Par Dr Serge-Nicolas NZI Chercheur en communication
I – Nous n’avons jamais milité dans les rangs du front populaire ivoirien. Ni dans aucun parti politique ivoirien. La stérilité politique qui est leur racine commune, nous empêche de nous reconnaître en eux. L’ensemble de ces partis politiques du marigot ivoirien tient jalousement un listing de leurs militants et on peut facilement vérifier la véracité de notre propos. Aucun d’eux ne peut prétendre nous avoir vu un jour à sa porte. Nous sommes un esprit libre qui se tient loin des assujettissements claniques.
Nous regrettons tous nos morts et surtout la violence qui a arraché les uns et les autres à l’affection de la nation. Nous sommes dans une phase ou chaque ivoirien doit compter. C’est dans cet esprit que nous sommes fondamentalement opposé à tout ce qui est nocif au vivre ensemble dans un pays fragile et fragilisé par son histoire récente.
Nous ne sommes pas d’accord avec le FPI sur beaucoup de choses. Mais le viol filmé de Simone Gbagbo, qui circule sur les téléphones portables est révoltant et inacceptable. À cela s’ajoutent les maltraitances qu’elle avait subies lors de son arrestation.
Ses cheveux furent arrachés, elle est arrivée à l’hôtel du Golf débardée et pratiquement dénudée. Tout cela nous rend perplexe devant une gouvernance qui a commencé dans la violence, le meurtre et le sang. Allassane Ouattara a-t-il besoin d’un procès contre une femme pour s’affirmer et jouer au matamore des tropiques devant ses partisans ? Il veut réussir avec la femme de son adversaire ce qu’il n’a pas pu faire avec son mari ? Quel courage et quel grand cœur présidentiel ?
La violence et l’humiliation comme armes politiques, c’est tout simplement déplorable. Nous dirons la même chose si cela devait arriver demain à la femme et aux enfants d’Allassane Dramane Ouattara. Il est possible que la situation actuelle de la prisonnière fasse jouir de plaisir et de bonheur les nordistes membres du RDR. Est-ce vraiment cela la vie politique sous nos cieux? L’état ne doit-il pas protéger nos vies au lieu de les détruire ?
C’est pourquoi nous disons que quand le président de la république devient plus un chef de clan ethnique au lieu d’un rassembleur, il ne peut pas être un faiseur de bien. Car c’est à cela que le pouvoir politique et son exercice doivent servir. Pour l’instant le gouvernement ivoirien nous a dit qu’il refuse de transférer Simone Gbagbo à la CPI, car il a les moyens de la faire juger sur place. Nous y croyons et sommes déjà dans l’esprit du procès.
II – Regards sur un procès en perspective
Il y aura d’entrée une belle bataille de procédure à l’ouverture de ce procès, entre le tribunal et la défense. Ce sera un grand moment de délectation pour les amoureux du droit pénal. Contestation du tribunal, récusation des juges et jurés nordistes liés au rattrapage ethnique.
Le régime du rattrapage ethnique ne peut pas libérer Simone Gbagbo, il se retrouve ainsi acculé au mur de sa propre négativité et se trouve dans l’obligation de faire juger l’épouse de Laurent Gbagbo à Abidjan. Une grande comédie judiciaire se prépare donc sur les bords de la lagune Ebrié. Simone Gbagbo, fut officiellement inculpée le 18 août 2011 par le procureur de la république.
Observons un instant, les charges du procureur de la république contre Simone Ehivet épouse Gbagbo.
– vol aggravé
– détournement de deniers publics
– collusion
– pillage et atteinte à l’économie nationale
N’oublions pas que le 22 novembre 2012 la CPI avait lancée un mandat d’arrêt international contre Simone Gbagbo pour crimes contre l’humanité. Crimes commis pendant la crise postélectorale de 2010 à 2011.
On veut juger Simone Gbagbo en cour d’assisses et non en correctionnelle pour la bonne et simple raison que les assises ont compétences pour prononcer un verdict entre 10 ans et la perpétuité, et c’est ce qu’on veut infliger à Simone Gbagbo après tout ce qu’elle a déjà subi.
