Nouvelles manifestations après les 80 morts du « vendredi de la colère »

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EGYPTE – La police assiège une mosquée où se trouvent des pro-Morsi

Le Nouvel Observateur avec AFPPar Le Nouvel Observateur avec AFP

Au lendemain du « vendredi de la colère », qui a fait plus de 80 morts, le pays se prépare à de nouvelles manifestations. Le point sur la situation.

L’Egypte se prépare à de nouvelles manifestations samedi 17 août après l’appel des islamistes à protester quotidiennement, tandis que la police a poursuivi à l’aube le siège d’une mosquée du Caire où sont retranchés de nombreux manifestants, après une journée de violences qui a fait plus de 83 morts.

Des soldats égyptiens ont pénétré samedi à l’aube, sans avoir recours à la force, dans la mosquée Al-Fath, au centre du Caire, où sont retranchés de nombreux partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi, selon des images de chaînes de télévision.

La chaîne privée égyptienne ONTV Live a montré des images de soldats entrant dans la mosquée alors que la télévision Al-Jazeera Egypte diffusait sur son site internet des images de militaires à l’intérieur de l’édifice religieux. Les soldats semblaient négocier avec les manifestants pour qu’ils quittent la mosquée. Une manifestante à l’intérieur de la mosquée a déclaré que les protestataires demandaient à ne pas être arrêtés, ou attaqués par des civils hostiles qui se sont rassemblés devant la mosquée.

La police avait débuté vendredi soir tard le siège de la mosquée, où seraient réfugiés près d’un millier de personnes selon le témoignage d’un autre manifestant joint par l’AFP. Ce chiffre ne pouvait être confirmé de source indépendante. Des coups de feu ont été échangés au début de siège mais ont ensuite cessé.

1.004 islamistes arrêtés vendredi

Samedi matin, le ministère de l’Intérieur a par ailleurs annoncé qu’un millier d’islamistes proches des Frères musulmans, 1.004 précisément, avaient été arrêtés la veille dans le cadre des manifestations du « vendredi de la colère » auxquelles avait appelé la confrérie.

Alors que des quartiers entiers du Caire ont été transformés en champs de bataille tout au long de la journée durant laquelle les pro-Morsi se sont mobilisés en masse à travers le pays, les manifestations ont quasiment cessé une heure après l’entrée en vigueur du couvre-feu nocturne, à l’appel des Frères musulmans, la confrérie de Mohamed Morsi. Ceux-ci ont néanmoins appelé à des manifestations quotidiennes à compter de samedi pour dénoncer la mort mercredi de 578 personnes, en majorité des pro-Morsi tués dans la dispersion par l’armée et la police de leurs camps au Caire, la journée la plus sanglante depuis la chute du régime de Hosni Moubarak en février 2011. Les Frères musulmans ont évoqué 2.200 morts mercredi.

Le pouvoir mis en place par l’armée après la destitution de Mohamed Morsi le 3 juillet affirme désormais se battre contre un « complot terroriste malveillant des Frères musulmans ». Il avait autorisé vendredi policiers et soldats à ouvrir le feu sur les manifestants qui attaqueraient les forces de l’ordre ou des bâtiments publics.

Face à cette escalade, qui fait craindre que le pays – sous état d’urgence – ne bascule dans le chaos, des pays européens ont dit envisager de réexaminer leurs relations avec Le Caire.

Tirs d’armes automatiques

Dans la capitale verrouillée par l’armée et quadrillée par des « comités populaires » de partisans du nouveau pouvoir – souvent des milices de jeunes armés et excités, des tirs d’armes automatiques ont retenti toute la journée dans différents quartiers, notamment autour de la place Ramsès où étaient massés des milliers de pro-Morsi.

Dans deux morgues improvisées dans des mosquées du quartier (dont l’une dans la mosquée Al-Fath assiégée par la police pendant la nuit), un correspondant de l’AFP et des témoins ont compté au moins 39 corps. En outre, 44 personnes ont été tuées dans différentes autres provinces, dont 10 par les forces de l’ordre à Suez parce qu’une manifestation bravait le couvre-feu, selon des sources de sécurité.

Le parti de la Liberté et de la Justice, le bras politique des Frères musulmans, a fait état de 130 morts dans la capitale seule. Dans le centre du Caire, des témoins ont rapporté avoir vu un homme sauter d’un pont pour éviter les balles alors que les chars se dirigeaient vers les manifestants. Le ministère de l’Intérieur a fait état de plusieurs attaques des pro-Morsi contre des postes de police.

Appel à des « mesures appropriées » de l’UE

Vendredi, la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a invité les Etats membres de l’Union européenne à prendre « des mesures appropriées » lors d’une réunion prévue lundi à Bruxelles. Les grands pays européens ont continué à déconseiller les voyages en Egypte, alors que la Suède, la Norvège et la Finlande ont rapatrié leurs ressortissants qui y faisaient du tourisme.

Amnesty International a de son côté appelé à une enquête complète et impartiale sur le récent bain de sang, estimant que la réponse des forces de l’ordre aux manifestations avait été « largement disproportionnée ». L’organisation de défense des droits de l’Homme demande également que des experts de l’ONU soient autorisés à enquêter en Egypte.

La Turquie a, elle, rappelé son ambassadeur en Egypte, et le Caire a aussitôt rappelé son représentant à Ankara et annulé des manoeuvres navales prévues avec la Turquie pour protester contre son « ingérence ».

En revanche, le roi Abdallah d’Arabie saoudite a affirmé soutenir le pouvoir égyptien « face au terrorisme » et mis en garde contre « les ingérences » dans ce pays. La Jordanie a elle aussi dit soutenir le gouvernement égyptien dans sa lutte pour « combattre le terrorisme ». Mais dans la rue, des centaines de personnes ont manifesté à l’appel de groupes islamistes à Khartoum, Amman, Rabat, Jérusalem-Est et en Cisjordanie pour dénoncer « le coup d’Etat » contre Mohamed Morsi.

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