Côte d’Ivoire – de l’alliance entre le PDCI et le RDR: Quiproquo ou mauvaise foi ?

ouattara-entretien

Par Diarra Cheickh Oumar – Libre Opinion

Que se sont exactement dit les présidents Bédié et Ouattara lorsqu’ils jetaient les bases du RHDP ? Quelle est réellement l’ipséité de l’accord dont ces deux partis phares de ce rassemblement sont librement convenus ? Etait-il question d’une fusion radicale et totale pour donner une seule entité politique ou alors d’une fusion dialectique, c’est-à-dire fondre circonstanciellement avec l’autre pour la conquête du pouvoir, tout en restant soi-même, en conservant ses valeurs, son identité ? De ces deux pentes discursives, la seconde nous semble la plus plausible, vu les déclarations des présidents Bédié et Ouattara et les autres leaders des partis membres du RHDP, lors des campagnes présidentielles de 2010 ; aussi les dernières sorties enflammées du président de la JPDCI, l’honorable Kouakou Konan Bertin (KKB) et le Secrétaire général du PDCI, le professeur Alphonse Djédjé Mady.

Comme le disait le président Bédié lui-même, il y a quelques semaines, « il fallait absolument mettre fin au règne d’un tyran, d’un régime violent et tortionnaire ». Pour ce faire, cette alliance était plus que nécessaire pour déboulonner et faire d’un objet de musée, le régime de Laurent Gbagbo. Dès lors, il n’y a plus d’ambiguïté : il est bel et bien ici question d’un rapprochement lié à une situation de dérive totalitaire, autocratique, de national chauvinisme et d’exclusion xénophobe qu’il fallait absolument arrêter pour l’intérêt supérieur de la nation ivoirienne. Ce but atteint, tout en exécutant la plate-forme de programme de gouvernement commun et ensemble, chaque parti, tout en restant inféodé aux autres au nom de l’accord signé, ne perd pas pour autant son identité, reste lui-même et est appelé à défendre son idéologie, ses valeurs, sa weltanschauung. Que donc, chaque parti signataire de cet accord réclame son identité, son extranéité relativement aux autres et affirme pour ainsi dire sa volonté de briguer et de conquérir le pouvoir d’État, cela ne devrait logiquement offusquer personne ni créer une crise de délirium trémens chez certains sujets se laissant aller à des invectives de toutes sortes dans des tabloïds aux ordres, fortement colorés politiquement. Dans une architectonique politique, les accords se font et défont au gré des intérêts du moment, chaque formation politique soucieuse d’être au pinacle, de se hisser au sommet de l’appareil de l’État. Sous le président Bédié, il y a eu le front républicain, quintessentiellement composé du RDR et du FPI ; sous le régime Gbagbo, a vu naissance le RHDP qui a triomphé lors des élections de 2010 et est aujourd’hui évanescent en raison de la boulimie de certains acteurs et leur manque de tempérance dans les manières et les propos. Dans une telle circonstance, que le PDCI dans son noble dessein de revenir aux affaires, lorgne dans le sens du FPI dans la perspective d’une alliance et vice versa, cela en mon sens, ne devrait pas créer un tel séisme amenant des extrémistes de tous bords à descendre aussi bas dans la poubelle. Dans une alliance qui doit être perçue comme une volonté de conglomération des forces politiques pour mieux faire face au défi du moment, personne n’est le valet de l’autre et il est loisible à chaque sensibilité politique de prendre son destin en main lorsqu’elle sent le moment venu.

Au lieu de vociférer dans tous les sens, de crier à hue et dia à la félonie, mieux vaut ménager sa monture pendant qu’il est encore temps. J’avais déjà prévenu sur l’intention sous-jacente et, pourquoi pas, le droit du PDCI de présenter un candidat lors des élections présidentielles à venir. Je comprends donc, pourquoi il y a tant de relâchements au sein du RDR, ce déficit paralysant de démocratie, ces manières cavalières et impolies de s’adresser aux militants qui ont payé, pour beaucoup, de leur vie pour que l’acquisition du pouvoir d’État soit une réalité. Or donc, on s’arc-boutait sur le ferment PDCI, sur une nouvelle complémentarité fonctionnelle avec le dinosaure PDCI ? Si c’est cela le calcul hypocrite, mieux vaut arrêter de bâtir des châteaux en Espagne, se dresser sur ses ergots et procéder à sa cure intérieure. Pour l’heure, c’est la seule alternative crédible. Même au pouvoir, ce n’est pas au RDR de décider de l’orientation politique que veut se donner le PDCI. Qu’on s’occupe de ce qui nous regarde et qu’on arrête de perdre inutilement du temps à s’adonner à des broutilles et des trivialités. De même qu’un Cissé Bacongo, Ahmed Bakayoko, Kandia Camara, Mamadou Sanogo et tutti quanti, savourent les délices du pouvoir, se livrent, pour certains, impunément à des excès, le professeur N’dri Yoman, Kouakou Konan Bertin, Évariste Méambli, Amichia François etc., y ont également droit. Comme le disait à juste titre, le professeur Alphonse Djédjé Mady, « Par essence, un parti politique est une association dont le but est de conquérir le pouvoir d’Etat par les voies démocratiques quand on est dans un système censé être démocratique comme en Côte d’Ivoire. Ce qui devrait interpeller les gens, c’est lorsqu’un parti n’a pas de candidat ». Arrêtons donc ce débat aux ras des pâquerettes, mieux, sans substance. Le véritable chantier, pour le RDR, en mon sens, doit être, pour l’heure, la réorganisation du parti sur des bases nouvelles, redonner confiance aux militants désabusés, envoyer paître cette oligarchie affairiste à la tête du parti et la bordée de transhumants politiques facticement érigés en conseillers, prêts à rejoindre l’ennemi en cas de banqueroute. Que Dieu nous garde !

Diarra Cheickh Oumar
E-mail : diarraskououmar@yahoo.fr

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