L’archange Gabriel, est-il apparu en plein midi à Allassane ouattara et à son ministre de la justice, tous deux originaires du nord ? Nous sommes frappés étonnement et c’est même un miracle extraordinaire dans un régime de terreur, que le délit, – d’atteinte contre la sureté de l’état, qui avait permis d’envoyer plusieurs dirigeants du FPI en prison ne soit pas retenu cette fois, par la justice du rattrapage contre, Simone Gbagbo.
Quel sera donc le décors de cet immense théâtre de l’absurde ? Le régime du rattrapage aimerait pour des raisons de sécurité transférer le procès Kafkaïen dans une caserne militaire, ce qui facilitera la maitrise des lieux de sa comédie judiciaire et empêchera ainsi l’accès aux curieux de tous bords.
Circule il n’y a rien à voir !
Mais l’opinion internationale étant déjà focalisée sur ce procès, il sera donc obligé de l’organiser au tribunal d’Abidjan, qui sera bouclé par un impressionnant détachement militaire de l’armée mono ethnique FRCI de Dramane Ouattara. Les soldats nordistes seront bottés, casqués et équipés de matériels antiémeutes, gaz lacrymogène, bref tout ce qui va avec est déjà prêt.
Il faudra montrer patte blanche pour accéder au tribunal. Deux mois avant son procès, Simone Gbagbo sera bien nourrit car le régime est soucieux de son image. Toutes les dictatures sanguinaires sont ainsi faites. Le boss du rattrapage ethnique ne voudra pas la faire apparaître amaigrie et titubante devant le monde entier. C’est donc en femme digne et courageuse qu’elle s’agrippera à la barre du tribunal pour faire face aux juges, aux jurés et au procureur de la république du rattrapage.
Il y aura de nombreux journalistes, des observateurs étrangers, des représentants des organisations des droits de l’homme, du corps diplomatique, car les maîtres français d’Allassane Dramane Ouattara, viendront voir si le plan fonctionne bien.
Conscient d’être les témoins d’un grand procès dont dépendra la suite de leur carrière, le juge principal, l’avocat général et le procureur, dans leur toge en soie et en hermine noir et blanc, seront à la première loge de cette immense mascarade qu’est ce procès saugrenu. Celui de l’acharnement judiciaire contre l’épouse d’un adversaire politique.
Nous faisons remarquer ici déjà que si au cour du débat judiciaire le juge coupe la parole à l’accusée ou l’empêche d’exprimer le fond de sa pensée, s’il n’a aucune courtoisie vis-à-vis de l’accusée, c’est que c’est un juge du régime qui a reçu des instructions. Il se sait observer et veut conduire le procès dans les lignes de recommandations de ses maîtres.
Dans l’atmosphère d’oppression, de peur et de servilité dans laquelle baigne le pays du rattrapage, une telle attitude d’un magistrat n’étonnera personne. Mais il y a la presse et l’opinion internationale. Il y a tous ceux qui aimeraient finalement voir clair une bonne fois pour toute sur ce qui est reproché à Simone Ehivet, l’épouse de Gbagbo Laurent. Pour le régime en place, Simone est un alibi utile, voir une obsession. C’est comme l’effet d’une torche sur les insectes en pleine nuit dans la jungle. On dirait en médecine que c’est : un abcès de fixation.
Par contre si c’est un juge conscient que l’histoire cherchera demain les preuves de sa liberté de conscience et de son impartialité de magistrat, il sera courtois, il analysera les faits avec équité, il laissera parler l’accusée pour qu’elle s’exprime librement sur ce qui lui est reproché. Ce procès est sensé rendre justice, mais à qui ? Au pays ou au régime nordiste du rattrapage ethno tribal?
N’oublions pas que Simone Gbagbo, est une femme qui n’aura pas sa langue dans la poche ce jour là. Elle sait qu’elle joue sa vie. Dans ce sens, le procès peut se transformer en un immense marécage pour Allassane Dramane Ouattara et le gouvernement en place, mais aussi pour l’image même que le monde entier retiendra de la justice ivoirienne.
Tout dépendra de l’issue de ces audiences, le comportement de chaque protagoniste sera observé à la loupe. Comme vous le constatez, la pression n’est plus sur Simone Gbagbo. Nelson Mandela, avait dit que c’est celui qui te met en prison injustement, qui a des problèmes de justification avec la morale, et non le prisonnier.
