Sanctions onusiennes: À quand la levée de l’embargo sur les armes et les diamants ?
Les Nations unies vont-elles lever, dans les mois prochains, l’embargo sur les armes et les diamants pour permettre à la Côte d’Ivoire de faire face aux différentes menaces, rassurer les investisseurs et accroître les ressources naturelles favorisant le développement ? C’est la question que l’on se pose à quelques semaines du renouvellement du mandat de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci).
Recevant, en juin, une délégation de l’Union interparlementaire, le président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro, a remis sur la table la question de l’embargo sur les armes. Pour lui, ‘’à partir du moment où le pays a renoué pleinement avec toute sa souveraineté et avec la normalité», cette mesure devrait être levée.
En novembre 2004, après les frappes des Forces de défense et de sécurité fidèles à Laurent Gbagbo, alors Président de la République, sur les villes de Bouaké et Korhogo, fief des Forces nouvelles, le Conseil de sécurité de l’Organisation des nations unies (Onu) a décidé de l’embargo sur les armes à travers la résolution 1572. Le point 7 de cette décision indique que‘’ tous les États prendront, pour une période de 13 mois, à partir de l’adoption de la présente résolution, les mesures nécessaires pour empêcher la fourniture, la vente ou le transfert directs ou indirects à destination de la Côte d’Ivoire, depuis leur territoire ou par leurs nationaux, ou au moyen d’aéronefs immatriculés sur leur territoire ou de navires battant leur pavillon, d’armes et de tout matériel connexe, notamment d’aéronefs militaires et autres matériels provenant ou non de leur territoire, ainsi que la fourniture de toute assistance, conseil ou formation se rapportant à des activités militaires’’. Cette mesure sera plusieurs fois reconduite.
L’embargo, selon les Nations unies, est une mesure prise en vue d’interdire l’entrée et / ou la sortie de certains produits spécifiques dans un pays donné. Dans le cas spécifique de la Côte d’Ivoire, l’embargo interdit le commerce des armes et l’exportation des diamants bruts.
Cette mesure a pour objectif de protéger la population et prévenir la reprise de la guerre en empêchant l’approvisionnement en armes des Forces de défense et de sécurité (Fds) et des Forces armées des forces nouvelles (Fafn).
S’il est vrai que cette mesure avait droit de cité lorsqu’il y avait deux armées face à face, aujourd’hui, avec l’unification de ces forces telle que définie dans les différents accords, l’embargo est-il encore d’actualité ?
L’embargo est-il encore d’actualité ?
Le 11 avril 2011 a consacré, après l’arrestation de l’ancien Président Laurent Gbagbo qui rechignait à reconnaître sa défaite, la fin de la crise en Côte d’Ivoire. Depuis, ce pays a renoué avec la croissance. De nombreux progrès ont été réalisés dans divers domaines. Reste maintenant aux autorités à consolider ces acquis.
Les points sur lesquels on devrait agir fortement sont la sécurisation des biens et des personnes et la défense de l’intégrité territoriale, afin de rassurer les investisseurs qui se bousculent aux portes de la Côte d’Ivoire. D’où la nécessité de la levée de l’embargo sur les armes pour permettre à l’Etat de mieux équiper les forces de l’ordre.
Pour le président de l’Assemblée nationale, ‘’c’est d’autant plus incompréhensible que le Mali qui est en guerre actuellement n’est pas sous embargo, la Guinée – Bissau n’est pas sous embargo. Et que c’est la Côte d’Ivoire qui, après tant d’efforts, continue de demeurer sous embargo’’.
Les arguments de l’expert indépendant des Nations unies
Autre réaction favorable à la levée de la sanction onusienne, est celle de l’expert indépendant de l’Onu, Doudou Diène. Dans un rapport sur la questions des droits de l’homme en Côte d’Ivoire, il a réitéré son appel à la levée de l’embargo sur les armes imposé à la Côte d’Ivoire depuis 2004 : ‘’La levée de l’embargo sur les armes imposé à la Côte d’Ivoire doit faire l’objet d’une révision urgente pour permettre de conforter la sécurité intérieure et de faire face aux risques de déstabilisation inhérents à la crise dans la région sahélo-saharienne’’.
La crise au Mali, même si elle a été jugulée, laisse planer quelques menaces sur les pays de la sous-région.
Mais pour certains, avant la levée de l’embargo sur les armes, il faut maîtriser les armes en circulation sur le territoire ivoirien. A ce niveau, il faut rappeler le travail fait par la Commission nationale de lutte contre les armes légères et de petit calibre (Comnat-Alpc). 5105 armes ont été collectées dans le cadre des opérations de dépôts volontaires, 4195 armes obsolètes ont été détruites et 8175 armes des forces régulières (Frci, police et gendarmerie) ont été marquées. Des efforts sont donc faits dans le sens d’une bonne maîtrise des armes en circulation.
Appuyer la Côte d’Ivoire dans son développement
À côté de l’embargo sur les armes, il y a celui sur le diamant. Le 15 décembre 2005, par la résolution 1643, le Conseil de sécurité des Nations unies, conformément au communiqué final de la réunion de Kimberly qui s’est tenue à Moscou, en Russie, les 15, 16, 17 novembre 2005, avait ordonné à tout Etat d’arrêter la collaboration avec la Côte d’Ivoire dans le domaine de ce minerai : ‘’Ayant pris note du communiqué final de la réunion plénière du Processus de Kimberley qui s’est tenue à Moscou, du 15 au 17 novembre 2005, et de la résolution que les participants au Processus de Kimberley ont adoptée à cette réunion afin d’arrêter des mesures concrètes visant à prévenir l’introduction de diamants en provenance de Côte d’Ivoire dans le commerce légitime de diamants, et conscient que le lien entre l’exploitation illégale des ressources naturelles, comme les diamants, le commerce illicite de ces ressources, et la prolifération et le trafic d’armes et le recrutement et l’utilisation de mercenaires est l’un des facteurs qui contribuent à attiser et exacerber les conflits en Afrique de l’Ouest’’.
Depuis, la Côte d’Ivoire est sous le coup de cette sanction. Pour les autorités ivoiriennes, les efforts faits en matière de sécurité, de réconciliation devraient ouvrir les portes de la levée de ces sanctions. La Côte d’Ivoire qui a amorcé une nouvelle phase de sa croissance a besoin de toutes ses matières premières.
Du 27 au 30 novembre 2012, Mme Thès Fatima, Secrétaire permanent du processus de Kimberly en Côte d’Ivoire, a fait entendre la voix de ce pays à une session plénière dudit Processus qui s’est tenue à Washington, aux Etats-Unis. Elle a apporté des précisions sur le système de contrôle interne des diamants ivoiriens.
La levée de l’embargo sur le diamant permettra à la Côte d’Ivoire de consolider les acquis obtenus avec l’arrivée au pouvoir du Président Alassane Ouattara. Plusieurs experts économiques parlent d’un bond prodigieux réalisé en seulement deux ans de sortie de crise. Les institutions de Bretton Woods avancent un taux de croissance de 9,8%. Il faut donc appuyer le gouvernement ivoirien engagé dans la lutte pour le bien-être de ses populations, donc dans le combat contre la pauvreté, cher aux Nations unies.
Le Conseil de sécurité des Nations unies qui doit, dans les prochains jours, annoncer la reconduction du mandat de l’Opération des Nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci), devrait se pencher sur la possibilité de la levée de l’embargo, à l’aune des efforts consentis par le gouvernement.
Etienne Aboua
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