Par Fatima Berthe Gooré | Le Journal de Connection | 21 novembre 2013
La guéguerre pour la succession à la chefferie des Akoué n’en finit point depuis de très longues années. Le dernier acte de ce triste épisode est la destruction d’une statue de l’actuel chef de l’État ivoirien Alassane Ouattara, hier à Yamoussoukro, capitale politique de la Côte-d’Ivoire. Selon des témoins, par des partisans de Augustin Dahouet-Boigny, l’autre prétendant au trône des Akoué.
Coutumes, traditions et politique forment le cocktail de la polémique qui frise la discrimination pour des origines paternelles. Là, où le système matriarcat «utérin» chez les Baoulé et les Akan en Côte-d’Ivoire, au Ghana ou au Togo, devrait permettre de trancher la succession, on assiste à des croc-en-jambes «frisant le tribalisme». En effet, Augustin Dahouet-Boigny, communicant bien connu du PDCI-RDA, petit-fils du frère cadet de Félix Houphouët-Boigny, peut-il prétendre à la chefferie des Akoué, vu que sa lignée officielle et acceptée de tous [nous n’entrerons pas dans la polémique], découle d’un «mâle», en l’occurrence du frère cadet d’Houphouët, Augustin Boigny et non d’une «femme» comme le veut la coutume séculaire des Akan ? Les sœurs [Faitaih et Adjoua] de Félix Houphouët-Boigny n’ayant pas eu de descendances directes, la chefferie selon nos informations revient de droit aux descendantes «utérines» des tantes d’Houphouët, donc des sœurs de sa mère. Selon des anciens de Yamoussoukro très âgés encore en vie, proches collaborateurs de Félix Houphouët-Boigny, que nous avons pu récemment écouter, le 1er de la génération actuelle sur la liste des héritiers n’est personne d’autre qu’Augustin Thiam. Fils de l’ancien ministre ivoirien de l’Information, le journaliste Amadou Thiam et fils de la défunte Marietou Sow, petite-fille de Kimou Yamoussou, sœur de Kimou M’Bra [mère de Nanan Kouassi N’Goh III]. D’ailleurs, Houphouët lui-même, avant sa mort, n’avait-il pas affirmer sur les écrans de la télévision nationale RTI que ses héritiers étaient les enfants de Thiam, petits-enfants de sa cousine utérine Aka Amoin Thérèse ?
Fatima Berthe Gooré
La guerre du « et » et du « ou » ressurgit chez les Boigny
Par Sévérine Blé Source: Aujourd’hui
Ce n’est pas pur hasard que la grenade explose maintenant. Certes, elle a été officiellement dégoupillée à l’occasion des funérailles de Yabley Kouadja II, il y a des mois. Ce jour-là, Augustin Thiam, l’actuel gouverneur de Yamoussoukro s’est présenté à la cérémonie comme le chef de canton des Akouè. Mais cette déclaration a soulevé plus de palabres qu’elle n’a calmé la douleur du canton. Depuis, le tollé s’est amplifié pour perturber définitivement la quiétude de la population de cette région qui abrite la capitale économique de la Côte d’Ivoire. Et depuis plusieurs semaines, la ville se délecte quotidiennement des épisodes truculents de ce feuilleton interminable. Certes, le gouverneur de Yamoussoukro qui revendique la chefferie des akouè envers et contre les partisans de Dahouet-Boigny avait tenté de calmer le jeu dans la presse, dans le but de protéger la cohésion des Boigny, traités avec une quasi dévotion nationale dans le pays. Mais les racines du mal sont profondes. Elles procèdent certes d’un héritage apparemment mal ficelé mais aussi de vieux contentieux mal soldés, des colères étouffées en vain, des frustrations mal acceptées à l’époque de la toute-puissance d’Houphouët-Boigny.
Or, cette guerre ruine avant tout le capital dévotionnel auquel se soumettent les Ivoiriens, généralement respectueux de la mémoire du premier président du pays. Père de l’indépendance, « Le Vieux » comme on l’appelait, avait réussi à tenir sa famille loin de l’arène politique pour ne certainement pas perdre leur unité. Du coup, la querelle des chefs qui oppose deux de ses membres mais au-delà plusieurs d’entre eux sonne d’abord comme l’échec de cette tradition familiale qui a vécu. Nommé gouverneur de Yamoussoukro en remplacement du vieux Banny, Augustin Thiam a certainement compris que l’heure était venue de changer de leadership dans la famille. Trop vite peutêtre. Car ses détracteurs ne le veulent même plus à la tête du district. Commissaire politique du RDR de Yamoussoukro, il est le premier Boigny à faire la politique de manière officielle en dehors du PDCI. C’est sans doute pour le récompenser de ce choix qu’Alassane l’a nommé gouverneur du district où il remplace Jean Konan Banny, le grand frère de Charles Konan Banny le président de la CDVR. De tels pouvoirs l’ont-ils finalement grisé ? En tout cas, Augustin Thiam fait face à une fronde apparemment bien organisée. Ses détracteurs ne lui reprochent pas seulement l’autoproclamation faite pendant les funérailles mais aussi son leadership comme fils d’Houphouët-Boigny. Sur les 33 chefs traditionnels que compte la région, 29 sont officiellement avec son adversaire et certains parmi les quatre restants ont eu des arguments pour justifier leur absence le jour de la réunion du clan des Dahouet. Même le chef de l’Etat est aussi pris pour cible. La statue érigée en son nom a été déboulonnée dans la ville par des manifestants mécontents et les pro-Dahouet Boigny lui également reprochent d’avoir fait boucler la ville par un nombre excessif d’agents des forces de l’ordre. C’est dans cette atmosphère de terreur que le chef de Séman a failli être enlevé. Par qui ? Mystère.
Le tableau rappelle en maints points à la crise postélectorale au cours de laquelle Alassane Ouattara avait été proclamé élu dans son quartier général de l’hôtel du Golfe par le président de la CEI Youssouf Bakayoko sous bonne escorte de la force Licorne. A l’inverse, Augustin Dahouet a le soutien de Guillaume Houphouët-Boigny, l’un des fils du premier président de Côte d’Ivoire et Marcel Boigny, fils de Kouassi N’goh. Ils affirment avoir respecté toutes les procédures nécessaires à la désignation d’un chef de canton. Et qu’au terme de celle-ci, leur chef n’est autre que Augustin Dahouet dont le nom de règne est Nanan Kouassi N’goh III. C’est d’ailleurs ce qu’ils ont tenu à marteler devant le ministre Jeannot Ahoussou Kouadio envoyé par Alassane Ouattara dans la ville pour essayer d’éteindre le feu. Et visiblement celuici fut à la peine puisqu’il a fini par réclamer l’aide de Jean Konan Banny. Or, cette demande fait gerber les partisans du gouverneur qui font stoïquement face aux critiques sur les origines sénégalaises de celui. Augustin Thiam est en effet fils de l’ancien ministre de l’information Amadou Thiam qui a, depuis, rejoint son pays. Les pro-Thiam se méfient de l’ancien gouverneur qu’ils n’hésitent d’ailleurs pas à charger au point de l’accuser d’avoir lui aussi une ascendance étrangère, notamment béninoise. Bref, si la guerre du « et » et du « oui » a officiellement disparu avec l’émergence de la 2è république, elle a ressurgi depuis quelques semaines à quelques 400 kms àYamoussoukro, chez Houphouët-Boigny qui avait voulu donner la double nationalité aux étrangers vivant en Côte d’Ivoire. En pure perte, tout de même.
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