Côte d’Ivoire – Koulibaly insiste depuis Daloa: « La loi de 1998 sur le foncier est mauvaise »

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Dans une interview qu’il a accordée à Onuci-Fm et diffusée, hier, l’ex-président de l’Assemblée nationale, Mamadou Koulibaly, dénonce encore et toujours la loi sur le foncier rural qu’il juge mauvaise. Et rappelle ses recettes pour juguler le phénomène de conflit foncier.

Vous êtes à Daloa, dans la cadred’une conférence ayant pour thème : le rôle de la société civile dans la promotion du Droit. Sur quoi avezvous mis l’accent ?

Je me suis appliqué à expliquer d’abord ce que c’est que la société civile, différente de l’Etat, différente de la société politique, différente des sociétés commerciales et industrielles. Ensuite, j’ai tenté de montrer ce que c’est que le Droit, différent de la loi. J’ai expliqué que le Droit était un ensemble de règles de bonne conduite qui étaient liées à l’homme, qui, du fait qu’il était homme, a des droits inaliénables. Je leur ai expliqué que la loi, ce n’est pas le Droit: c’est la règle de la majorité et qu’une majorité peut donc produire des lois très injustes, que la majorité politique conduit parfois à brimer le droit des minorités. Le principe de la démocratie, ce n’est pas seulement la promotion de la loi de la majorité, mais c’est aussi, la protection des droits des minorités. Enfin, j’ai dit que si l’on voulait vraiment faire la promotion du Droit, il faudrait déjà bien comprendre cette distinction entre le Droit et la loi. si on veut vulgariser le Droit, il faudrait que nous prenions des dispositions pour donner à chacun des individus les instruments du Droit. La paix ne peut pas se construire,s’il n’y a pas d’Etat de droit, si les citoyens n’ont pas de la propriété….

Vous sortez de cette salle avec quel sentiment ?

avec le sentiment que ces jeunes étudi ants sont confiants que l’avenir de ce pays et de la paix que nous cherchons dans ce pays ne passera pas par la force, par la violence. Il passera par la promotion de la qualité des hommes, de la formation des hommes. Les professeurs d’université qui étaient là, à titre individuel, ont pris le soin d’expliquer quelles étaient les conditions difficiles dans lesquelles leurs étudiants travaillaient, ont expliqué qu’ils avaient besoin de documentation, d’encadrement, bien sûr, d’infrastructures et bien d’autres choses qui sont normales. Il fut une époque où les jeunes étudiants auraient plutôt plaidé pour qu’un tel soit président ou un tel soit ministre, ils ne m’ont pas invité pour entendre ce type de discours. Ce qu’ils veulent, c’est leur formation, l’amélioration de leurs conditions de travail. Et pour eux, l’ensemble de tout cela ne peut se réaliser que si l’Etat de droit était restauré. Pr Koulibaly Mamadou, vous êtes dans l’ouest du pays et vous savez très bien que cette partie de la Côte d’Ivoire a souffert le martyre pendant cette crise qu’a connue la Côte d’Ivoire.

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Alors, quelle solution par rapport à ces problèmes, concernant par exemple, le foncier rural ?

Les populations de l’ouest ont souffert le martyre, vous l’avez dit, et elles continuent d’ailleurs de souffrir le martyre. Mais le fond se trouve dans la question de la propriété foncière. Nous n’avons pas encore résolu la question. Et moi, je fais partie de ceux qui estiment que la loi de 1998 n’est pas bonne, qu’il faut la modifier de fond en comble, il faut donner les droits de la propriété à nos parents qui sont dans les villages et qui sontcapables de dire comment, depuis leurs ancêtres, ils ont la propriété de la terre, que le cadastrage se fasse, avec l’appui des géomètres, qu’on donne à ces par ents des titres fonciers et puis, qu’à l’appui de tout ça, on donne les moyens à l’administration territoriale de leur expliquer comment les choses se passent. Mais si on s’asseoit et qu’on reste tous convaincus que la loi est bonne mais qu’elle n’a pas été appliquée, on va aller de report de 10 ans à report de 10 ans, la loi ne sera pas appliquée, les populations rurales seront pauvres, les conflits fonciers vont con tinuer de dénaturer sur des échéances politiques.

Comment inverser la tendance ?

La prise de conscience. Ils ont posé la question, je leur ai dit qu’il faut commencer à constituer de véritables sociétés civiles, qui ne soient pas dépendantes de la classe politique. Nous sommes en période de paix.

À partir de Daloa, vous avez un message de paix à tous les Ivoiriens qui vous écoutent ?

Oui, j’aimerais bien appeler les politiciens ivoiriens, encore une fois. Le peuple de Côte d’Ivoire n’est pas en conflit civil. a Daloa, moi, je n’ai pas trouvé des groupes ethniques en train de se taper dessus avec des machettes. Par contre, dans l’ensemble de la Côte d’Ivoire, l’ambiance politique malsaine entre les partis politiques, les leaders politiques traditionnels, mérite maintenant d’être atténuée. Pour cela, profi tons de cette journée de la paix, non pas pour faire des vœux pieux, mais pour affronter nos réalités politiques, de reconnaitre que ce sont les politiques qui ont des conflits, que la crise politique que nous avons eue n’était pas une guerre civile, mais une guerre partisane, ce sont les militants des partis politiques qui se sont tapés dessus et qui continuent d’empoissonner l’atmosphère. Et (je leur dirais de) arrêter de prendre en otage ce pays pour que tout le monde puisse s’épanouir. Il y a des gens qui veulent avoir du travail, qui veulent faire des études correctement, qui veulent vivre, se soigner correctement. Il est temps qu’on pense à eux, parce que la paix aussi se construit dans le respect des uns des autres.

Propos recueillis par Benoit Hili
Le Nouveau Réveil

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