient jusqu’au 30 novembre pour rentrer. Passé ce délai, ils risquaient d’être radiés des forces de sécurité. Mais très peu avaient regagné leur pays avant la fin de l’ultimatum. Pour enclencher un mouvement de retour, le président Alassane Ouattara a dû abandonner les menaces de radiation.
Les craintes des exilés
Pourquoi une réponse si tardive à l’appel du chef de l’Etat ? Le sergent Méliane Latt, rentré du Togo il y a deux mois, avance une explication : « On a peur pour notre sécurité. Moi, par exemple, je faisais partie de la garde rapprochée de l’ex-président, Monsieur Laurent Gbagbo, j’avais peur pour ma sécurité. »
L’un des arguments qui ont convaincu les éléments des ex-forces de défense et de sécurité exilées ou dans la clandestinité de se manifester, c’est l’assurance que personne ne sera inquiété. « Ce sont les instructions données par le président de la République », a confirmé le ministre délégué à la Défense, Paul Koffi Koffi.
La MIDH inquiète d’une mesure qui favorise l’impunité
« En ce moment de la réconciliation, où les gens demandent à tous les exilés de rentrer, il serait mieux de les mettre en liberté, pour qu’ils puissent regagner aussi les casernes », estime l’un des militaires, rentré du Ghana. « Ce temps, que ces frères ont passé là-bas, est déjà suffisant pour qu’on puisse les libérer à ce moment bien précis », plaide également un autre militaire, rentré, lui, du Liberia.
Le mouvement ivoirien des droits de l’homme dénonce les consignes d’Alassane Ouattara à la justice et de ne pas inquiéter les exilés de retour. Dans un communiqué transmis à la presse, le MIDH craint que cette mesure ne heurte les victimes de la crise post-électorale et ne fasse le lit de l’impunité.
Une détente qui semble s’inscrire dans la durée
Cette cérémonie est un signe supplémentaire qui s’ajoutent à ceux qui se sont succédés ces dernières semaines en Côte d’Ivoire, donnant l’impression d’une décrispation politique entre les partisans de l’ancien président déchu Laurent Gbagbo et le pouvoir actuel. Appel au retour des exilés, rencontres directes avec l’opposition… La détente semble s’installer.
Préoccupés par leur sécurité, les exilés civils s’inquiétaient aussi des éventuelles poursuites judiciaires qui les viseraient en rentrant au pays – mais les garanties données par Alassane Ouattara semblent respectées. Marcel Gossio, par exemple. Ancien directeur du port d’Abidjan, il est rentré en Côte d’Ivoire mi-janvier. Visé par un mandat d’arrêt émis par la justice ivoirienne, il est cependant libre de ses mouvements.
Même constat pour les militaires du temps de Laurent Gbagbo – 1 288 selon les chiffres officiels. Ils toucheront bientôt leur solde, et selon les instructions du président, ne seront pas inquiétés par la justice « quels que soient les actes qu’ils aient posé ».
Les questions en suspens
Côté politique, une nouvelle rencontre devrait bientôt se tenir entre le FPI – le parti de Laurent Gbagbo – et le gouvernement. Alassane Ouattara cherche-t-il à convaincre le FPI d’aller à l’élection présidentielle de 2015 ? Il paraît difficile de rendre crédible un scrutin en l’absence d’opposition. Quant au FPI, pourra-t-il faire le deuil de son fondateur Laurent Gbagbo, emprisonné à La Haye ?
Plusieurs questions font encore polémique comme la libération des prisonniers – évalués à plus de 700 -, le retour des réfugiés, notamment ceux au Liberia, ou encore la réforme de la commission électorale. Mais le dialogue est en tout cas bien engagé.
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