Houphouët, De Gaulle et la Nationalité octroyée par Ouattara aux apatrides et sans-papiers

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Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)

Dans l’article intitulé: «La lutte politique de Gbagbo et des Ivoiriens vise la création d’un État-nation et non l’exclusion d’une partie de notre population» publié par le site: «AFRIK53.com» et le journal ivoirien LG, nous découvrons que pour Alassane Ouattara et ses partisans la Côte d’Ivoire ne retrouvera la paix qu’avec l’assimilation des étrangers vivant sur son sol à sa communauté, parce que « ce paysest par essence une terre d’immigration ». Pour Jean William Fritz Piaget (1896-1980), la répétition est une vertu pédagogique, voilà pourquoi il est utile de bien fixer dans notre esprit les causes réelles de la crise ivoirienne, afin de ne pas nous laisser distraire, par exemple, par les frasques de Wattao, un caporal-cuisinier devenu, à l’instar d’Idi Amin Dada Oumée (1928-2003), officier supérieur.

Cet officier de l’armée d’Alassane Ouattara qui fait, étrangement, la une de l’actualité n’est qu’un personnage monté de toutes pièces dans cette guerre psychologique contre les Ivoiriens, dans le but d’appâter certains jeunes, et de susciter, de manière particulière, la haine dans le cœur de tous ceux qui ignorent que les émotions et la politique ne font pas bon ménage. Les spécialistes de la discorde attisent, à partir de ce personnage, le feu virtuel de la division, afin de faire croire au monde qu’en Côte d’Ivoire les jeunes du Nord ont pris les armes parce qu’ils ont toujours aspiré aux privilèges de leurs frères du Sud. Soyons donc vigilants car notre lutte politique n’est pas de tout repos. La politique définie, de manière sommaire, comme l’art d’administrer un peuple consiste à opérer des choix judicieux à des moments précis de notre histoire, en vue de la paix sociale. Octroyer ou non la nationalité d’un pays à des sans-papiers ou à des apatrides est une question vitale à laquelle fut confronté en 1946 le général De Gaulle et le Parlement français. Après la modification de la Constitution de L’Empire colonial français en son titre VIII, on assista à la naissance de l’Union française le 27 octobre 1946. Il fut aboli le Code de l’indigénat: la suppression du travail forcé, la justice spéciale indigène, et les colonies devinrent des départements et des territoires d’Outre-mer. Houphouët Boigny, alors député de la Côte d’Ivoire, territoire d’Outre-mer, demanda la nationalité française pour tous les ressortissants de l’Union.

De Gaulle et le Parlement français ne donnèrent pas suite à une telle requête, parce que la France dit-on n’entendait pas devenir « la colonie de ses colonies ». Les ressortissants des territoires d’Outre-mer auxquels le Parlement français refusa la nationalité française étaient dans un tel contexte des apatrides, puisqu’ils n’avaient aucune nationalité, aucune patrie. Pourquoi la France, fille de la Révolution française, et mère nourricière des Droits universels de l’homme n’accorda pas, malgré son humanisme, la nationalité française aux Africains sans patrie? Elle avait pourtant, mieux que la Côte d’Ivoire, la mainmise sur toutes les richesses, sur la monnaie, sur les ressources naturelles de l’Afrique francophone. Pourquoi refusa-t-elle de porter les souffrances de ces peuples qui avaient versé leur sang au cours des deux guerres mondiales pour la naissance d’un monde libre? Pourquoi la France refusa-t-elle d’être l’espérance de cette Afrique combattante et pleine de vitalité? Pourquoi n’a-t-elle pas d’adopter, bien avant Alassane Ouattara, une loi sur l’apatridie, sur la nationalité et le foncier, elle qui était sortie très affaiblie des deux guerres mondiales, et avait besoin de main d’œuvre pour sa reconstruction? Le refus de De Gaulle et du Parlement de l’Union de concéder la nationalité française à toutes leurs populations n’était pas lié à des raisons propres aux extrémistes de la droite, ou à un sentiment xénophobe, raciste. Au-delà des considérations purement économiques ou culturelles, De Gaulle, en opérant un tel choix, évita à la France, la crise politique qu’Alassane Ouattara fait connaître aujourd’hui à la Côte d’Ivoire. De Gaulle et les députés français avaient en 1946, dans l’intérêt de leur nation, poser un acte républicain, parce que tout État se doit, avant tout, de garantir la sécurité de ses citoyens. Tout homme politique averti est conscient du fait que les relations internationales ne reposent pas sur un humanisme béat, mais plutôt sur l’équilibre des puissances voire l’équilibre de la terreur. En 1648, à Westphalie, ce concept politique jeta, en fait, les bases de l’Europe moderne. Les États sont donc, de manière réciproque, des ennemis potentiels, puisqu’ils luttent tous pour leur propre survie. Concéder la nationalité française à toutes les populations de l’Union revenait à favoriser en France une immigration massive susceptible de violer un principe sécuritaire fondamental aussi vieux que le monde.

