Centrafrique: les rebelles sur la route de Bangui
Nouvel Observateur
LIBREVILLE (AFP) – Les rebelles centrafricains du Séléka ont forcé vendredi à la mi-journée le dernier verrou sur la route de Bangui, avec l’intention d’entrer dans la capitale centrafricaine où ils ont appelé les populations « au calme ».
« Nos troupes viennent de prendre Damara », barrage tenu par les troupes de la force africaine à 75 km au nord de Bangui, a déclaré à l’AFP depuis Paris l’un des porte parole du Séléka, Eric Massi.
« Nous appelons tout le monde, civils et militaires, au calme en attendant l’arrivée de nos troupes à Bangui, afin d’éviter des combats inutiles », a poursuivi M. Massi.
« Il y a eu des tirs sans faire de blessés, les rebelles ont forcé le barrage (de Damara) et sont passés » vers 12H00 (11H00 GMT) locales, a expliqué une source au sein de la Force militaire des Etats d’Afrique centrale (Fomac), dont les hommes étaient positionnés sur ce barrage.
« Ils sont sur la route de Bangui. Nous sommes en alerte maximum », selon cette même source.
Toutefois, un porte-parole de la présidence centrafricaine a démenti à la radio nationale l’arrivée des rebelles: « Le verrou de la CEEAC (Communauté économique des Etats d’afrique centrale) à Damara n’a pas sauté. Je viens au nom du président de la République demander aux habitants de Bangui de garder le calme, la tranquillité et de vaquer à leurs occupations. Ils ne doivent pas céder à la panique ».
« Il est disposé à faire la paix et non à faire couler le sang. Il tend toujours la main au Séléka », a-t-il conclu.
Le président François Bozizé, arrivé au pouvoir par les armes en 2003, ne s’est pas prononcé. Selon l’opposition centrafricaine à Paris, ce dernier a effectué un voyage éclair en Afrique du sud, l’un de ses principaux soutiens, voyage confirmé ni par Bangui ni par Pretoria.
L’annonce de l’arrivée probable des rebelles a semé un début de panique dans Bangui. « Tout le monde rentre chez soi. Les élèves ont été libérés des cours, On est inquiets », a témoigné une commerçante sous couvert d’anonymat.
Au port de Bangui, des « centaines de gens » tentaient de traverser le fleuve Oubangui pour rallier la République démocratique du Congo (RDC) voisine, à bord des pirogues qui font régulièrement la navette, selon un piroguier sur place.
Toutefois en fin d’après-midi, la situation s’était calmée, selon un habitant.
La localité de Damara était considérée par la Communauté économique et monétaire des Etats d’Afrique centrale (Cemac, qui fournit les troupes de la Fomac) comme « la ligne rouge » à ne pas franchir pour les rebelles du Séléka.
Ce barrage était tenu par des soldats tchadiens et gabonais, selon cette source au sein de la force africaine, qui n’a pas précisé leur nombre.
Plusieurs barrages de l’armée et de la gendarmerie centrafricaine sont installés sur la route menant de Damara à Bangui. Mais ces forces centrafricaines sont notoirement mal-équipées et peu efficaces, et avaient été balayées lors de la précédente offensive du Séléka en janvier plus au nord du pays.
Des troupes sud-africaines, appelées par le président François Bozizé dans le cadre d’un accord de défense, sont positionnées au nord de la capitale, près du « PK 12 » (point kilométrique 12) qui est la véritable porte d’entrée de la ville.
Interrogé par l’AFP, un porte-parole du ministère de la Défense sud-africain a réagi dans un langage diplomatique: « Notre opération reste la même. Nous sommes là pour nous protéger ainsi que notre équipement et faire en sorte qu’il ne tombe pas dans de mauvaises mains. Le mandat est le même –formation (des soldats centrafricains) — comme le prévoit l’accord ».
Quelque 250 soldats français se trouvent actuellement à Bangui, dans la zone de l’aéroport, situé au nord de la ville. Mais lors de la précédente offensive rebelle en janvier dernier, le président français François Hollande avait précisé qu’ils n’étaient là que pour défendre les « ressortissants et intérêts français ».
La Fomac, constituée de Tchadiens, Gabonais, Camerounais et Congolais (Brazzaville) compte environ 500 soldats.
Dimanche, la rébellion du Séléka avait donné 72 heures au pouvoir pour respecter les accords de Libreville, signés le 11 janvier dernier.
Parmi les points d’achoppement figurent la libération de prisonniers politiques, la présence des troupes sud-africaines et ougandaises dans le pays et l’intégration des combattants Séléka dans l’armée.
Mercredi soir, le président Bozizé a signé deux décrets portant sur ces revendications, et a notamment fait libérer « tous les prisonniers politiques et de guerre mentionnés dans les accords de Libreville »
Toutefois, le colonel Djouma Narkoyo, importante figure de la rébellion, avait estimé insuffisant le geste du chef de l’Etat.
Parallèlement à l’offensive sur Bangui, la rébellion a mené vendredi une offensive sur Bossangoa, importante ville de 40.000 habitants dans le nord-ouest du pays, qu’elle affirme avoir prise. De source militaire centrafricaine, les combats se poursuivaient vendredi.
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