Nous y sommes pleinement. Un procès peut faire basculer l’opinion des citoyens. Pendant la guerre d’Algérie entre le 1er novembre 1958 et le 19 mars 1962, l’opinion française était choquée par les attentats du FLN, mais elle fut émue et indignée de savoir que des villages arabes étaient incendiés au napalm, au lance-flammes et que l’armée française avait utilisé la torture ainsi que des exécutions sommaires contre les femmes et les enfants non combattants, mais aussi contre les nationalistes algériens. Le gouvernement ivoirien du rattrapage ne sortira sûrement pas indemne de ce procès.
III – La défense de Simone Gbagbo
L’accusée Simone Ehivet épouse Gbagbo sera assistée par un bataillon d’avocats. Ivoiriens, européens et des ténors des barreaux de la sous région Ouest Africaine avec à leur tête Maître Habiba Touré et le chef de file du collectif maître Ciré Cledor Ly de Dakar.
Si le procès se déroule dans de bonnes conditions avec tous les respects des droits de la défense. Il n’y a pas de doute, que les avocats de Simone Gbagbo, déposeront un premier recours sur les conditions de détention. Et une demande de nullité de la procédure d’instruction, qui conduira à la relaxe pure et simple de leur cliente. Car il y a eu plusieurs auditions sans la présence des avocats conseils de l’inculpée, notamment celle du 8 mai 2011.
Sans être juriste nous disons ici qu’un simple étudiant en première année de droit pénal peut balayer du revers de la main toutes ces accusations fantaisistes pour vice de forme dans la procédure. Ceux qui veulent nous contredire doivent d’abord savoir de quoi il s’agit :
– l’inculpée était parlementaire et bénéficiait de l’immunité parlementaire à l’époque des faits qui lui sont reprochés.
– Simone Gbagbo depuis 2004 n’est plus fonctionnaire de l’état ivoirien, qu’est ce qui peut justifier un détournement de deniers publics dans son cas ?
– ensuite sont incarcération dans des conditions franquistes et son éloignement dans un goulag à plus de 500 km du lieu des faits, dénotent d’une volonté délibérée du pouvoir en place de nuire à l’inculpée. Cela est contraire à toutes les convenances judiciaires dans lesquelles la Côte d’Ivoire se reconnaît comme Etat de droit.
– Les humiliations, les maltraitances et son interrogatoire pour des faits aussi graves sans la présence de ses conseils relève d’une volonté du procureur de la république de bafouer les droits de l’inculpée et de la défense.
– Et en fin le procès est un procès politique, car ce n’est pas Simone Gbagbo que le régime du rattrapage ethno tribal d’Allassane Dramane Ouattara, veut juger. Mais le régime de Gbagbo et son parti le FPI, à travers l’épouse du chef de la refondation patriotique éburnéenne.
– Sous cet angle le procès prendra une tournure plus que politique qui sera à l’encontre des objectifs de ses ordonnateurs.
– Les avocats de la défense pourront citer comme témoins à comparaitre, à la barre deux militaires ivoiriens aujourd’hui ambassadeurs au Gabon et au Sénégal. Le monde entier verra cela comme la preuve flagrante d’une subordination de témoins pour des faits de guerre pendant la crise postélectorale et ouvrir ainsi la boite de pandore qu’Allassane Ouattara porte secrètement à son cou.
IV – Qu’est ce qu’un procès politique
Les méthodes utilisées par l’instruction nous font penser aux procès staliniens de Moscou, entre 1936 et 1938. Au procès kafkaïen de joseph K, au procès de Jean Nguza Karl I Bond en 1977, sous le régime criminel de Mobutu, au procès de Fela Anikulapo Kuti, sous le régime prédateur du général Mohamed Buari, au Nigeria en 1984.
