Djotodia, l’autocrate à l’école de Patassé et Bozizé

0,,16698166_303,00

La nouvelle tribune

Le chef des rebelles de la Séléka, Michel Djotodia, s’est autoproclamé président de la République centrafricaine après le coup d’Etat du dimanche 24 mars. Vu de Cotonou (Bénin), « la Centrafrique n’est pas sortie de l’auberge ».

Les engagements du nouveau président centrafricain, Michel Djotodia, ses premiers actes et l’histoire de la succession au pouvoir en Centrafrique ne rassurent guère quant à l’avenir du pays, avec la Séléka aux commandes.

Quelle sera la suite des événements ? C’est bel et bien la question qui taraude les esprits depuis que, ce dimanche 24 mars 2013, les rebelles de la Séléka ont mis fin au régime du désormais ex-président François Bozizé. Mais l’analyse de la situation suscite beaucoup de réserve et alimente même le pessimisme.
Les premiers pas du nouvel homme fort du pays, Michel Djotodia, l’ambiguïté de son discours, une analyse de la situation et un regard rétrospectif sur l’histoire politique de la Centrafrique fondent ce pessimisme. Et l’on ne commettra pas un péché en pensant que ce n’est pas sous l’ère Séléka qu’un nouveau jour plein d’espoir se lèvera en Centrafrique, pour le bonheur de tous les Centrafricains.
Publicité

Ingrédients de l’autocratie

D’une pseudo-démocratie à une transition autocratique. Ainsi peut-on qualifier la Centrafrique dans son état actuel. François Bozizé, qui est arrivé au pouvoir en 2003 par un coup d’Etat, après avoir renversé le régime d’Ange-Félix Patassé, ne pratiquait depuis, dans le pays, qu’un simulacre de démocratie, avec à la clé une gestion patrimoniale du pouvoir. Sa gouvernance n’a pu permettre aux Centrafricains de sortir de la misère, alors que le pays est riche en ressources minières, notamment l’uranium. Quant aux différentes élections présidentielle et législatives, on sait les conditions dans lesquelles il les a remportées.
Michel Djotodia, qui a mis fin à cette pseudo-démocratie de Bozizé, instaure, lui, une autocratie. Et ses premières décisions en témoignent. A l’image de tous les putschistes africains, Djotodia a décidé de suspendre la Constitution, de dissoudre le Parlement. Conséquence, il veut désormais légiférer, et ce jusqu’à la fin de la transition, dans trois ans, par décrets et ordonnances dans la conduite des affaires du pays. Quel bon élève ! Djotodia a appliqué malheureusement avec succès le mode opératoire des putschistes africains, une fois qu’ils ont pris le pouvoir. Ainsi, pendant les trois prochaines années, les Centrafricains devront vivre selon les humeurs, les caprices et les lubies de Djotodia et des autres hommes forts de la Séléka. Cette nébuleuse qui n’a visiblement pas encore livré tous ses secrets.

Dichotomies
Trois contradictions entre les paroles de Djotodia et ses actes interpellent.

Primo. « Nous nous engageons à conduire désormais les destinées du peuple centrafricain pendant cette période de transition consensuelle de 3 ans, conformément aux accords politiques de Libreville. » C’est en substance ce qu’a affirmé le putschiste et président autoproclamé, lors d’un discours à la presse, lundi dernier. C’est ce qui justifie d’ailleurs le fait qu’il ait maintenu Nicolas Tiangaye, nommé Premier ministre dans le cadre des accords de Libreville, à son poste. Ce vœu de voir les accords de Libreville mis en application par le Séléka, Martin Ziguélé, leader du plus grand parti politique centrafricain, l’a exprimé dans une interview qu’il a accordé à RFI, mardi 26 mars. Mais les accords de Libreville que Djotodia s’engage à respecter, il les a déjà violés en suspendant la Constitution du pays.

Secundo. Michel Djotodia a promis une « transition consensuelle ». Cela suppose que toutes les forces du pays (politique et civiles) doivent être associées à la prise des importantes décisions. Mais on n’a pas vu la classe politique et la société civile associées à la décision de suspendre la Constitution et de légiférer par décrets et ordonnances.

Tertio. Les accords défendent aux acteurs de la transition d’être candidat à la présidentielle de 2016. Pourtant, à ce propos, l’interview de Djotodia à RFI, lundi 25 mars, dit tout sur ses véritables ambitions. « Je n’ai pas dit que dans trois ans, je remettrai le pouvoir. J’ai dit que d’ici trois ans nous allons organiser des élections libres et transparentes avec le concours de tous les acteurs. » Ainsi Djotodia a répondu à la question de notre confrère de savoir si, dans trois ans le Séléka va organiser les élections et remettre le pouvoir.

