Dans son nouveau rapport sur la Côte d’Ivoire, publié ce jeudi, l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch dénonce les promesses d’une justice équitable non tenues par le président ivoirien Alassane Ouattara.
Pourquoi les pro-Ouattara soupçonnés de crimes durant la crise-pots-électorale de 2010-2011 n’ont toujours pas répondu de leurs actes ? C’est la question que soulève l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch.
Dans son nouveau rapport sur la Côte d’Ivoire, intitulé Transformer les discours en réalité, l’ONG critique le président Alassane Ouattara qui, selon elle, n’a pas respecté ses promesses d’instaurer une justice équitable dans le pays. Deux ans après la crise post-électorale, les pro-Ouattara soupçonnés de crimes durant les troubles qui ont ensanglanté le pays n’ont toujours pas été mis sur le banc des accusés. Or depuis son investiture à la tête du pays en mai 2011, le président ivoirien n’a cessé de réitérer qu’il s’engageait à traduire en justice tous les responsables de crimes, indépendamment de leur affiliation politique ou de leur grade militaire.
Des actes et non des discours
A ce jour, aucun membre des forces pro-Ouattara ne figure parmi les 150 personnes inculpées pour des crimes commis durant les violences post-électorales. L’organisation de défense des droits de l’homme dénonce aussi le fait que les accusés n’aient jusqu’à présent pas été jugés. « Ce qui constitue un réel problème », selon Philippe Bolopion, directeur de Human Rights Watch auprès de l’ONU, contacté par Afrik.com.
De leur côté, depuis la fin de la crise ivoirienne, les pro-Gbagbo n’ont cessé de dénoncer une justice des « vainqueurs » en Côte d’Ivoire. Ils réclament toujours la libération de l’ancien président ivoirien, incarcéré à la Haye, depuis novembre 2011. Ils souhaitent aussi que tous les responsables de l’ancien régime, dont l’ex-Première dame Simone Gbagbo, interpellés et placés en détention un peu partout en Côte d’Ivoire, soient libérés.
Une justice à sens unique
Human Rights Watch pointe notamment du doigt une justice à sens unique. Or, « d’après nos recherches il n’y a aucun doute que les forces de Ouattara ont commis des exactions durant la crise post-électorale surtout dans la phase finale de la crise. Il y a donc de graves violations des droits de l’Homme qui leur sont imputées ! », note Philippe Bolopion. « Aujourd’hui nous attendons des actes et non des discours », insiste-t-il. « Les autorités ivoiriennes n’ont pas été à la hauteur de leurs promesses. On ne voit même pas les premiers pas entrepris pour la mise en place d’une justice équitable ».
L’ONG réclame à la Cellule spéciale d’enquête, chargée de mener des enquêtes judiciaires sur les crimes post-électoraux, « d’utiliser le rapport de la Commission nationale d’enquête pour réaliser un exercice de cartographie. Ce qui permettrait d’effectuer un panorama détaillé des crimes commis région par région durant la crise et d’identifier des personnes suspectes. »
Les partenaires de la Côte d’Ivoire appelés en renfort
L’organisation appelle aussi les autorités ivoiriennes et les bailleurs de fonds qui se sont engagés à soutenir la Côte d’Ivoire à protéger les juges qui mènent des enquêtes. Selon elle, « il faut aussi convaincre ceux qui ont été victimes d’exactions de venir témoigner. Pour cela, il faut leur redonner confiance en leur justice. » La Côte d’Ivoire est en effet loin d’être apaisée. Le processus de réconciliation nationale est en marche. Mais le chantier est colossal. Les plaies de la crise post-électorale sont toujours saillantes.
D’après Param-Preet Singh, l’un des auteurs du rapport, « l’absence de réformes majeures visant à fournir le soutien nécessaire pour les enquêtes et les poursuites freine les progrès en matière de lutte contre l’impunité pour les crimes internationaux graves perpétrés en Côte d’Ivoire ». Il estime que « les partenaires internationaux de la Côte d’Ivoire devraient travailler aux côtés du gouvernement pour fournir une assistance là où elle s’avère nécessaire, et user de leur influence diplomatique pour renforcer le message selon lequel l’impunité n’est pas une solution envisageable ».
Afrik.com
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