Trois attaques en une dizaine de jours. Et toujours dans la même région : l’Ouest de la Côte d’Ivoire, plus précisément à la frontière ivoiro-libérienne.
La dernière remonte au samedi 23 mars. Cette fois, les assaillants se sont signalés dans le village de Petit Guiglo, dans le département de Blolequin. Avant Petit Guiglo, le commando a fait parler la poudre le jeudi 21 mars dans le village de Tiobly, dans le département de Toulepleu. Une semaine plus tôt, soit le 13 mars, c’est le village de Zilebly, dans le département de Bloléquin, qui était attaqué. Des attaques en série qui plongent à nouveau l’Ouest dans le spectre des violences meurtrières. On dénombre en effet plus d’une dizaine de morts et encore des déplacés de guerre.
Chaque fois, les Forces républicaines de Côte d’Ivoire ( Frci) ont riposté et mis en déroute les assaillants, dont certains ont été tués et d’autres arrêtés. Pour énergiques qu’elles soient, ces ripostes n’ont jusque-là pas réussi à stopper le cycle de violence qui déchire l’Ouest. C’est la preuve que le tout militaire a montré ses limites dans la résolution du mal qui gangrène la frontière ivoiro-libérienne. Le gouvernement et le président Alassane Ouattara devraient envisager autre chose. Cela passe par un diagnostic rigoureux et minutieux de la situation à l’Ouest.
Au delà des répliques musclées des Frci qui permettent de neutraliser momentanément les assaillants, les autorités devraient s’interroger sur les raisons profondes ou les motivations de ces agressions récurrentes mais aussi sur les auteurs de ces attaques bien loin d’être fortuites. Du moins si l’on en croit les sorties médiatiques d’un mystérieux mouvement qui revendique ces attaques à répétition qui endeuillent la région.
Dans des déclarations rendues publiques les 13 et 24 mars, ce commando, dénommé le Mouvement ivoirien des Wê pour le retour à l’Ouest( Miwro), revendique les récentes attaques, notamment celles de Tiobly et Petit Guiglo. Pour leur leader, un certain Flavien Guéi, ces actions visent à interpeller les autorités ivoiriennes et par-delà elles, l’opinion publique, sur la nécessité de prendre à bras le corps la question foncière qui préoccupe les originaires de l’Ouest.
AU COEUR DES ATTAQUES : LA QUESTION FONCIERE
D’ailleurs, la dénomination de leur mouvement en dit long sur les motivations de ce commando. En effet, le Miwro justifie ces agressions récurrentes par sa détermination à bouter hors de leurs terres, ceux qui les ont occupées au point d’y faire la pluie et le beau temps. « Ce peuple a décidé de sécher ses larmes lui-même, de bander ses muscles et de reconquérir sa terre, ses maisons et ses biens et de sécuriser ses parents… », lançaient les animateurs de ce mouvement dans leur déclaration du mardi 19 mars.
Ces combattants, qui se réclament des peuples Wê et Dan, ont de nouveau interpellé, le dimanche 24 mars, les autorités sur les raisons de leurs actions de guerre. « Dans notre deuxième déclaration, nous avions lancé un ultime appel à la négociation et à la prise en compte des revendications de nos parents, revendications connues du régime(…). Nous en voulons pour preuve la sortie d’une de ses proches, en l’occurrence notre soeur la ministre Anne Ouloto.
Sortie qui faisait cas du problème de nos terres et du repeuplement de l’Ouest, sa région natale et politique, par des étrangers…. ». Ceux qui endeuillent l’Ouest depuis quelques jours sont, donc, des fils du terroir qui posent le problème de leurs terres qui seraient occupées par des personnes non originaires de la région. A l’origine donc de ces agressions répétées, se trouve la question du foncier. Et par-delà, la question de la survie culturelle du peuples Wê et Dan de l’Ouest.
La source du mal étant connue, il urge d’y apporter une réponse durable, définitive. Et cela passe inévitablement par la prise de décisions courageuses, même si celles-ci devaient se révéler douloureuses. On ne peut faire d’omelette sans casser des œufs, dit l’adage. Le chef de l’État devra donc s’attaquer vigoureusement à l’équation du foncier dans l’Ouest. D’une part, en mettant en mission des cadres influents de la région ; lesquels auront pour objectif de prendre langue avec leurs « frères » qui font parler la poudre au nom du droit à la propriété foncière.
Et cela, loin des caméras. Ceux-ci pourraient trouver avec leurs « parents » un modus vivendi susceptible de régler durablement l’épineuse équation du foncier à l’Ouest. D’autre part, le gouvernement devra sortir du tiroir les réflexions qu’il a impulsées depuis le séminaire gouvernemental du 25 juin 2012 à Yamoussoukro. Que sont en effet devenues les résolutions dudit séminaire gouvernemental qui s’est tenu du temps où Jeannot Ahoussou Kouadio était Premier ministre ?
Par ailleurs, où en est-on avec les conclusions de l’atelier sur le foncier qui s’est tenu les 4 et 5 octobre 2012 à Bassam et qui était l’aboutissement des travaux du comité technique interministériel mis en place au séminaire gouvernemental de Yamoussoukro ? Jeannot Ahoussou parti, ces réflexions semblent avoir été jetées à la poubelle. Et voilà que les dernières attaques de l’Ouest viennent rappeler aux gouvernants, la nécessité de les déterrer afin de s’en inspirer pour désamorcer durablement la bombe qui menace de faire imploser l’Ouest.
Assane NIADA
Source L’inter
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