La Chambre préliminaire I prise en flagrant délit de complicité
Ce qui s’est passé le vendredi 22 février à l’audience du président Gbagbo est révélateur. En effet, sans que personne ne s’en rende compte, la Chambre préliminaire I chargée de juger l’affaire Le procureur contre Laurent Gbagbo a prouvé une fois encore que la Cour pénale internationale n’est pas si impartiale qu’elle le prétend.
Loin de faire un procès d’intention à ces dignes juges chevronnés, il nous apparait utile et pour la compréhension de la suite de l’audience de relever cet état de fait qui a retenu notre attention.
Alors que le bureau du procureur qui expose les faits allégués contre le président Laurent Gbagbo, depuis le 19 février 2013 et sans que les juges ne s’y interfèrent en dehors de la juge présidente qui joue le rôle de modératrice, est sur le point de conclure, c’est d’une façon déconcertante que les juges Hans Peter Kaul et Christina Van Wyngaert ont pris la parole, le vendredi dernier pour attirer l’attention du bureau du procureur sur quelque chose de fondamentale.
En effet, pour établir la responsabilité pénale individuelle du président Laurent Gbagbo, le bureau du procureur n’a de cesse de faire référence à l’article 25.3 (a) et (d) (i):
« Article 25 : Responsabilité pénale individuelle.
—3. Aux termes du présent Statut, une personne est pénalement responsable et peut être punie pour un crime relevant de la compétence de la Cour si :
a) Elle commet un tel crime, que ce soit individuellement, conjointement avec une autre personne ou par l’intermédiaire d’une autre personne, que cette autre personne soit ou non pénalement responsable ;
d) Elle contribue de toute autre manière à la commission ou à la tentative de commission d’un tel crime par un groupe de personnes agissant de concert. Cette contribution doit être intentionnelle et, selon le cas :
i) Viser à faciliter l’activité criminelle ou le dessein criminel du groupe, si cette activité ou ce dessein comporte l’exécution d’un crime relevant de la compétence de la Cour. »
Seulement à la lecture de ces paragraphes, rien n’indique la supposé responsabilité pénale individuelle du président Laurent Gbagbo. La question que l’on se pose à ce stade de cet article 25, est de savoir, la fonction et le positionnement de M. Gbagbo au moment de la commission du crime. Etait-il le président de la République de Côte d’Ivoire? Etait-il le chef suprême des armées de Côte d’Ivoire ? Ou était-il un simple chef d’une bande organisée en dehors de toute légalité constitutionnelle ? Voilà la question à laquelle le procureur a du mal à répondre, surfant sur les jeux de mots avec des qualifications incongrues et déformant l’histoire de la Côte d’Ivoire. Pour les y aider, après qu’ils (tous les orateurs du bureau du procureur) aient terminé leur exposé en concluant que le seul fait que M. Gbagbo ait eu des accointances avec Charles Blé Goudé ou que M. Gbagbo ait été informé régulièrement des agissements des FDS à travers leurs supérieurs hiérarchiques, est la preuve suffisante qu’il a engagé sa responsabilité pénale individuelle au titre de l’article 25 du Statut de Rome, le juge Hans Peter Kaul, demandera au bureau du procureur d’interpréter dans le même cadre, l’article 28 du statut de Rome. En effet, cet article qui fait allusion à la responsabilité des chefs militaires et autres supérieurs hiérarchiques serait bien l’article indiqué pour « coincer » n’importe quel chef hiérarchique, qu’il soit au pouvoir ou pas.
« Article 28 : Responsabilité des chefs militaires et autres supérieurs hiérarchiques. Outre les autres motifs de responsabilité pénale au regard du présent Statut pour des crimes relevant de la compétence de la Cour :
a) Un chef militaire ou une personne faisant effectivement fonction de chef militaire est pénalement responsable des crimes relevant de la compétence de la Cour commis par des forces placées sous son commandement et son contrôle effectifs, ou sous son autorité et son contrôle effectifs, selon le cas, lorsqu’il ou elle n’a pas exercé le contrôle qui convenait sur ces forces dans les cas où :
i) Ce chef militaire ou cette personne savait, ou, en raison des circonstances, aurait dû savoir, que ces forces commettaient ou allaient commettre ces crimes ; et
ii) Ce chef militaire ou cette personne n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites ;
b) En ce qui concerne les relations entre supérieur hiérarchique et subordonnés non décrites au paragraphe a), le supérieur hiérarchique est pénalement responsable des crimes relevant de la compétence de la Cour commis par des subordonnés placés sous son autorité et son contrôle effectifs, lorsqu’il ou elle n’a pas exercé le contrôle qui convenait sur ces subordonnés dans les cas où :
i) Le supérieur hiérarchique savait que ces subordonnés commettaient ou allaient commettre ces crimes ou a délibérément négligé de tenir compte d’informations qui l’indiquaient clairement ;
ii) Ces crimes étaient liés à des activités relevant de sa responsabilité et de son contrôle effectifs ; et
iii) Le supérieur hiérarchique n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en son pouvoir pour en empêcher ou en réprimer l’exécution ou pour en référer aux autorités compétentes aux fins d’enquête et de poursuites. »
Le bureau du procureur qui s’est rendu compte en ce moment qu’il venait d’être hors sujet, a répondu au juge que cela se fera par écrit. Car n’ayant pas préparé ou vu ce volet pour autant très important.
A la suite du juge Hans Peter Kaul, vint la juge Christina Van Wyngaert de rappeler au bureau du procureur que s’il veut que sa thèse de connexité qui lie le président Gbagbo à ses subordonnés (FDS, jeunes patriotes, milices…) soit crédible, il lui faudra présenter l’organigramme du groupe et son mode fonctionnement . Une autre remarque très importante quand on sait que s’il y a eu une organisation qui a planifié le fameux plan commun, il va falloir en démontrer son mode de fonctionnement. Qui en était le premier responsable ? Le second ? Le troisième ect….
C’est clair, à la lecture de ces deux remarques aussi pertinentes, il nous convient de conclure et bien avant que cette audience ne termine, qu’il existe à ce stade de la procédure, une base raisonnable de croire qu’il y a une connexité ou une connivence entre la Chambre préliminaire I et le bureau du procureur. Enfin, même si, relever ce comportement des juges de la CPI ne modifiera pas l’issue de cette audience que tout le monde sait biaisée d’avance et qui sent une confirmation d’au moins une charge suffisant pour conduire le président Laurent Gbagbo droit dans un procès à en point finir, l’honnêteté intellectuelle nous imposait de faire cette précision.
Philippe Kouhon/ Eventnews Tv
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