Comme dans l’Espagne du caudillo Francisco Franco, le régime du rattrapage d’Allassane Ouattara, veut lui aussi son grand procès. Comme au fameux procès du complot de 1963 dans la Côte d’Ivoire d’un certain Félix Houphouët-Boigny. Procès au cour duquel un tribunal d’exception présidé par un certain Philippe Yacé, avait prononcé 13 condamnations à mort, 51 condamnations à des peines de travaux forcés contre des gens dont-il connaissait pertinemment l’innocence. Bizarrement l’histoire se répète toujours pour les ivoiriens. On oublie même aujourd’hui que c’est un fils de la Côte d’Ivoire qui en qualité de rapporteur, avait présenté au parlement Français le 11 avril 1946, la loi d’abolition du travail forcé.
Mais le plus grave est que les accusés de l’époque, furent trainés par la police au central boxing club de Treichville ou une tribune fut dressée et chacun d’eux devait prendre la parole pour s’accuser de crime qu’il n’avait pas commis. Dire que c’est le chef d’état lui-même qui est à l’origine de cette mascarade nous inspire un profond dégout. Nous retenons tous aujourd’hui qu’obliger un innocent à s’accuser de crime qu’il n’a pas commis est moralement monstrueux et indigne d’un homme d’Etat.
Voilà une idée claire des habitudes qui sont gravées durablement dans les granites de l’histoire judiciaire d’un pays qui, avait tout pour réussir et qui au prix d’un double manquement à sa vocation et à sa raison d’être est, aujourd’hui le théâtre de toutes les expériences sanguinaires de l’alternative politique par la force des armes.
Le procès qui ne respecte pas les droits de la défense est un procès inquisitorial, comme celui des templiers. L’instruction sans témoin ou conseils permet d’arracher des aveux sous la contrainte, la menace et la torture. C’est un règlement de compte évident d’un régime criminel et despotique qui est aux aboies.
Les avocats de Simone Gbagbo ne manqueront pas de contester le tribunal. Doit-on juger l’inculpée en cour d’assise comme veut le faire le régime ivoirien du rattrapage ? Les faits reprochés à l’inculpée ne relèvent t-ils pas d’un tribunal d’instance, ou d’une correctionnelle ? Veut-on maquiller pour la circonstance une cour d’assise en tribunal d’exception ?
Toutes ces questions restent ouvertes, car Simone Gbagbo était parlementaire à l’époque des faits et l’assemblée ne fut dissoute qu’après son arrestation. Il y a enfin procès politique lorsqu’un régime criminel utilise les instruments de la justice pour faire du mal ou pour se débarrasser politiquement d’un ou plusieurs citoyens qu’il considère comme des dissidents vis-à-vis de ses choix de gestion de la communauté nationale.
Nous observons que l’une des grandes aberrations de notre temps est la difficulté à comprendre qu’un gouvernement qui prétend être arrivé au pouvoir démocratiquement, complote avec une puissance étrangère, dans le but sordide de faire du mal à ses propres citoyens. Les intérêts de la France sont-ils supérieurs à la vie des ivoiriens ?
Cette question est au cœur des enjeux politiques qui conditionnent le futur de la Côte d’Ivoire. Aucune paix ne sera possible dans ce pays sans une clarification de ce qui est une énigme devenue un cancer dont les métastases ont déjà envahi les poumons de l’Etat nation, qui ne pouvant plus respirer pour s’oxygéner, n’est plus au service du bien n’être des ivoiriens.
Comme dans l’Espagne franquiste, le pays offre au monde, un étrange effet de miroir, celui de deux Côte d’Ivoire qui se regardent, qui se jugent dans l’espoir vain de guérir d’une trop grande blessure.
V – Le procès et l’opinion ivoirienne
Dans cette Côte d’Ivoire qui souffre où la majorité de nos populations a du mal à se nourrir correctement. Plus de cinquante ans après l’indépendance, nous n’avons même pas été capables de démocratiser l’eau potable chez nous. L’école est devenue un immense dépotoir. Les hôpitaux sont sans médicaments, les routes sont impraticables en saison de pluie. La crise postélectorale, est venue accentuer les divisions et renforcer les antagonismes.
Le comportement même d’Allassane Dramane Ouattara et de ses partisans a rendu la réconciliation nationale difficile et inaccessible. Les FRCI, les dozos, les zozos, les coupeurs de routes, les braquages, les violences quotidiennes et le rattrapage ethnique ont fini par faire croire à d’autres ivoiriens qu’ils ne sont plus chez eux, parce qu’ils n’appartiennent pas au bon groupe ethnique, celui du pouvoir.
