Côte d’Ivoire la mangecratie, le candidat unique et les « députés » folklores

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La Chronique Politique de Marc Micael

Des députés de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, au nombre de 25, dit-on, ont enfin exprimé de vive voix, ce que certains n’avaient pas, jusque-là, le courage d’avouer : faire d’Alassane Ouattara le candidat unique du RHDP (coalition politique regroupant le PDCI, le RDR, l’UDPCI et le MFA). Et ce, dès le premier tour de l’élection présidentielle prévue pour 2015. C’est sans surprise que ce groupe de députés, surnommé le « G25 », a reçu le soutien du RDR, parti d’Alassane Ouattara.

A priori, cela ne nous regarde pas. Comme on pourrait le dire à Abidjan. Si Ouattara a réussi à inféoder certains partis politiques au sien, en leur jetant quelques parts de son gâteau ensanglanté, c’est tout à son honneur. On le sait depuis toujours : dans ce conglomérat de partis politiques, seule prédomine la « mangecratie », cette pratique qui consiste à satisfaire uniquement les besoin du «ventre» et non la démocratie. D’ailleurs, que pouvions-nous attendre d’autre chose de la part de députés d’une assemblée – avant tout – monocorde et monocolore, sinon à l’émergence de la pensée unique ?

Certes Gaston Ouassénan Koné, président du groupe parlementaire PDCI a tenté de doucher les ardeurs du «G25» : «ce n’est pas le groupe parlementaire. Les députés sont libres au sein du groupe parlementaire de se retrouver par affinité pour dire certaines choses. Tant que je ne suis pas saisi officiellement, cela n’engage pas le groupe parlementaire». Mais le PDCI de Konan Bédié, flagorneur indéfectible d’Alassane Ouattara, a-t-il encore des ambitions politiques ? Le plus vieux parti politique de Côte d’Ivoire n’est aujourd’hui que l’ombre de lui-même. Alors qu’il devrait tout naturellement s’imposer dans le paysage politique ivoirien, comme parti leader, en raison d’un FPI apparemment affaibli, le parti plus que cinquantenaire, est réduit à jouer les seconds rôles. Celui de suiveur d’un parti, sorti hier de ses entrailles. Le voilà réduit à se contenter de quelques miettes. Quelle honte !

La stratégie du PDCI, parti-poltron, est donc de mettre la pression pour faire monter les enchères. C’est aussi simple que cela. Monsieur Ouassénan sait que qu’Alassane Ouattara et le RDR viendront solliciter son parti pour réaliser le projet – si ce n’est déjà fait – de candidature unique. Occasion propice pour réclamer la fameuse « vice-présidence », chère au PDCI.

Tout cela serait sans intérêt, pour nous autres, démocrates résolument engagés pour la sauvegarde de la Côte d’Ivoire si, quelques jours après la « dédicace » officielle de la candidature unique d’Alassane Ouattara, par le «G25», il n’y avait pas eu Doropo.

Doropo, le village du tristement célèbre ex-chef de guerre rebelle Wattao, et située au nord-est de la Côte d’Ivoire. C’est à l’entrée de ce village qu’Affi N’guessan, président du FPI a été pris à partie par une bande de jeunes surexcités. Il a dû rebrousser chemin avec sa délégation. Le meeting prévu à Doropo, n’a donc pas eu lieu. Cet acte grave constitue une entrave inacceptable à la démocratie. Hier, à Oumé, la démocratie a faillit être étouffée. Aujourd’hui, la démocratie est gravement contrariée à Doropo.

Ces deux obstacles à la démocratie et les libertés en Côte d’Ivoire sont à eux seuls symptomatiques d’une Côte d’Ivoire où, la pensée unique, au profit d’un candidat unique, est en cours d’exécution. Qu’Alassane Ouattara soit le candidat unique du RHDP n’est pas le problème. Mais les risques que cela se traduise, au-delà de l’alliance RHDP, sur le terrain, par une répression des activités de l’opposition, sont manifestes. Ils viseraient notamment à tout mettre en œuvre, de sorte à permettre à Alassane Ouattara d’aller en roue libre aux élections de 2015, au détriment de l’opposition. Amani N’guessan, le chargé des questions sécuritaires au FPI, outré par l’attitude de ceux qui empêchèrent Affi N’guessan d’entrer à Doropo, ne pense pas si bien dire : « Ça donne l’impression qu’il n’y a pas de sécurité dans le pays (…) Avec ce genre de situation dans laquelle un sous-préfet est humilié et bafoué, on ne peut pas parler d’élections ». Oui, on ne peut pas tenir des élections crédibles dans ce pays, si des bandes de voyous, acquises à la cause d’un seul candidat, Alassane Ouattara, font la pluie et le beau temps.

Le spectre des exactions massives commises dans la zone nord de la Côte d’Ivoire, lors des élections présidentielles de 2010, est encore trop présent. A cette époque, les observateurs étrangers, avaient à l’unanimité constaté et reconnu des irrégularités, notamment des empêchements de voter dans cette zone par des combattants armés, acquis à Alassane Ouattara. Tous les observateurs, y comprit ceux de l’Union européenne, même si ces derniers optèrent par la suite, pour la politique de l’autruche.
Après trois ans de règne, Alassane Ouattara n’a toujours pas désarmé ses ex-combattants. Plusieurs d’entre eux écument aujourd’hui villes et villages, convertis en coupeurs de route ou bandits de grands chemins. D’autres sont aujourd’hui des délinquants patentés, à l’image de cette bande de jeunes à Doropo, nourris de la culture de la violence et de l’irrespect pour les autorités établies. L’insécurité règne dans le pays, le désordre au sein de l’armée, dont la réforme tarde à être effectivement mis en œuvre. Mais un homme, Alassane Ouattara, y trouve certainement son intérêt, puisqu’il n’y a de sa part, aucune volonté réelle d’y mettre fin. Dans de telles circonstances, la candidature unique d’Alassane Ouattara, ne se limite pas qu’au seul cadre du RHDP. Il vise aussi un sombre dessein : rééditer le hold-up électoral de 2010, au grand dam de l’opposition politique. C’est aussi, cela le projet de candidature unique d’Alassane Ouattara. Même si Said Penda, un obscur réalisateur camerounais, vient de mettre sur le marché son film sur un prétendu despotisme de Laurent Gbagbo, nous, nous avons l’occasion de vivre en direct, sans montages et effets spéciaux aucuns, les basses manœuvres du dictateur-candidat-unique: Alassane Ouattara.

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