Analyse – Pourquoi le FPI doit se réveiller

Analyse de Philippe Kouhon

Le front populaire ivoirien (FPI) va-t-il succomber à ses blessures causées par l’attaque meurtrière des libéraux du RHDP, appuyés par l’ensemble du libéralisme politico-économique international, ou bien, peut-il rebondir un jour et autrement ?

C’est à cette réflexion que nous invitons tous les analystes politiques. Qu’ils soient de gauche, de droite, du centre, d’Afrique, d’Europe…

Car à travers la guerre en Côte d’Ivoire, c’est tout un système qui est en jeu, même si les projecteurs voudraient nous amener actuellement au nord du Mali.

Aussi, si le nouveau report des élections locales (municipales, régionales) en Côte d’Ivoire est interprété à tort ou à raison comme une victoire des Frontistes dont la non participation pour la deuxième fois (après le boycott des législatives de décembre 2011) pourrait fragiliser davantage le pouvoir actuel pour absence d’une opposition crédible, il n’est pas à exclure que cette décision de la Commission électorale indépendante (CEI) cache un piège !

Et ils ne cesseront jamais de le répéter, « pas de réconciliation sans la libération de leur chef, Laurent Gbagbo, détenu à la Haye depuis le 30 novembre 2011, pour crime contre l’humanité. »

A ce stade des déclarations deux hypothèses nous viennent à l’esprit.

Premièrement : Le 19 février 2013, après l’ouverture de l’audience de confirmation des charges retenues contre l’ex président ivoirien, la justice internationale provoque un coup de théâtre en infirmant toutes les charges à l’encontre de Laurent Gbagbo et le libère sans condition. En Côte d’Ivoire, le régime de Ouattara poursuit sa vague de libération des prisonniers politiques avec Simone Gbagbo et Pascal Affi Nguessan libres. Ce qui déclenchera à coup sûr un branle le bas du côté des exilés pro-Gbagbo qui reprendront immédiatement le chemin retour d’Abidjan.

Seulement, bien malin celui qui pariera sur cette hypothèse !

Alors, une deuxième hypothèse, celle-là moins euphorique et plus réaliste s’avère nécessaire.

Si le FPI veut continuer à porter les aspirations du peuple de Côte d’Ivoire, il doit se réinventer. En un mot, il doit se refonder et refonder autour de lui. Car il n’est secret pour personne, depuis la disparition du bloc soviétique, la pensée libérale est devenue la pensée unique voire universelle. Et tous ceux qui hésitent encore à le nier sont systématiquement mis hors d’état de nuire soit directement par la communauté dite internationale (la France pour les Etats africains), soit par personnes interposées en interne. Et ce n’est pas l’international socialiste, cette amicale de boulistes qui sauvera le monde.

Pour le comprendre, remontons le temps. « On a enfin compris que le monde d’aujourd’hui ne pouvait plus être gouverné comme avant » dixit, Ségolène Royal. C’était lors du congrès de l’international socialiste de Paris les 15 et 16 novembre 2010 et devant le représentant tunisien, égyptien et ivoirien, Pascal Affi Nguessan.
Le 14 janvier 2011, le Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) de Ben Ali est exclu de l’IS avant d’être dissout officiellement par le nouveau pouvoir en Tunisie le 9 mars 2011. Le Parti national démocratique (PND) de Moubarack en Egypte sera lui aussi exclu de l’IS le 30 janvier 2011. Suivra le FPI de Laurent Gbagbo qui sera exclu du même groupe avant d’essuyer les affres de la droite française en avril 2011. Alors que jusqu’au congrès de novembre 2010, Affi Nguessan était encore le vice président de l’organisation (international socialiste).

La liste des frustrés est longue. Récemment, après s’être battu comme un diable pour conserver le pouvoir au Ghana, le NDC (national démocratic congrès) de John Mahama Dramani, membre de l’IS ne recevra aucun soutien de ses alliés dans le bras de fer qui l’opposait au libéral Nana Akufor Addo du NPP (new national party). « L’IS ne fera rien. La France ne lâchera pas Ouattara au nom de ses intérêts en Côte d’ivoire », nous lance un diplomate français rencontré à Accra, il y a quelques jours.