Dans ces conditions Simone Gbagbo, ne demande rien d’autre qu’on étale les faits au grand jour. Elle n’y perdra rien. Elle n’est pas poursuivie pour des crimes de sang. Dans ces conditions, quelle sera la valeur des délits de : – vols aggravés, pillage et autres concussions ? Les différentes demandes en annulation et la relaxe que plaideront les avocats de Simone Gbagbo seront rejetés par le tribunal de la république du rattrapage, qui tient là sa revanche contre la passionaria de la refondation, nationaliste et patriotique du FPI.
Voilà pourquoi il y aura procès, et voilà pourquoi il sera un procès politique. Les avocats de Simone Gbagbo, sont déjà persuadés que leur cliente sera condamnée par la justice du rattrapage ethnique. Il y a ici des preuves patentes d’une suspicion légitime au regard des maltraitances et du climat de coercition qui a entouré la procédure d’instruction judiciaire. Qui a dit que le franc-maçon, Allassane Dramane Ouattara, est un homme porteur des valeurs humanistes de paix et de tolérances des lumières ?
Dans tous les cas, le pays attend la vérité, la Côte d’Ivoire appelle la vérité, cette vérité qui ne renie pas la république. Il faut condamner Simone Gbagbo à Abidjan, pour refuser de l’envoyer à la Haye auprès de la CPI où se trouve déjà son époux.
Les avocats de Simone Gbagbo, qui ont déjà une grande partie de l’opinion africaine avec eux pour la simple raison qu’Allassane Ouattara, n’a jamais su être le président rassembleur de tous les ivoiriens. Il veut servir simplement les intérêts français dans le pays qu’il veut gouverner. Il n’a que cela comme projet politique. Il n’y a que ses amitiés extérieures qui l’intéressent.
Voilà pourquoi les avocats de Simone Gbagbo disent déjà qu’à la barre du tribunal, ils essaieront de substituer à cette prise à partie partisane du tribunal contre une femme avec des meurs et des méthodes indignes. Ils opposeront la recherche sereine et courageuse de la vérité.
Ils en proposeront les moyens d’y parvenir au tribunal. Mais s’ils en étaient privés du concours du tribunal, au contraire ils continueront à lutter, devant le bon sens et l’opinion mondiale. Comme les sud africains à l’époque de l’apartheid. Leurs devoirs d’avocats vis-à-vis de leur cliente et de ce pays malade qu’est la Côte d’ivoire, est de servir la cause de la vérité dans un tribunal impartial.
Ce sera alors au tribunal d’expliquer à l’opinion ivoirienne et internationale que le débat judiciaire a été mené en connaissance de cause. Il y aura donc procès. Etrange procès. Celui de la république qui se dit légitime et légale. Procès d’un ordre public assassin qui profite plus aux dozos qu’aux citoyens. Procès des mœurs politiques qui relèvent de la vengeance judiciaire.
Procès d’un régime qui évacue de nuit une prisonnière sous anesthésie dans une prison à plus de 500km de son lieu de traitement médical. Procès des FRCI, qui seront accusés frontalement de la pacification de la Côte d’Ivoire par la terreur en vertu du droit pénal interétatique né à Nuremberg en novembre 1945. Dans ce sens une longue listes de personnes enlevées et disparues depuis la prestation de serment d’Allassane Dramane Ouattara, jusqu’à ce jour sera déposée auprès du CICR et de la commission internationale des droits de l’homme.
Procès aussi des méthodes de gouvernance. Procès de la république du rattrapage qui s’acharne contre maris, femmes, enfants et petits enfants. Celle qui condamne des faits couverts par l’immunité parlementaire. Procès des fosses communes dans lesquelles gisent encore les restes de nos frères et sœurs devenus aujourd’hui des anonymes. Procès d’une justice qui ne poursuit que les proches de Gbagbo Laurent. Procès des souffrances qu’endurent les ivoiriens qui ne sont pas du nord et qui vivent dans un Etat inatteignable, parce que hautain et de plus en plus éloigné de leurs préoccupations.
