Alors, il a eu une merveilleuse idée: s’allier au Pdci. D’abord pour exister, et ensuite pour isoler le Rdr. Les stratèges du Fpi sont bien placés pour savoir que dans ce pays, il faut une alliance de deux des trois principaux partis qu’étaient le Pdci, le Rdr et le Fpi pour gouverner.
Je dis bien « étaient », parce que, au rythme où vont les choses, le Fpi sera bientôt un parti très squelettique. Je ne suis pas sûr qu’ils seront encore nombreux, dans quelques mois, à croire que Laurent Gbagbo reviendra au milieu d’une nuée d’anges pour s’installer dans le fauteuil présidentiel. Il existe encore un noyau d’irréductibles fanatiques, mais il se rétrécie de jour en jour.
Donc, le Fpi veut faire alliance avec le Pdci. Son argument est à peu près celui-ci: vous vous êtes alliés au Rdr, grâce à vous il est arrivé au pouvoir, mais il ne vous donne que les miettes du gâteau. Venez donc avec nous. Des personnes frustrées au Pdci pourraient être tentées de tendre une oreille intéressée aux chants de sirène du Fpi, mais elles feraient mieux de réfléchir par deux fois avant de déboucher leurs tympans.
D’abord, que gagnerait le Pdci à s’allier à un Fpi dont l’essentiel de l’idéologie repose sur la violence, un parti qui refuse absolument de reconnaître le président que le Pdci a contribué à faire élire, parce qu’il estime que le pouvoir de Gbagbo lui vient de Dieu ? N’oublions pas qu’aux temps d’Houphouët-Boigny et de Bédié, c’est le Fpi qui a fabriqué la Fesci qui a institutionnalisé la violence à l’école, que c’est par la violence qu’il a acquis le pouvoir, que c’est dans la violence qu’il a régné, et que c’est par la violence qu’il a refusé de respecter le choix des Ivoiriens lors de la dernière élection présidentielle. Le Fpi essaie de justifier l’utilisation de la violence par la survenue de la rébellion en 2002. Mais souvenons-nous : le charnier de Yopougon. C’est le jour où Gbagbo présidait son premier Conseil des ministres, en 2000, qu’il a été découvert. N’oublions pas les morts des législatives de 2000, les femmes violées à l’école de gendarmerie, le « complot de la cabine téléphonique ». Je vous fais l’économie de tous les crimes commis par le Fpi après 2002, mais n’oublions pas les escadrons de la mort, les étudiants transformés en assassins, Badolo sauvagement assassiné par la Garde républicaine, Habib Dodo pendu par des étudiants sur le campus, la jeunesse complètement abrutie dans les « agoras » « parlements » et « Sorbonne », véritables écoles de haine dont nous continuons de subir les conséquences, le système éducatif complètement saccagé, l’inversion de toutes les valeurs, tous les crimes commis dans la période post-électorale…
Rappelons les différentes alliances du Fpi. D’abord avec le Rdr, en 1994, pour faire tomber le Pdci. Il a aussitôt lâché le Rdr lorsque ce parti est tombé à la suite du coup d’état de 1999. Qu’a dit Gbagbo ? Qu’une alliance sert juste à parvenir à ses fins. Une fois qu’on y est arrivé, on peut la piétiner. Le Fpi s’est donc allié aux putschistes. Et c’est la période pendant laquelle les Ivoiriens, en général, et les militants du Rdr, en particulier, ont le plus souffert. Après avoir roulé le pauvre Guéï dans la farine pour parvenir au pouvoir, le pouvoir Fpi l’a froidement fait assassiner.
Vous connaissez peut-être l’histoire de la grenouille et du scorpion. Sinon, la voici. Un scorpion avait besoin de se rendre sur l’autre rive d’un cours d’eau. Comme il ne savait pas nager, il demanda à une grenouille qui passait par là de le prendre sur son dos et l’aider à le traverser. La grenouille lui répondit qu’elle ne pouvait pas prendre ce risque parce qu’elle savait que le scorpion la piquerait de son dard et qu’elle en mourrait. Le scorpion jura à la grenouille qu’il ne ferait jamais cela à une si gentille bête qui l’aura aidé à traverser le cours d’eau. à force d’arguments, la grenouille accepta de prendre le scorpion sur son dos. Mais pendant la traversée, le scorpion piqua la grenouille. Et celle-ci lui demanda : « Pourquoi as-tu fait cela, surtout que lorsque je mourrai, toi aussi tu mourras, noyé ? » Et le scorpion de répondre que ce n’était pas sa faute : « Je suis scorpion, et ma nature est de piquer tout le monde, même ceux qui m’aident. Je n’ai pu m’empêcher de te piquer, même si en le faisant, je me condamnais à mort. »
Si quelqu’un au Pdci trouve utile de parler avec un parti tel que le Fpi, c’est qu’il manque de respect, et pour son propre parti, et pour la Côte d’Ivoire. Cela dit, si le Pdci estime qu’il est mal servi par le Rdr, que ces deux partis s’asseyent pour discuter, comme cela se fait entre membres d’une même famille, dans la maison de leur père commun, à Yamoussoukro. Mais entrebâiller la porte pour que le Fpi y glisse un orteil, sous prétexte que l’on est frustré, serait suicidaire.
Écrit par Venance Konan
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