Lassiné Diawara: « Plus de 2 millions de tonnes de marchandises par jour entre le Burkina et la Côte d’Ivoire »

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Lassiné Diawara: «entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire plus de deux millions de tonnes de marchandises circulent chaque jour»

Par Christophe Boisbouvier RFI

Y aura-t-il un jour une autoroute et un pipeline entre Abidjan en Côte d’Ivoire et Ouagadougou au Burkina Faso ? Oui, affirment les présidents Alassane Ouattara et Blaise Compaoré, qui ont signé plusieurs accords de coopération, le mardi 30 juillet 2013 à Yamoussoukro. Parmi les opérateurs économiques les plus intéressés, il y a le Burkinabè Lassiné Diawara. Il préside le conseil d’administration de Bolloré Africa Logistic Burkina Faso et celui de Sitarail (Société internationale de transport africain par rail), la société qui exploite le chemin de fer Côte d’Ivoire-Burkina. Le « monsieur Bolloré » de Ouagadougou, Lassiné Diawara, répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : L’autoroute Abidjan-Ouagadougou, on en parle depuis des années, mais rien ne se fait. Cette fois-ci, est-ce que vous y croyez ?

Lassiné Diawara : On ne peut pas dire que rien ne se fait dans la mesure où l’autoroute côté Côte d’Ivoire est presque arrivée à Yamoussoukro. Et les études entre Yamoussoukro et le Burkina Faso jusqu’à Ouagadougou me semblent très avancées. Ce qui est important, c’est également la volonté ferme des deux chefs d’Etat d’aller de l’avant. Cette fois-ci, j’y crois.

Et pourquoi est-ce important cette autoroute à vos yeux ?

D’abord, c’est un outil d’intégration de deux pays au-delà des pays comme le Niger, une simplification du trafic qui augmente de jour en jour parce qu’entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, c’est quand même plus de deux millions de tonnes de marchandises qui circulent. Cela peut aller au-delà avec le développement de certains produits de l’agriculture et des projets miniers.

On peut espérer qu’il y aura moins d’accidents de la route ?

C’est aussi l’autre aspect important. Ca diminue énormément les accidents de la route, ça fluidifie et ça permet de transporter davantage de marchandises.

Lors de leur rencontre à Yamoussoukro, les deux chefs d’Etat de Côte d’Ivoire et du Burkina Faso ont décidé également de moderniser le chemin de fer entre Abidjan et Ouagadougou. Est-il si vieux, si vétuste que cela ?

Le chemin de fer n’est pas si vieux que cela parce qu’on a eu un programme d’investissements d’urgence dans les années 1995 qui a mobilisé 40 milliards de francs Cfa. Nous n’avons jamais arrêté de faire l’entretien courant au niveau de Sitarail. Par contre, le chemin de fer a été très éprouvé pendant la crise ivoirienne de 2002 à 2011. Il est évident que pendant cette période, nous n’étions pas au maximum de notre fonctionnement. Les investissements courants n’étaient pas faits comme on l’aurait souhaité dans la mesure où le trafic a énormément baissé. Ca a provoqué une détérioration du chemin de fer. Aujourd’hui, il est nécessaire de réhabiliter ce chemin de fer, de renforcer la plateforme et également les rails pour permettre de transporter un maximum de marchandises. Les rails ne sont plus uniformes. Il faut des rails beaucoup plus lourds pour pouvoir transporter des charges plus importantes à l’essieu. Il s’agit de voir aussi comment on peut prolonger cette voie.

Extension de cette voie qui pour l’instant va jusqu’à Kaya au nord de Ouagadougou ?

La voie va jusqu’à Kaya, mais entre Ouagadougou et Kaya, la voie n’est pas utilisée. Elle s’est beaucoup détériorée et il faut également réhabiliter cette partie. L’extension dont il est question, c’est d’aller au-delà de Kaya, d’aller à Dori, Tambao et même d’essayer de faire une jonction avec la boucle ferroviaire Dori-Niamey (Niger), Niamey-Parakou (Bénin) et Parakou-Cotonou. Notamment pour exploiter le manganèse de Tambao.

Et ce chemin de fer pourrait-il également servir à écouler l’uranium du Niger ?

Il y a quand même un choix à faire pour le gouvernement nigérien parce que si la boucle effectivement est réalisée, le Niger aura le choix entre un débouché par le Bénin ou par la Côte d’Ivoire.

Autre projet, un oléoduc entre Abidjan et Ouagadougou. Est-ce sérieux ?

Oui dans la mesure où l’oléoduc va bientôt jusqu’à Bouaké (Côte d’Ivoire) donc aller sur Ouagadougou n’est plus du domaine de l’impossible. Si la rentabilité est prouvée, il n’y a pas de raison qu’on ne le fasse pas.

Un oléoduc peut écouler environ 4 millions de litres par jour, soit l’équivalent de 130 camions-citernes. Est-ce que cela veut dire que ça soulagerait le trafic sur l’autoroute à venir ?

Sur l’autoroute, sur le train, dans la mesure où l’on prévoit de transporter des minerais. Si on peut dégager autant de possibilités pour les minerais, pour les marchandises diverses, pour les passagers, c’est cela de gagner.

De quelle façon un tel oléoduc pourrait intéresser le Mali ?

De deux façons, par un prolongement, une extension directement sur le Mali ; ou tout simplement un approvisionnement à partir du terminal qui se trouverait ou à Bobo Dioulasso (Burkina) ou à Bouaké.

Moins de camions-citernes, est-ce que ça ne veut pas dire aussi moins de rackets ?

C’est exact. On ne va pas parler de racket, on parlera de tracasseries routières, d’entraves à la circulation.

Un racket qui coûte quand même quelque 20 milliards de francs Cfa par an ?

C’est ce qu’on dit. J’ai fait la route l’autre jour d’Abidjan à Yamoussoukro et je dois dire qu’il n’y a plus tellement de postes de police. J’imagine que pour les transporteurs, tout cela est en train de devenir un mauvais souvenir.

Est-ce que cet oléoduc pourrait diminuer le prix du carburant à la pompe pour les consommateurs du Burkina Faso ?

Le prix du carburant n’est pas grevé par le transport uniquement. Il s’agit beaucoup plus d’une variation des cours mondiaux qui jouent sur le prix du carburant.

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