Le Julius Maléma de la lagune Ebrié ?
A la différence du jeune leader sud-africain, Koua Justin n’est pas en disgrace aupres de la direction officielle de son parti, le Front populaire ivoirien. Il est même plutot en état de grâce selon certains de ses proches, lui qui ose et prend des risques là où d’autres réfléchissent par sept fois avant d’agir. Le teint noir, pas trop imposant par la taille, affectionnant le Jean et le jacket comme au temps glorieux de la Fesci, affable mais aussi amer, Justin Koua a le verbe haut. Il est sans limite quand il s’agit de tancer le régime actuel qu’il voue aux gémonies. Docto-rant en philosophie à l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody, cet adepte de Montesquieu dont les pensées influen-cent son discours, est au plan professionnel, administrateur des services financiers en service au Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire. Son penchant pour la politique ne manque pas d’aga-cer ses supérieurs hiérarchiques qui ont balisé son champ d’action et rappelé à ses devoirs, ce cadre supérieur d’une régie financière hautement stratégique dans le système Ouattara. Tout commence après la chute de Laurent Gbagbo et son transfèrement à Korhogo. Vingt quatre heures avant le 11 avril 2011, date de la capture du ‘’Woody de Mama’’(Ndlr : Laurent Gbagbo), Navigué Konaté appelle un de ses plus proches collaborateurs du bureau exécutif national de la Jfpi. ‘’C’est plié’’, lui dit-il pour signifier que la chute du chef est irréversible. Dans les heures qui suivent, Navigué Konaté prend le chemin de l’exil. Il s’établit au Ghana. La ‘’lutte’’qui vient ainsi de prendre un coup fatal est sans tête. Qui pour prendre le flambeau dans cette Côte d’Ivoire où il y a encore des partisans de Laurent Gbagbo, qui n’osent pourtant pas mettre le nez dehors ? Longtemps dans le starting-block dans l’attente d’un congrès de la Jfpi, Justin Koua qui a pu se mettre à l’abri aux alentours d’Abidjan, pense que son heure a sonné. Il saisit aussitôt l’occasion, conformément aux textes. Il était le nu-méro deux de la Jfpi en tant que premier secrétaire national adjoint chargé des relations extérieures. Dans le camp Gbagbo, Blé Goudé et toute la galaxie patriotique sont en cavale et donc neutralisés. Par où commencer la remobilisation ? Une première Assemblée générale de la Jfpi est convoquée le 9 juillet 2011, au siège du Cnrd. Le succès de cette réunion est une source de motivation supplémentaire. Cou-rant juillet 2011, il accorde sa première interview à l’Intelligent d’Abidjan, un journal au service de la paix et de la jus-tice. On y découvre un jeune leader défendant avec achar-nement son camp qu’il fait passer pour la victime d’une ma-chination de la communauté internationale. Pour la suite, si les rassemblements sont quasi-impossibles à cette époque-là, il multiplie les rencontres au siège du Cnrd dans le péri-mètre de l’Insaac qui servait de siège au Fpi. Il sera en com-pagnie du député Yao Yao Jules qui a réussi à organiser le premier meeting de son parti, à Koumassi, en août 2011. Au sein du Fpi, il bénéficie d’une liberté d’action ce qui n’est pas toujours du goût des ‘’doyens’’dont il brouille quelque-fois la démarche. Sous sa houlette, la Jfpi s’était clairement affichée dans le camp de ceux qui ne voulaient pas de la convention du 29 avril 2012. ‘’Allons doucement car le che-min est long’’, a tenté de l’interpeller une fois, Laurent Akoun, alors secrétaire général par intérim du Fpi et qui purge une peine de 6 mois de prison à la Maca aujourd’hui. Il finira par agacer Mamadou Koulibaly dont il ne partageait pas toujours la démarche à la tête du parti. Ce dernier claqua la porte le 11 juillet 2011. Aujourd’hui encore, quand le président par intérim, Miaka Ouretto, opte pour l’action diplomatique et le dialogue pour faire plier le pouvoir en place, le « jeune » Koua estime que «l’heure de l’action a sonné». C’est d’ailleurs ce qui justifie le meeting programmé le 16 février 2013, à Yopougon. ‘’Nous prolongeons l’action de Miaka sur le terrain’’, se justifie-t-il. Mal aimé dans le camp adverse du Rhdp, Justin Koua passe pour un gar-çon courageux et téméraire chez les pro-Gbagbo. ‘’On peut ne pas l’aimer. Mais sans lui, la mobilisation serait morte dans notre camp et nos adversaires occuperaient seuls le terrain’’, fait remarquer un de ses proches. Le combat du natif d’Issia, originaire de Bongouanou en pays Agni, reste le retour en Côte d’Ivoire, de Laurent Gbagbo, fon-dateur du Fpi, détenu à La Haye. Et la fin justifie les moyens pour lui. Il fait monter la pression, défie les Frci, se dresse contre le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur, Hamed Bakayoko, avec qui, il ne manque pourtant pas d’échanger des plaisanteries lors de leurs rencontres. Un ministre dont l’entourage, estime que Justin Koua a une ligne rouge à ne pas franchir. Ils disent aussi qu’il sera entendu un de ces jours, dans le cadre des enquêtes pour atteinte à la sûreté de l’Etat, puisque son nom aurait été cité par plusieurs prévenus. Ama-ni N’guessan Michel avait plaidé la cause de Justin Koua à ce sujet, auprès du ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur, qui a confirmé que le président par interim de la JFPI pourrait bien être entendu, mais pas arrêté. En attendant, la Julus Ma-lema de la lagune Ebrié continue »sa croisade » pour pous-ser à bout le pouvoir. Jusqu’où ira le «jeune prodige» du camp Gbagbo ? Reussira-t-il là où les aînés ont échoué? Pour Dahi Nestor, l’un de ses hommes sûrs du bureau national, il est sur la bonne ligne : ‘’Il a apporté sa touche et sa témérité et aujourd’hui, la peur est derrière nous. Nous le lui devons au moins’’
S. Debailly
L’Intelligent d’Abidjan
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