André Silver Konan
Hollande souhaite que Djotodia dégage: «Le paternalisme français est détestable, mais la défection africaine est criminelle »
François Hollande estime que Michel Djotodia, le président autoproclamé de Centrafrique, investi chef d’Etat en présence de plusieurs dirigeants africains (renversant) après son coup d’Etat contre Bozizé (qui est lui-même arrivé au pouvoir, à l’issue d’un coup d’Etat ; l’histoire étant un recommencement), « n’est plus apte à conduire la transition à son terme ».
Je soutiens cette position en même temps que je la dénonce. Je la dénonce parce qu’on voit bien que sous Hollande, comme hier sous Sarkozy, Chirac et Mitterrand, en dépit des professions de foi, c’est le retour en force de la France paternaliste, qui ne se gêne pas pour défaire certains destins politiques en Afrique. Certes, très souvent, du moins au cours de ces dernières années, cette action paternaliste menée sous le couvert bienheureux de l’Onu, a pu, dans le fond, mettre un terme à des drames humanitaires supplémentaires en Côte d’Ivoire, au Mali et certainement aujourd’hui en Centrafrique. Cependant, dans la forme, la manière et le ton français, sont parfois arrogants, ce qui rend l’action détestable.
Je soutiens la position d’Hollande parce que Djotodia ne mérite pas mon soutien pas plus que son prédécesseur, pour une raison simple qui relève de mes principes: je ne soutiens pas les présidents putschistes. Je soutiens cette position parce que Djotodia et sa rébellion obscurantiste de la Séléka, font partie des problèmes en Centrafrique. Je soutiens enfin cette position parce qu’ainsi, Hollande-le-père Noël, se paye bien la tête de nos très chers dirigeants africains.
J’avais dénoncé récemment lors d’une rencontre internationale de journalistes d’investigation à Ouagadougou, en rapport avec le panafricanisme, le silence des Africains sur le drame centrafricain et surtout la panne d’actions du continent, à commencer par les chefs d’Etat de l’Afrique centrale et australe, ainsi que l’Union africaine.
J’avais prévenu que François Hollande qui avait pris le leadership de la résolution de cette crise irait certes à la rescousse (militaire) d’une bonne partie du peuple centrafricain, mais qu’il irait dans ce pays, avec son propre agenda et ses propres intérêts, ce qui du reste est normal du point de vue de la géostratégie. J’avais aussi mis en garde contre toute attitude hypocrite et traitresse des éternels pleurnichards, qui, à défaut d’inciter les Africains à l’autoresponsabilité, dénoncent toujours après coup, les actions européennes ou américaines, juste parce qu’ils ont trouvé là un fond de commerce intellectuel. Surtout et dès lors que nous avions été incapables, nous Africains, de régler le problème à notre façon et avec nos propres moyens.
Je le dis depuis toujours et je le regrette: le paternalisme français est détestable, mais la défection africaine dans la résolution des crises africaines est plus détestable, elle est criminelle. Il est vraiment temps qu’en Afrique, nos dirigeants nous aident à ne plus subir notre propre histoire, mais à l’écrire nous-mêmes, avec notre propre encre d’actions et de moyens. Autoresponsabilté !
André Silver Konan
Journaliste-écrivain
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