Pourquoi Ouattara traque les magistrats

Par BERTRAND GUEU source L’inter

Après la suspension de 8 magistrats intervenue en octobre 2012, une autre décision vient de frapper cette même corporation. Dimanche dernier, le procureur de la République, Simplice Koffi Kouadio, Fofana Ibrahim, procureur général, anciennement avocat général près la cour d’Appel du Plateau et le procureur de Yopougon, Silué Couhoua, ont été débarqués de leurs postes.
Officiellement, aucune explication n’a été donnée. Mais au regard du rapprochement de ces deux mesures, autant dire que Alassane Ouattara a engagé un combat frontal contre les magistrats ivoiriens. Ce n’est pas une surprise, si l’on analyse tous discours tenus par le chef de l’Etat ivoirien chaque fois qu’il doit se prononcer sur la justice. Déjà dans l’opposition, M. Ouattara, n’hésitait pas à affricher sa volonté à mettre les magistrats au pas. « La justice, pour être crédible, doit être efficace et impartiale. Mais, ce n’est pas le cas aujourd’hui. Pour les citoyens, pour obtenir un acte de justice, il faut payer. Les retards sont considérables ».

Ce constat a été fait en nombre 2010 par Alassane Ouattara lors du débat télévisé qui l’a opposé à Laurent Gbagbo, pendant la campagne présidentielle. Participant à un séminaire qui a eu pour thème «justice et investissements privés en Côte d’Ivoire», Alassane Ouattara a été encore plus direct dans ses propos. « Depuis plus d’un décennie, notre justice est décriée par le justiciable. Notamment, par les opérateurs économiques. Malheureusement, elle n’est ni rassurante ni sécurisante », a-t-il accusé.

A cette occasion, il a propose sa recette pour corriger ce dysfonctionnement. «La corruption qui a malheureusement gagné certains acteurs de la justice ivoirienne doit être bannie. La lutte contre la corruption devra être assortie de mesures coercitives et de sanctions appropriées telle que la radiation de personnel de justice corrompu», a souhaité le chef de l’Etat. Mais ce qui conforte la position de M. Ouattara, c’est quand des magistrats eux-mêmes font leur mea-culpa.

Le 16 novembre 2011, le président de la Cour Suprême, Koné Mamadou en personne, n’a pas été tendre à l’égard de ses collègues magistrats. « La vérité et la réalité du moment nous commandent que l’heure est grave. Par la faute de certains d’entre nous, le peuple au nom de qui nous rendons la justice, et qui est notre juge, n’est pas loin de nous retirer sa confiance, si ce n’est déjà fait. Sur le tableau de bord de la vie de la nation, les clignotants nous concernant sont en passe de virer au rouge. Et si nous entrons en introspection, nous constaterons qu’objectivement, le peuple n’a pas tort de nous manifester de la défiance. En tout état de cause, nous ne pouvons avoir raison contre le peuple car «vox populi, vox dei». Alors, faisons amende honorable et confessons au peuple de Côte d’Ivoire que nous avons péché : en pensées, en paroles, en écrits, par action et par omission », a-t-il reconnu.

C’était en présence du chef de l’Etat, lors la rentrée judiciaire pour l’année 2011-2012 de la Cour suprême. Ouattara qui veut faire du secteur privé le moteur de la croissance, a à cœur d’assainir l’environnement des affaires afin de rendre la destination la Côte d’Ivoire attractive. Mais il sait pertinemment que les opérateurs économiques tiennent à la sécurité de leurs investissements. Or, les différents rapports sur les affaires en Côte d’Ivoire ne sont pas de nature à faire plaisir au N°1 Ivoirien. D’où la décision du gouvernement de mettre en place les tribunaux du commerce, sur la base que les litiges dans le domaine économique constituent des sources de mauvais verdicts.

Bertrand GUEU

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