Jean-Claude Coulibaly | Le Patriote Mardi 8 Octobre 2013
Affi N’Guessan veut-il réellement la libération de Simone Gbagbo et de Blé Goudé ?
L’astuce est plus vieille que le monde. La meilleure manière de ne pas obtenir quelque chose de quelqu’un, c’est de l’injurier, le menacer ou encore le faire chanter. Pascal Affi N’Guessan est dans cette logique.
Sous ses airs de défenseur farouche de la cause des prisonniers pro-Gbagbo, le président du FPI dans son for intérieur souhaite le contraire. L’ancien maire de Bongouanou sait que la libération de Simone Gbagbo et de Charles Blé Goudé sonnera certainement son crépuscule à lui au sein du FPI.
C’est la raison pour laquelle, en tournée dans la région du Gôh depuis jeudi dernier, Affi N’Guessan a passé tout son temps à invectiver et à menacer le chef de l’Etat et son Gouvernement. Affi N’Guessan crie (sur) tous les toits que la réconciliation nationale ne peut se faire sans Laurent Gbagbo, son épouse Simone, Charles Blé Goudé et tous les pro-Gbagbo qui seraient, selon lui, encore dans les liens de la détention.
Mais ce qui intrigue, c’est le ton et les termes utilisés par le président de l’ex-parti au pouvoir.
Pour quelqu’un qui souhaite vraiment la libération de Laurent Gbagbo, de Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé, il y a vraiment un hiatus entre l’attitude et la requête. Les mots choisis pour exprimer cette doléance achèvent de convaincre que ce qui est dit tout haut n’est certainement pas ce qui est secrètement voulu.
Car que dit le Sage : « La main qui demande est toujours en bas ». Or celle d’Affi N’Guessan est prête à souffleter ceux à qui est justement adressée la revendication en question. Affi N’Guessan, au cours de sa tournée dans la région du Gôh, plus précisément à l’étape de Guibéroua vendredi dernier, a clairement déclaré que son souhait et son désir le plus ardent est le retour imminent de Laurent Gbagbo et la libération de Charles Blé Goudé. « C’est à tout cela que nous travaillons », jure-t-il la main sur le cœur.
Mais en même temps, le patron actuel de l’ex-parti au pouvoir tient d’autres propos qui trahissent sa véritable pensée.
« Le FPI donne jusqu’à la fin du mois au pouvoir Ouattara pour libérer Blé Goudé et tous les autres prisonniers politiques. Si cela n’est pas fait, le FPI prendra la rue », menace ouvertement Affi.
Cela s’appelle vouloir à la fois une chose et son contraire. Mais détrompez-vous. Ce n’est ni un paradoxe ni un signe de trouble psychique chez l’ex-pensionnaire de la prison de Bouna.
Affi N’Guessan sait pertinemment ce qu’il veut. Le président du FPI joue en ce moment sur deux tableaux. Ses calculs sont simples. Il a l’information que le chef de l’Etat s’apprête à gracier tous les pro-Gbagbo encore en détention d’ici la fin de l’année. Il le sait, d’autant que lui-même, en tant prisonnier en liberté provisoire, est concerné au premier chef par cette mesure.
Mais, le problème de Pascal Affi N’Guessan est son obsession mal contenue d’exister politiquement. La sortie de Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé, on le sait, risque gravement d’entraver son projet d’être le leader incontesté du FPI et ses ambitions présidentielles.
D’où la rhétorique guerrière pour à la fois essayer d’endormir et de séduire l’électorat ivoiritaire. En brandissant le torchon rouge de la violence et de l’insurrection, il espère ainsi susciter la méfiance et l’ire du pouvoir dans le but de saborder l’acte de haut portée que s’apprête à poser le chef de l’Etat en cette fin d’année.
Au demeurant, en cas d’échec, Affi, en lançant cet ultimatum loufoque au Gouvernement, pense pouvoir s’arroger la paternité du vaste élargissement des pro-Gbagbo qui se préparent au niveau du palais de justice. Son objectif est de faire croire aux militants de son parti qu’il y serait pour quelque chose, au cas échéant.
En définitive, Pascal Affi N’Guessan est dans le rôle du faux avocat qui fait semblant d’épouser la cause de ses camarades actuellement en détention. Mais qui, en réalité, prie de toute son âme en secret pour qu’ils y séjournent encore pour longtemps. Car à vrai dire, il y va de sa propre survie politique.
Le pouvoir Ouattara tomberait-il dans le grossier piège que lui tend celui qui est fatigué de vivre dans l’ombre de Simone Gbagbo et qui redoute la popularité de Charles Blé Goudé ? Rien n’est moins sûr.
Jean-Claude Coulibaly
Publié le mardi 8 octobre 2013 | Le Patriote
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