En outre, si les Etats africains dits progressistes ne doivent rien attendre de leurs alliés de l’IS, fort de 110 membres de plein droit, une trentaine de membres consultatifs et une douzaine d’observateurs, l’autre allié naturel devrait être l’Union africaine (l’UA). Seulement combien sont-ils aujourd’hui les pays membres de l’UA qui s’acquittent de leur cotisation face à une percée de l’aide de l’Union européenne, défigurant l’organisation en lui imposant le diktat de l’Europe ? Sinon que peut faire dame Zuma (présidente de la commission de l’UA) quand la tête de l’organisation est une marionnette en la personne du président béninois, Boni yahi qui semble être dépassé par tous les évènements qui secouent le continent y compris dans son propre pays. Voilà pourquoi nous disons que si le FPI veut encore exister, il devra se réinventer et s’adapter au monde nouveau en tirant les leçons du 11 avril 2011 avec lucidité et courage. A commencer par les cadres du parti aujourd’hui éparpillés dans la sous région avec un statut d’exilés politiques. Une position idéale pour qu’enfin des contacts et des vrais contacts soient pris. Car on le sait, durant les dix ans de gestion du pouvoir du front populaire ivoirien (2000-2010), aucun contact sérieux n’aurait été pris au niveau international. En dehors de ces rares voyages du ministre Kadet Bertin en Angola, du conseiller de Gbagbo, Binjamin Djédjé à Accra ou encore des petits déplacements de son cousin Ottro Zirignon (Pca de la SIR) en Afrique du Sud. Des voyages qui restent de l’ordre des missions ponctuelles, parfois affectives. Malgré le ballet des cadres du FPI en France et une forte présence des partisans de Laurent Gbagbo sur les bords de la seine, aucun contact sérieux n’en est sorti jusqu’à la chute. Ne parlons pas de Alain Capeau, Guy Labertit et Emmanuelli du PS qui non seulement ne pèsent plus rien politiquement mais restent de simple copains d’un Laurent Gbagbo exilé. Que dire des USA, l’Angleterre, la Russie, la Chine, la Syrie, l’Israel…où bien que le FPI serait représenté, structurellement, ses représentants à l’instar de Brigitte Kuyo en France ont brillé dans leur ensemble par leur inconséquence à implanter le parti dans le cœur des occidentaux encore moins dans les hautes instances du monde politique et des Affaires. Il va falloir corriger tout cela. C’est pourquoi, nous disons que le FPI doit faire sa mue. Au risque de nous répéter, quel ancien ministre du FPI peut aujourd’hui prendre son téléphone pour ne ce reste que joindre son homologue ghanéen ou togolais ou français afin de lui expliquer ce qui arrive à Laurent Gbagbo et à son entourage ? Même les quelques noms cités plus haut pour des missions ponctuelles seraient aujourd’hui introuvables alors qu’ils sont bel et bien vivants. Au Ghana où l’on dénombre la grande majorité des cadres du régime FPI, bien que ceux-ci soient organisés, il faut là aussi craindre un éclatement du fait des questions de leadership. Leadership au sein de la coordination, mais aussi leadership entre les exilés et ceux qui ont décidé de braver la machine du régime de Ouattara depuis Abidjan. A cette allure, on se demande ce que le FPI deviendra demain si Affi Nguessan est libéré, là où les nouveaux dirigeants du parti, parlent de plus en plus de Congrès à Abidjan ?

Bref. Là n’est pas notre point fort. Mais nous ne pouvons conclure ces quelques lignes sans insister sur les nouvelles responsabilités des cadres du front populaire ivoirien. Comment gèrent-ils leur quotidien à Accra, à Lomé ? En dehors des quelques repas chauds offerts par le secrétaire général du NDC, un parent au ministre Sécré Richard, lui aussi exilé à Accra et des petites promesses en ce qui concerne leurs sécurité sur le sol ghanéen, qui de ces nombreux cadres du FPI présents dans la capitale ghanéenne peut nous dire le moindre RDV qu’il aurait déjà obtenu avec les plus hautes autorités du pays, pour autant très accueillantes et ouvertes ? Quelles stratégies pour un retour aux affaires ? Après plus de deux ans de repos et deux ans passés à surfer sur internet et autres facebook pour attendre qu’un parent nous reconnaisse, il est temps que le FPI se remette au travail s’il est conscient que le procès de leur mentor qui s’ouvre le 19 février prochain n’est rien d’autre que de l’ordre de la politique. Le FPI doit aussi apprendre à faire de la politique et autrement, en tenant compte du nouvel ordre mondial. Et si la récente sortie de Miaka Ouretto et sa délégation à l’internationale est à saluer, tous devront désormais se mettre à la tache. Et envoyer des missions à travers toute la planète pour convaincre l’opinion internationale. Et les cadres exilés au Ghana ont le temps et à un degré moindre les moyens humains et intellectuels. Après quoi, la diaspora pourrait être appelée à la contribution financièrement…Mais le projet doit voir le jour et dans le plus bref délai car là où tu passes deux ans, trois ans est vite arrivé et ainsi de suite…Voilà notre vision pour le FPI. C’est à ce prix que les autres Etats même africains pourront s’affranchir de leur droit de réserve et soutenir financièrement et politiquement le FPI pour son retour aux affaires.

Philippe Kouhon/ Eventnews Tv

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