Par Bakary Nimaga
On m’a dit que le pouvoir anesthésie. Je constate qu’il ouvre la voie à l’amnésie. Il a quelque chose de magique qui nous fait oublier le tragique. Devant nos morts, on n’éprouve aucun remords. Les temps ont tellement changé qu’il faut ranger le passé. Ce sont des rengaines dépassées à même de créer l’impasse. Le charnier ne nous empêche pas d’être des carnassiers. Il faut aller au banquet et oublier le parquet. La lutte est terminée et place doit être à la flute de la victoire. Partout, je vois des visages inconnus. La politique est le domaine de la grande inconnue. Les combattants sont ignorés. Les pourfendeurs sont célébrés. Heureux ceux qui font la louange. Malheureux ceux qui ont porté la lutte avec courage. La rage est là et s’éloigne l’ancrage. L’ennemi donne l’anémie aux militants. Tant d’abnégation a conduit à la négation. L’ivresse du pouvoir a atteint des gens. L’adresse ne fonctionne plus. Ceux qui ont insulté hier sont les nouveaux sultans. Ceux qui ont débattu pour la cause sont maintenant les combattus. Mon monde est devenu fou. On foule au pied les propos d’antan. Autant en emporte le vent. Temps ventilé, tant de ventilateurs politiques. Ils roulent carrosse après avoir arrosé le pays de haine. Que de retournement de veste. Attention à la peste qui retourne à la case. Le pouvoir est là, le vouloir est las ! Tout bouge pour les mutants, pour les militants, tout est au rouge. Tous les matins, j’en perds mon latin.
Le Patriote
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