« Centrafrico-pessimisme »

Djotodia est donc venu pour aller à l’école de Patassé et Bozizé. Prendre le pouvoir par les armes, organiser des simulacres d’élections et se faire élire Président de la République. S’ensuivra alors non pas une gouvernance pour contenter les Centrafricains, mais plutôt pour contenter ses proches et ses acolytes. Au finish, les acteurs politiques, la société civile et le peuple se feront berner. Bonjour aux frustrations. Recours encore aux armes.
L’on a des raisons d’émettre des réserves quant à leur capacité de réunir tous les acteurs autour des vrais problèmes de la Centrafrique afin d’en trouver des solutions durables. Et sans être trop prétentieux, l’on peut affirmer que le régime putschiste de Djotodia ne pourra pas mettre fin au « centrafrico-pessimisme » d’une bonne partie des observateurs. La Centrafrique n’est pas sortie de l’auberge.

CPI – La Chute de Bozizé, une chance pour Bemba ?
MIS EN LIGNE PAR CONNECTIONIVOIRIENNE.NET LA RÉDACTION · 27 MARS

Par Tshieke Bukasa | journaldebangui.com

Dans les compartiments de la Cour Pénale Internationale (CPI) depuis vendredi 22 mars dernier, le général Bosco Ntaganda comparait pour la première fois ce mardi 26 mars 2013 devant ses juges à La Haye(Pays-Bas). Au menu de cette audience: l’identification de l’accusé, l’information de ses crimes, l’énumération de ses droits (choix de la langue, etc.). Ce, avant l’audience de confirmation des charges lui imputées. Le dernier développement de la crise centrafricaine, marqué par la fuite de l’ancien homme fort de Bangui, François Bozizé, depuis samedi 23 mars 2013, pourrait avoir des effets sur un autre dossier de La Haye intéressant particulièrement les Congolais: le procès Jean-Pierre Bemba. Ce dernier, rappelons-le, est accusé auprès de la justice internationale pour des crimes qu’auraient commis ses troupes lors d’une intervention dans la capitale centrafricaine, entre 2002- 2003, pour sauver le fauteuil du défunt président, Ange-Félix Patassé, menacé par son tombeur d’antan, François Bozizé, lui-même aujourd’hui déchu.

Pour avoir aidé son «ennemi» à se maintenir au pouvoir pendant quelques temps, Bozizé était assurément en droit de garder une dent contre (e leader du MLC. En tout état de cause, l’intrigue Bemba à la Cour Pénale Internationale est devenue aussi l’affaire de Bozizé. Alors que l’opinion internationale était largement mobilisée sur la plainte des organisations de droits de l’homme contre le sénateur et président du MLC pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, des pillages et des viols en RCA, on croit savoir que les témoins étaient encouragés par l’Etat centrafricain. Par ailleurs, on soupçonnait même ceux-ci d’être du même bord politique que François Bozizé. Sa chute, autant que les conséquences qui vont en découler, et compte tenu de tout ce qui s’est passé le week-end dernier à Ban- gui, il faut craindre que les témoins ne soient plus suffisamment motivés pour porter de coups au plus célèbre détenu congolais de La Haye, Jean-Pierre Bemba Gombo. Cette appréhension s’accentue davantage dès lors que c’est le président fugitif qui assurait parfois la sécurité des témoins, voire les prenait n charge. Maintenant que la situation a sensiblement changé sur terrain, l’idée de voir ces auditeurs se bousculer au portillon s’effrite de plus en plus. D’où la chance du Chairman du. MLC de voir la balance pencher en sa faveur…
Il convient de rappeler qu’à la suite du refus de certains témoins de Jean-Pierre Bemba de se rendre à La Haye, les juges avaient demandé de suspendre le procès afin de permettre à toutes les parties de s’organiser pour permettre au procès de se dérouler dans de bonnes conditions. Maintenant que les conditions sont réunies, les juges ont instruit le greffier à prendre toutes les solutions utiles pour faciliter l’organisation matérielle pour des vidéoconférences avec les témoins qui refusent de déposer à la Haye.

[Facebook_Comments_Widget title=”” appId=”144902495576630″ href=”” numPosts=”5″ width=”470″ color=”light” code=”html5″]

Commentaires Facebook