En Côte d’Ivoire le Ministère de la justice, est aussi celui des droits de l’homme et des libertés publiques. Ce sera aussi le procès de la politique de justice du régime du rattrapage ethnique, dans un climat de peur et de grandes souffrances pour ceux d’entre nous qui ne sont pas du nord de la Côte d’ivoire. Ce sera aussi le Procès de cette réconciliation nationale mise aux enchères. Procès du refus de la conciliation sociale, procès de la force et de l’arrogance comme méthode de gouvernement.
C’est aux juges du tribunal et aux jurés de prouver devant l’opinion ivoirienne qui croit au progrès de la justice, que la république n’est pas couchée à plat ventre comme un chien dans le sable de la combine politicienne pour plaire à ses maîtres extérieurs qui l’observent et toujours prompts à lui jeter des os pourris. Oui des os pourris, c’est ce que mérite la justice au service des puissants dans les pays où elle est partisane, partiale, partielle et parcellaire.
Comment la Côte d’ivoire a-t-elle pu tomber si bas ? Comment tout cela a pu nous arriver. Nous les fiers ivoiriens. Nous voici aujourd’hui prisonniers, vassalisés et enchainés à des voisins qui saluent au champagne notre affaiblissement et l’incertitude qui est désormais notre quotidien. En réalité dans la tourmente de la victoire du rattrapage, il y a une invasion du pouvoir.
Des hommes inattendus y sont venus. Avec leur armée mono ethnique. Certains parmi eux étaient des chevronnés de la récidive. Ils ont occupé en toute impunité nos maisons, nos plantations. Beaucoup de nos parents ont perdu leurs biens dans des immenses pillages sans fin.
Leurs femmes et leurs filles furent violées sous leurs yeux. D’autres furent égorgés devant leur famille. Pendant que ceux qui n’ont que le commerce à la sauvette comme but de vie, faisaient les meilleures affaires de leur minable petite vie en bradant nos biens à vil prix : Radios, télévisions, frigidaires, motos, voitures, fauteuils, tables, chaises et même les draps de lit.
Personne dans la république du rattrapage n’à assumé cette lourde et tragique responsabilité. Emprisonner, embastiller, saisir les comptes bancaires et les avoirs de ceux qui ne sont pas du nord de la Côte d’Ivoire. Créer une liste noire des ivoiriens à pourchasser à travers le monde.
Sans parler des exilés qui ne doivent plus rentrer chez eux. Ainsi Les promoteurs de la terreur, ont sans le savoir anesthésié la république qui est aujourd’hui grabataire et moribonde. Voilà l’opinion qu’offre le pays des éléphants à quelques mois du procès de Simone Ehivet épouse Gbagbo.
VI – Postulat de conclusion générale
Un gouvernement criminel peut recourir à l’intrigue, à l’assassinat ou à un faux procès pour éliminer un opposant. C’est ce que fait Staline en envoyant tuer Léon Trotski le 21 aout 1940 à Mexico. Dans la même logique, pour justifier la chasse aux communistes Adolphe Hitler, les accusa d’avoir orchestré l’incendie du Reichstag, le 27 février 1933.
Sous Philippe le Bel au crépuscule du moyen âge, le grand maître des templiers, Jacques de Molay et ses compagnons furent entrainés dans un long et cynique procès en hérésie de sept ans, qui se termina par le triomphe des flammes du bûcher le 18 mars 1314.
En Afrique nous remercions Mobutu, car il y a plus minable que lui qui n’avait pas engagé de poursuites Contre Pauline Lumumba et ses enfants. Nous remercions le Général Lassana Conté, de n’avoir engagé de poursuites imaginaires contre Hadja Andrée Touré et ses enfants. Merci au président Paul Biya d’avoir laissé Germaine Ahidjo, la veuve de son prédécesseur vivre sans des poursuites judiciaires à vie.
Dans la justice des vainqueurs en Côte d’Ivoire, une tradition vient de s’enraciner dans la vie politique ivoirienne. L’humiliation de la femme de celui qui aura le malheur de perdre le pouvoir. Triste justice ivoirienne, justice d’intrigues au service du tribalisme rampant.
