Par Alain Faujas Source: Jeune-Afrique
Certains jugent que c´est prématuré, mais les champions de la droite française avaient trop envie d´en découdre. L´affrontement entre l´ancien président Nicolas Sarkozy et François Fillon, celui qui fut son Premier ministre pendant cinq ans a commencé.
À ma droite, Nicolas Sarkozy. C´est lui, l´ancien président de la République, qui a ouvert les hostilités. Choisissant de transformer une défaite en victoire, il s´est invité à la réunion de crise qui s´est tenue le 8 juillet au siège parisien de l´UMP pour faire le point sur la situation des finances du parti, amputées de 11 millions d´euros par le rejet de ses comptes de campagne présidentielle par le Conseil constitutionnel. Ignorant ce grave pépin – dont il est quand même le premier responsable -, il a sauté sur l´occasion pour faire son retour en politique. Des militants hystériques l´ont accueilli rue de Vaugirard au cri de « Nicolas ! Nicolas ! » tandis que, pour la première fois depuis sa défaite du 6 mai 2012, son compte Twitter était réactivé. Le « lion en cage » décrit par ses amis est revenu dans l´arène. Devant trois cents parlementaires et cadres de l´UMP, il a annoncé sa décision de « rompre » avec son projet de se « retirer de la vie politique ».
Le message qu´il a délivré est sans ambiguïté. D´abord, il a martelé qu´il n´avait pas vraiment été battu : « Il faut être fier de ce que nous avons fait ensemble, François [Fillon]. » Pas la moindre autocritique, pas la moindre allusion aux élections (toutes) perdues depuis son arrivée à l´Élysée en 2007. Ensuite, il s´est posé en rassembleur, car « se diviser, c´est s´affaiblir », allusion à la guéguerre qui a opposé Fillon à Jean-François Copé pour le contrôle du parti. Mieux, il a refusé d´être classé à droite : il n´est, estime-t-il, « pas conservateur ». Enfin, il a disqualifié par avance d´éventuels rivaux issus de son camp en s´exclamant qu´il y aurait « quelque chose d´indécent à parler du rendez-vous de la présidentielle de 2017, alors que les Français souffrent ».
Aucun doute, donc, Sarkozy sera candidat à la primaire de l´UMP de 2016. Il veut prendre sa revanche sur François Hollande. La standing ovation qui a salué la fin de son intervention confirme que les militants en sont ravis. Mais que trois anciens Premiers ministres de droite, Édouard Balladur, Alain Juppé et François Fillon, se soient abstenus de se lever pour participer à cette liesse laisse à penser que l´ancien président rencontrera quelques obstacles dans son camp.
À ma gauche, François Fillon. L´ancien Premier ministre est sorti de la réunion du 8 juillet en grommelant : « Nicolas nous a donné une leçon, mais il nous a dit de faire tout ce qu´il nous a empêchés de faire pendant cinq ans. » Ou encore : c´est Sarkozy qui a « foiré sa campagne et planté les finances du parti ». Mais son silence en assemblée a laissé croire qu´il n´avait pas le courage d´affronter celui qui le traita un jour de « collaborateur ».
La riposte est venue le 11 juillet à La Grande-Motte, près de Montpellier, où il avait réuni six cents de ses partisans. Devant eux, il a martelé que « l´UMP ne peut pas vivre immobile, congelée, au garde-à-vous dans l´attente de l´homme providentiel ». Quand on perd des élections, on ne se cherche pas d´excuses et on se livre à une autocritique. Exercice auquel l´ancien Premier ministre, lui, ne rechigne pas. « Notre économie n´a pas été suffisamment modernisée, a-t-il reconnu. Notre modèle social n´a pas été repensé en profondeur, et notre pacte républicain est resté fragile malgré nos efforts pour faire reculer la délinquance. »
L’UMP et le FN irréconciliables
Bref, il présente Sarkozy comme un homme du passé qui n´a pas eu le courage de réduire les déficits, d´en finir avec les 35 heures ou de réformer l´organisation territoriale de la France. Mais il va plus loin et met en garde ceux qui veulent faire de l´UMP un « parti protestataire », voire populiste, qui épouserait « toutes les démagogies » et s´allierait « avec n´importe qui pour promettre n´importe quoi ». La stratégie à adopter face au Front national est la « différence d´approche irréconciliable » avec son concurrent. Ce qui lui permet de prendre une posture centriste délaissée par ce dernier : « Je hais la xénophobie, qui est une dégradation de l´âme, mais je dénonce l´angélisme qui la nourrit. » Conclusion : « L´UMP n´a pas vocation à ramper devant l´extrême droite. »
On ne s´étonnera pas qu´Éric Ciotti, député des Alpes-Maritimes et soutien de François Fillon, crédite celui-ci de trois atouts : « La sincérité, la vérité et la réforme. » On ne s´étonnera pas davantage qu´Henri Guaino, député des Yvelines et chantre de Sarkozy, ne voie dans le discours de La Grande-Motte que « perfidie » et « trahison affective ». Pas de surprise non plus de la part d´Alain Juppé – qui se verrait bien candidat de recours – quand il ironise : « Au moment où l´UMP a plus que jamais besoin d´unité et de solidarité, les meilleurs d´entre nous ne trouvent rien de mieux que d´échanger quelques gracieusetés et d´engager la bataille de 2017. Supergénial ! »
Prochain round dans un mois. François rassemblera ses amis dans la Sarthe le 28 août. Et Nicolas les siens à Arcachon le 1er septembre. Le match s´annonce indécis. Car si Nicolas l´emporte chez les militants, qui, pour les trois quarts d´entre eux, le veulent comme candidat à la présidentielle, 62 % des personnes interrogées par l´institut BVA pour Le Parisien souhaitent qu´il ne se représente pas. Pis, 53 % de celles que l´Ifop a sondées pour Paris Match ont de François un avis favorable, et seulement 42 % de Nicolas.
Comme l´a reconnu un partisan de ce dernier : « L´UMP, c´est fait ; reste à reprendre la France. » Ce n´est pas gagné.
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