BÉDIÉ, un paranoïaque et un mégalomane invétéré

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Par Lazare Koffi Koffi [Cadre du Front Populaire Ivoirien FPI, en exil]

Le paranoïaque se dit généralement d’un individu qui a une tendance pathologique à surestimer son moi. De plus, il se méfie exagérément de tout, ne croit en personne sinon qu’en lui-même et éprouve une susceptibilité excessive vis-à-vis des autres. Le paranoïaque a également un caractère introverti car ayant une propension à se tourner vers soi plutôt que vers les autres. On parle ici d’égocentrisme. Quant à la mégalomanie, c’est un comportement pathologique excessif caractérisé par le désir de gloire, de puissance. On parle alors de folie de grandeur.

Ces traits de caractère, on les rencontre pleinement chez Henri Konan Bédié. Cela transparait aussi bien dans ses écrits, ses discours que dans ces actes. Dans son livre Les chemins de ma vie , Bédié n’a-t-il pas qualifié les militants de son parti et ses fidèles compagnons de suiveurs ? Bien qu’il ne soit plus au pouvoir, chassé en 1999 par un coup de force militaire, il ne s’est pas départi de son goût prononcé pour le luxe. On dit de lui qu’il affectionne les orgies, les cigares de grandes marques et la beuverie suivant une morale épicurienne. Il aime étaler avec faste ses richesses. Pour tout dire il adore l’or qu’il magnifie publiquement. On se souvient de lui, en effet, qu’il célébra ses premiers sept milliards en tant que gestionnaire du trésor ivoirien. Tout cela pour attirer l’attention sur lui. Parce que très tôt, Houphouët fit de lui son successeur, secrètement d’abord, puis officiellement à travers l’article 11 de la Loi fondamentale de la Côte d’Ivoire. Mais ces sorties et autres exhibitions d’apparats lui furent fatales. En 1977, il fut honteusement chassé du gouvernement pour malversations. Cet épisode noircit longtemps sa vie et laissera des séquelles profondes dans son cheminement vers le pouvoir. Parvenu à la magistrature suprême par suite du décès arrangé d’Houphouët, son lourd passé, encombré par des faits déshonorants, le suivra comme un boulet. Ce lourd passé, ajouté au fait qu’il resta longtemps dans l’ombre de son prédécesseur, dans l’attente d’un pouvoir qui mit du temps à lui parvenir, le poussa à intérioriser de mauvais sentiments à l’égard de ses concitoyens et à développer une rancune incurable vis-à-vis de ses concurrents politiques. Allergique à la critique et ayant une approche monarchique du pouvoir, en tant que chef d’Etat, il traita les journalistes de l’opposition de termes grandiloquents qu’il chérissait pour faire mystérieux comme écrivaillons pour dire écrivains médiocres ou plumitifs et hypocondriaques pour qualifier leurs humeurs capricieuses. Souleymane T. Sen, le premier, en avril 1994, puis deux ans après, Freedom Neruda et Emmanuel Koré, tous journalistes au quotidien La Voie et Sangaré Abou Drahamane, alors directeur de publication de ce journal, subirent son courroux. Henri Konan Bédié au sommet de l’Etat, manqua de sagesse et n’agit que suivant ses instincts. Il n’écoutait personne, dit-on, dans son entourage et était porté sur des projets irréalistes et irréalisables. Il ambitionna ainsi, dans un contexte de délabrement économique, de faire de la Côte d’Ivoire, l’éléphant d’Afrique, c’est-à-dire un pays à économie forte, la plus forte du continent noir. Dans ce projet, il s’engagea à bâtir un building de 50 étages, expression achevée et éloquente de sa mégalomanie…

Dans cette propension à voir le développement de manière colossale au-delà des possibilités économiques réelles de son pays et à se prendre pour le nombril de la terre, son épouse Henriette Bomo l’accompagna étroitement jusqu’à le pousser à construire pour elle un immense et somptueux palais à Koukourandoumi, le village du sourire. A travers ce palais, le président Bédié et son épouse Henriette Bomo, en plus de celui qui était en construction à Daoukro, exprimèrent nettement leur volonté de domination et leur mépris pour le peuple. Ce palais de 10 milliards de nos francs situé à l’extrême fond du village au bord du fleuve Bia dans un gigantisme insultant pour la conscience humaine donne au village de Koukourandoumi, autrefois petit hameau perdu dans les broussailles à l’entrée du Djandji (Ayamé), l’image du goût prononcé du luxe au milieu d’une population qui vit dans la pauvreté absolue…

Pour réaliser ses rêves de constructions pharaoniques, Bédié eut besoin d’argent, de beaucoup d’argent. Aussi, mit-il à mal la trésorerie de l’Etat qui fut éclaboussé par le scandale des 18 milliards de l’Union européenne ainsi que par les nombreuses dépenses non ordonnancées. Cela l’éloigna naturellement du peuple ivoirien dont le vécu quotidien ne le préoccupa nullement. De fait, celui-ci ne le suivit pas dans sa volonté de lui donner une âme identitaire à travers sa célèbre formule de l’ivoirité.
En effet, dans sa hargne contre Alassane Ouattara, son adversaire politique qui troublait son sommeil, Bédié tenta en vain de focaliser l’opinion nationale sur le débat de l’ivoirité. A terme, ce débat devait provoquer une intransigeance nationaliste dont les effets devaient éliminer Ouattara de la course au pouvoir. Mais, il resta sans soutien populaire. Aussi, lorsque les militaires vinrent le chasser du pouvoir, des images de foules débordantes de joie accompagnèrent ce coup de force qu’on qualifia très tôt de salutaire.

Bédié n’a jamais pu consommer son éviction du pouvoir. La rancœur tenace, il se laisse ronger par un sentiment revanchard profond. Comme une grande majorité de militants du Pdci, il tient Laurent Gbagbo et le Fpi responsables de ses déboires actuelles, les accusant de n’avoir pas soutenu son appel à faire barrage aux militaires. On comprendra pourquoi, en 2010, il fit une alliance contre nature avec Ouattara son farouche ennemi d’hier avec lequel il crée le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), cette coalition que les Ivoiriens jugent dans leur grande majorité comme une organisation politique diabolique contre la nation. Bédié est vu aujourd’hui comme un homme d’Etat, sans sagesse, qui, pour ses intérêts personnels et sa farouche ambition de revenir au pouvoir malgré son âge fort avancé, n’hésite pas à soutenir l’insoutenable…. Mais les dieux ne sont pas avec lui. Les dieux ne seront plus jamais avec lui. En a-t-il pris conscience ? Apparemment non. Et il continue de rêver…

Lazare Koffi Koffi

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