Mali – Les islamistes dynamitent un pont stratégique vers Gao

BAMAKO (© 2013 AFP) – Des groupes islamistes armés ont dynamité un pont stratégique près de la frontière nigérienne non loin de Gao, une ville du nord du Mali, vers laquelle soldats français et maliens ont pour la première fois conduit vendredi des patrouilles.

Le sabotage, sur le pont de Tassiga selon des sources concordantes, vise une des deux routes que pourraient emprunter les soldats tchadiens et nigériens de la force africaine en cours de déploiement au Niger. Occupée par les islamistes depuis avril 2012 , Gao est située à 150 km du Niger.

Les chefs d’état-major ouest-africains doivent par ailleurs se rencontrer samedi lors d’une session d’urgence à Abidjan, afin de discuter des opérations militaires au Mali, a annoncé la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), présidée par la Côte d’Ivoire.

Des soldats français et maliens ont effectué dans la nuit de jeudi à vendredi des patrouilles conjointes au sud de Gao, « une première » en direction de cette métropole du nord-est du Mali prise l’an dernier par les islamistes, a appris l’AFP de source militaire malienne.

Ces patrouilles sont parties de Douentza, à 400 km à l’ouest de Gao, et ont avancé de 200 km en direction de cette ville, une des trois principales du nord du Mali qui, avec Tombouctou et Kidal, ont été prises fin mars 2012 par les groupes islamistes armés.

Gao et ses environs ont été la cible de frappes aériennes de l’armée française dès le début de son intervention le 11 janvier pour neutraliser les islamistes armés liés à Al-Qaïda et empêcher leur progression vers le Sud et la capitale Bamako.

Au moment où avaient lieu les patrouilles franco-maliennes, les combattants islamistes ont dynamité dans la nuit le pont stratégique de Tassiga, sur el fleuve Niger.

« Les islamistes ont dynamité le pont de Tassiga. Personne ne peut plus passer pour aller au Niger, ou venir vers Gao », a déclaré Abdou Maïga, propriétaire de camions de transports, dont le témoignage a été confirmé par une source de sécurité nigérienne.

Tassiga, est une localité malienne, située à 60 kilomètres de la frontière nigérienne. Deux mille soldats tchadiens et 500 nigériens sont en cours de déploiement au Niger, dans l’objectif d’ouvrir une nouvelle voie vers Gao pour aller chasser les groupes islamistes armés au Mali.

L’aviation française avait d’ailleurs bombardé dans la nuit de mercredi à jeudi des positions islamistes à Ansongo, à 40 km de Tassiga, sur la route menant à Gao.

« Malnutrition aiguë » à Gao

Des soldats de la force africaine, mandatée par l’ONU, ont de leur côté commencé à se déployer au Mali, où 2.500 soldats français sont déjà positionnés: ainsi, 160 militaires du Burkina Faso sont arrivés à Markala (270 km au nord de Bamako), pour prendre la relève des Français qui tenaient un pont stratégique sur le Niger. Quelque 6.000 soldats africains devraient à terme se déployer au Mali.

L’arrivée de troupes africaines dans les villes du Nord de Gao et Tombouctou, est d’autant plus attendue que, faute d’approvisionnement, la situation humanitaire s’y dégrade un peu plus de jour en jour.

« Il y a clairement des cas de malnutrition aiguë » qui touchent notamment plus de 15% des enfants de moins de 15 ans (environ 20.000 enfants), dans la région de Gao déjà déficitaire d’un point de vue agricole en temps normal, a déclaré à Bamako Lucile Grosjean, d’Action contre la faim (ACF), craignant une nouvelle dégradation.

« La plupart des entreprises se sont effondrées, les approvisionnements sont coupés depuis 15 jours, et les grands commerçants ont quitté la ville avec leurs stocks », a-t-elle ajouté.

Selon elle, la ville reste encore contrôlée par les islamistes du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), l’un des trois groupes qui, avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et Ansar Dine (Défenseurs de l’islam) ont fait en du nord du Mali leur sanctuaire en 2012.

A 900 km au nord-est de Bamako, Tombouctou est, elle, privée d’eau et d’électricité depuis quatre jours, après le départ des islamistes qui l’occupaient, selon des habitants de cette ville-phare de la culture musulmane en Afrique, également bombardée ces derniers jours par l’aviation française.

« Il n’y a vraiment plus d’eau. Les populations ont fui. Les islamistes aussi. C’est une ville fantôme », a indiqué Moctar Ould Kery, un conseiller municipal de la région de Tombouctou.

A la situation humanitaire critique s’ajoutent les accusations des organisations de défense des droits de l’homme et de nombreux témoins contre l’armée malienne qui se rendrait coupable d’exactions, particulièrement à l’encontre des Arabes et des Touareg, assimilés aux « terroristes » islamistes.

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