Ouvrir les yeux (4): de la survie du RHDP

alassane-ouattara-tribune-25-janvier-2011

Je retourne au pays après quatorze mois d’absence et j’ouvre les yeux. Et, le constat est clair, le président de la république devrait lui aussi ouvrir les yeux pour voir ce que j’ai vu ….

À lire les journaux proches du RDR et du PDCI, et vu les propos acrimonieux tenus par les candidats des deux partis qui s’affrontaient dans des circonscriptions électorales lors des régionales et municipales du 21 avril, l’on comprend aisément que le RHDP est mort de sa belle mort. Point n’est besoin de le nier, ni de le justifier d’ailleurs.

Hormis les actes de violence aiguë mais isolés, ce sont les propos discourtois lancés comme des flèches empoisonnées qui inquiètent: le PDCI serait un éternel perdant, un parti de loosers, qui devrait arrêter ses jérémiades, selon le très Patriote. C’est très courtois en effet de traiter ainsi un allié politique de premier plan, sans le vote massif duquel M. Ouattara n’aurait jamais connu de destinée présidentielle en 2010-2011. Au premier tour, il n’avait recueilli que 32% des suffrages exprimés; à ces dernières municipales et régionales, son parti ne revendique qu’environ 34% des suffrages. Si l’on estime dans son entourage que le PDCI est un poids mort qui ne peut tirer le RDR que vers le bas à la prochaine présidentielle, c’est tant mieux!

Pourtant, il suffit d’ouvrir les yeux pour savoir que le PDCI recueille au moins 31% des voix exprimées lors de ces dernières élections locales, après avoir recueilli seulement 25% à la dernière présidentielle. Ceci est une nette progression et, si en 2015 le PDCI tournait le dos à M. Ouattara – qui caresse le rêve de se représenter au suffrage des Ivoiriens -, celui-ci ne sera jamais réélu. C’est simple à comprendre en effet: la réconciliation nationale n’a jamais été amorcée, il n’y a même pas de volonté politique affichée clairement de part et d’autre pour y mener; le FPI fait déjà des appels du pied en direction du parti sexagénaire en vue d’une alliance politique pour renverser M. Ouattara en 2015. À l’allure où vont les invectives des journaux du RDR, personne ne sera surpris de voir que le parti de M. Bédié écoute d’une oreille attentive la cour assidue de Miaka Ouréto. Si ces deux partis s’entendent, même verbalement, en 2015, ils infligeraient à M. Ouattara une humiliation électorale au second tour. Le candidat du RDR rentrerait chez lui comme simple citoyen après le second tour avec moins de 40% des voix, c’est-à-dire, moins de voix que n’avait recueillies M. Gbagbo en novembre 2010.

Si telle est la perspective que vise le RDR et ses journaux, le plan est parfaitement arrêté et marchera à coup sûr. Par contre, si le parti au pouvoir compte aller plus loin, qu’il commence à ménager sa monture dès à présent. Il suffit, pour cela, de commencer à faire preuve de courtoisie envers son allié du PDCI, et de renforcer l’alliance du RHDP avec les autres partis qui ont signé l’accord de Paris. Et cela ne lui coûterait rien du tout! En plus, il faudrait faire plus et mieux pour rasséréner tous les militants du RDR et les électeurs du RHDP déçus de la politique menée jusque-là par le gouvernement, qui se limite à la course vers la croissance à 10% tandis que les Ivoiriens sont dans la misère et le chômage, et que la vie devient de plus en plus chère, et que les fonctionnaires sont tous en grève ou ont l’intention d’entrer en grève bientôt, tout cela pendant que certains barons d’une aristocratie toute nouvelle s’arrachent pour eux seuls tous les postes nominatifs et électifs que la nation peut engendrer. Il convient en effet de ménager non seulement les partis alliés, mais aussi les électeurs qui ne sont la propriété privée de personne. Si le RDR méprise les uns ou les autres, il s’en repentira amèrement dans deux ans.

Quand bien même le PDCI refuserait de donner suite aux sollicitations du FPI d’ici 2015, nous savons d’ores et déjà que personne ne pourra triompher à la présidentielle de 2015 dès le premier tour, si le PDCI et le RDR y vont en rangs dispersés comme en 2010. Pour autant, le FPI ne sera pas au second tour car ce parti est très affaibli depuis sa chute brutale du 11 avril 2011. Néanmoins, il n’y a aucun doute que le FPI fera bloc derrière le cheval du PDCI au second tour contre M. Ouattara quelle que soit la tête du candidat du doyen des partis politiques ivoiriens. Dans un tel cas de figure, le règne de M. Ouattara aura été un bref intermède de 5 ans et il n’y a que son parti, le RDR et ses journaux qui soient à féliciter pour avoir réussi une telle prouesse. L’arrogance est loin d’être une qualité en politique. Passe encore de narguer ses adversaires, mais se montrer discourtois et arrogant envers ses partenaires est franchement suicidaire. À moins que l’on se convainque de ce que, tout bonnement, même dans son sommeil, les Ivoiriens iront réveiller M. Ouattara pour le supplier de rempiler pour 5 autres années, puisqu’il a été plébiscité par ses concitoyens reconnaissants quand il était dans les bras de Morphée! Après tout, tout est possible dans la mythologie d’Amadou Soumahoro.

Famahan SAMAKÉ. – Source: Lebanco.net

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