L’éducation qui a nourri notre vision du monde nous oblige à lire le futur dans le présent. Ceux qui n’en sont pas capables auront beaucoup de mal à survivre dans la république ivoirienne du rattrapage ethnique. Du complot de 1963, à l’affaire Kamano François contre CNPS en 1972, à l’affaire BNDA-COGEXIM, de l’affaire LOGEMAD, au procès Laurent Gbagbo le 6 mars 1992 suite aux évènements du 18 février 1992.
Tous ces procès furent des comédies judiciaires, des intrigues et des occasions d’utilisations cyniques de la justice pour régler des comptes personnels ou des rivalités mesquines au sommet de l’Etat. Et cela n’a pas grandi le pays. Au contraire cela à permis à d’autres prédateurs de venir se vautrer sur les ossements d’un pays à la dérive, comme un navire en perdition dans les flots déchainés de la haute mer.
Nous nous élevons contre toutes ces condamnations arbitraires que la justice ivoirienne traine comme un boulet à son pied. Existe-t-ils des juges courageux en Côte d’Ivoire ? L’immunité parlementaire quand elle n’est pas levée dans les conditions prévues par la loi vous couvre entièrement. Ceux qui considèrent le droit comme une force immanente ne doivent pas envoyer des innocents en prison pour plaire au maître du jour.
Il ne s’agit pas ici d’un scrupule de notre part. C’est le bon sens et la raison perdus par les politiciens ivoiriens qui nous obligent à dire haut et fort que, lorsque tous les cadres d’un pays sont brisés dans un désastre sans précédent et lorsqu’on proclame la nécessité véridique de reconstruire une nation sur des bases solides de moralité, on ne comprendrais pas qu’un gouvernement même dictatorial commence son œuvre de reconstruction par méconnaitre le principe de l’immunité qu’octroie la représentation nationale à ses membres.
Ignorer la vérité qui est la substance même du droit en allant falsifier ou fabriquer des délits, contre l’épouse d’un adversaire politique, cela est indigne et aura des conséquences incalculables que nul ne peut prévoir aujourd’hui. Cette ignorance constitue une destruction, et un renoncement de ce qui fonde l’équilibre d’une nation. C’est un retour vers la barbarie. Ce que le législateur ivoiriens et les juristes de tous grades n’ont jamais voulu formuler.
Pourquoi les chefs de la rébellion qui ont imposé tant de peines, de souffrances et de malheurs au pays n’ont jamais été poursuivis ? L’immunité parlementaire actuelle de Soro Guillaume, est-elle la même que celle de Simone Gbagbo, à l’époque des faits qui lui sont reprochés?
L’étrangeté de cette conception restrictive du droit par la justice ivoirienne dans la recherche des coupables éventuels, dont une catégorie est mise à l’abri de toutes sanctions pénales par un régime qui pourtant veut retrouver sa légitimité dans les yeux de tous les ivoiriens. Nous avouons ici avec l’esprit critique qui a toujours été le notre, que toutes ces contradictions nous laissent perplexe et sans voix.
Ce n’est pas une raison pour que l’essentiel du débat national sur l’avenir commun soit esquivé. Nous avons voulu l’ouvrir ici avec les arguments du droit. D’autres contributions peuvent venir nous contredire et nous en serions plus qu’heureux de voir qu’on ne tranche plus la gorge de celui qui ne pense pas la même chose que nous. C’est alors que nous pourrions rechercher ensemble les causes du désastre et de l’immense gâchis ivoiriens.
Dans sa tentation d’exister, Emil Michel CIORAN, nous disait hier encore que: « Nombreux sont ceux qui s’apprêtent à vénérer n’importe quel idole et à servir n’importe quelle vérité, pourvu que l’une et l’autre leur soient infligées et qu’ils n’aient pas à fournir l’effort de choisir leur honte ou leur désastre. »
Telles sont les réflexions que nous tirons du futur procès de Simone Ehivet épouse Gbagbo, dans le grand tournant de la recomposition politique et institutionnelle d’une Côte-d’Ivoire plus que jamais embourbée dans l’immense marécage du rattrapage ethno tribal.
Merci de votre aimable attention.
Dr Serge-Nicolas NZI
Chercheur en communication
Lugano (Suisse)
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