(Xinhua) — « Il est plus que difficile de trouver une maison à Abidjan avec des loyers vraiment trop chers pour le travailleur moyen », peste Joseph Kouakou, un habitant de Koumassi, dans le sud d’Abidjan.
De fait, trouver une maison à louer à Abidjan, la capitale économique ivoirienne, est un véritable casse-tête.
Les maisons sont rares et même si on en trouve, le prix et les conditions d’accès n’arrangent pas les choses.
La crise du logement s’est accentuée à partir de 2002 avec le déclenchement de la rébellion armée qui a coupé le pays en deux pendant près de huit ans.
De nombreuses populations vivant dans la moitié nord du pays, ont fui en masse les exactions dans les zones rebelles pour se réfugier dans le sud du pays, particulièrement dans la capitale économique Abidjan qui a vu sa population passer en 2011 à près de cinq millions d’habitants soit 20 % de la population totale du pays.
Du coup, trouver un toit est devenu une véritable gageure, d’autant plus que l’offre n’a pas suivi la demande.
Le gouvernement estime que le déficit global de logements à Abidjan est d’environ 200 000 logements avec un besoin de 40 000 par an.
Des loyers exorbitants
A Abidjan, les loyers varient en fonction du standing et de l’image des quartiers mais, quelle que soit la commune, le constat est le même : les maisons coûtent extrêmement chères.
Dans le quartier huppé de Cocody (ouest), la location d’un studio peut monter jusqu’à 120.000 francs CFA (240 dollars) et pour un appartement de trois pièces le loyer peut s’élever à 300. 000 francs CFA et atteindre même 700. 000 francs dans un autre quartier de haut standing comme Marcory-Zone 4 (sud).
Dans la vaste commune populaire de Yopougon (nord), le loyer mensuel d’un studio est d’environ 50 000 francs CFA, les appartements de deux ou trois pièces avoisinent respectivement 70 000 et 100 000 francs.
Même dans le vieux quartier commercial de Treichville (centre) le loyer des maisons de deux pièces se négocient autour de 70 000 francs CFA et pour les trois pièces il n’est pas rare de débourser entre 150 000 et 200 000 francs CFA.
« Vraiment, les maisons coûtent cher à Abidjan, quel que soit le quartier », soutient Joseph Kouakou, technicien de son état, qui relève que le salaire minimum interprofessionnel garanti (smig) est de 36 000 francs CFA (72 dollars).
« J’ai dû économiser pendant près de deux ans pour pouvoir me prendre une maison de deux pièces. Je ne suis pas totalement satisfait mais je n’envisage pas déménager ces temps-ci, parce que c’est un budget que je dois mettre en place pour le faire », fait- il savoir.
Et pour cause, plus que le loyer mensuel ce sont les conditions d’accès aux maisons qui font rechigner les demandeurs.
Des conditions d’accès contraignantes
« Pour avoir les clés de la maison, il faut débourser l’avance et la caution qui peuvent aller de cinq à 10 fois le loyer mensuel « , dénonce un fonctionnaire, la quarantaine bien sonnée, habitant Yopougon.
Pour se donner les chances d’obtenir une maison à louer, il existe bien sûr des agences immobilières légalement constituées mais la plupart des Abidjanais ont recourir aux relations, au » bouche à oreilles » ou plus généralement aux services de jeunes gens qui se font appeler « agents immobiliers ».
« Nous sommes obligés de solliciter leurs services de ces démarcheurs parce qu’ils sont plus informés et aussi les propriétaires leur confient souvent la charge de leur trouver des locataires », confie le fonctionnaire.
Ces « agents immobiliers » sont en réalité des démarcheurs qui placardent sur des tableaux installés aux abords des grandes voies différentes offres de loyers avec les commodités afférentes, leurs situations géographiques, le coût et le montant global à verser au propriétaire pour les potentiels acquéreurs.
« On fait visiter la maison au potentiel acquéreur à ses propres frais et on lui soumet aussi les modalités de paiement, c’est-à- dire le nombre de mois de caution et d’avance à payer, fixé par le propriétaire lui-même », explique un « agent immobilier », Jules Kouamé, qui indique qu’il perçoit une commission qui équivaut au coût mensuel du loyer.
« Il nous arrive parfois de verser l’argent au démarcheur sans avoir vu la maison, une manière pour nous de bonifier nos chances de l’avoir », fait savoir Patrick Horo, un salarié du privé habitant Koumassi.
Mais les choses ne se passent pas toujours aussi bien.
« Il n’est pas rare de voir des maisons inachevées proposées à la location, ou que des démarcheurs traitent avec le demandeur à l’insu du propriétaire engendrant ainsi des conflits », affirme Mohamed, habitant de Treichville.
« J’ai des amis et des frères qui en ont été victimes de ces démarcheurs à Yopougon », affirme-t-il, révélant qu’ils ont promis des maisons qui n’existaient pas en fait ou dont ils ne connaissaient même pas le propriétaire.
Pour garantir la régularité de paiement, des propriétaires demandent que le loyer soit payé un mois à l’avance, répétant à souhait « on paie avant de dormir ».
« Il y a des propriétaires de maisons qui posent des conditions de toutes sortes. Tu es de quelle ethnie ? Tu travailles où ? Tu es marié ? », relève Mohamed.
« Souvent, le propriétaire réceptionne sciemment l’argent de deux ou trois personnes pour survenir à ses urgences ou autres besoins, ce qui débouche inévitablement sur des conflits portés devant la police ou à la gendarmerie », ajoute-t-il.
Pour prévenir ces problèmes, la tendance actuelle est au contrat-bail, engageant propriétaire et locataire, approuvé par des autorités municipales.
Le gouvernement a lancé un programme qui devrait permettre de mettre à la disposition des Abidjanais quelque 60 000 logements sociaux et économiques d’ici 2014.
En attendant, c’est toujours la croix et la bannière pour les demandeurs de maisons dans la capitale économique ivoirienne.
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