Tout État soucieux de sa propre sécurité a, en effet, le devoir de veiller à ce que le nombre d’étrangers vivant sur son sol ne dépasse pas un seuil de tolérance. Ces derniers représenteraient naturellement un cheval de Troie parce qu’ils peuvent devenir à tout instant, comme en Côte d’Ivoire, les alliés des « nationsennemies » prêtes à favoriser, l’implosion de tout État victime de sa prospérité, aussi bien sur le plan sécuritaire, économique, culturel, social que politique. Notre pays ne fait que payer les conséquences liées à la violation de ce principe sécuritaire qu’Alassane Ouattara s’évertue à couronner, en faisant voter la loi sur l’apatridie, sur la nationalité ivoirienne et le foncier par un Parlement qui ne représente pas l’aspiration des Ivoiriens dans leur ensemble. Les paroles du Général Dogbo Blé sorti major de Saint Cyr, emprisonné par Alassane Ouattara, sonnent encore comme un glas à nos oreilles: «Je n’ai aucune dette de sang!»; ce qui signifie que cette Armée ivoirienne républicaine ne faisait que son travail, elle veillait à la sécurité des Ivoiriens et de son président Laurent Gbagbo. Pourquoi la Communauté internationale et la CPI feignent d’ignorer toutes ces réalités politiques? La Côte d’Ivoire est en fait ce fameux laboratoire de recherche où tout est expérimenté en vue de la conquête définitive de l’Afrique. L’éventuel succès d’Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire permettra à ses alliés occidentaux d’appliquer sur tout le continent africain cette
politique du cheval de Troie; ils se serviront des étrangers, des clandestins à l’intérieur de chacun de nos pays, dans le but d’affaiblir nos institutions respectives. Tous les pôles économiques africains prospères comme le Gabon, le Nigeria, le Maroc etc… seront confrontés, à leur tour, à la question relative à la nationalité des sans-papiers sur leur territoire. Ils feront ainsi d’une pierre deux coups, parce qu’une telle politique impérialiste leur permettra aussi de réduire l’immigration massive en direction des pays européens. Si les étrangers en Côte d’Ivoire réussissent, par exemple, à phagocyter les Ivoiro-Ivoiriens, les Européens orienteront le flux migratoire vers notre pays qui détient 40% de la puissance de cet espace économique. Qu’il y ait un génocide de plusieurs millions d’Ivoiriens, au cours d’une éventuelle guerre civile, peu importe, si cela permet aux nations occidentales de survivre, conformément au principe de l’équilibre des puissances.

En 2050 le continent africain ne comptera-t-il pas deux milliards de personnes à nourrir, ne sera-t-il pas une charge de trop pour le monde développé? Une Loi n’est bonne et juste que si elle favorise la paix sociale. La Loi d’Alassane Ouattara sur l’apatridie, sur la nationalité et sur le foncier met en péril la vie de tous ceux qui résident sur notre sol, parce qu’aucun ivoirien n’acceptera de se voir exproprier par des étrangers, même si cette expropriation revêt une forme apparemment légale. Des étrangers peuvent légalement devenir propriétaires dans notre pays mais pas avec une arme pointée sur la tempe de chaque ivoirien; il s’agirait alors d’un vol armé déguisé. Les pays africains ne peuvent se développer sereinement qu’en favorisant une solidarité sud-sud fondée sur le respect du Droit, de la Constitution dont se sont dotés leurs pays respectifs. En 1946, la France de De Gaulle était déjà consciente du risque que courait l’octroi de la nationalité française à toutes leurs populations. Soixante-sept ans après, les Ivoiriens seraient-ils incapables, face à leur démographie toujours croissante, de saisir les dangers qui les menacent, après avoir connu dans leur chair l’humiliation, la guerre menée en grande partie par des sans-papiers, par des immigrés clandestins?

Isaac Pierre BANGORET (Écrivain)
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