« Je demande la libération de tous les autres prisonniers »
“Je continue d’espérer que la sagesse finira par l’emporter”
C’est avec beaucoup de bonheur que j’ai appris votre libération du lieu où vous êtes restés injustement détenus pratiquement vingt mois. Vous vous êtes tous retrouvés dans ces lieux parce que vous avez servi votre pays et votre patrie. Je me réjouis de ce que vous retrouvez vos familles, vos amis et tous ceux qui vous sont proches. Vous êtes les héros de notre engagement commun à bâtir une nation digne, parce que affranchie de toutes les servitudes les plus humiliantes que veulent nous imposer les nostalgiques d’un ordre révolu. Vos séjours injustifiés dans les différentes prisons doivent être regardés par vous-mêmes et par notre société comme l’expression de notre volonté inébranlable de rester constant dans la bataille pour la réalisation du dessein de notre peuple qui aspire légitimement à une plus grande liberté.
Tout en saluant donc votre libération, je ne peux m’empêcher d’imaginer votre désarroi devant la précarité de votre situation eu égard à la destruction de vos domiciles, aux pillages de vos biens divers et à la violence sur vos proches. Malgré ces dures réalités, je vous invite au pardon qui grandit. Ecartons en nous la haine qui nous empêche d’avoir une claire vision de notre objectif. Car plus l’objectif recherché est grand, plus le chemin pour y arriver est parsemé d’embûches. C’est pourquoi, il ne peut y avoir d’humiliation trop grande pour quiconque se bat pour son peuple. Que vos larmes, que vos sueurs, que votre sang et celui de vos proches, vous aident à renoncer à tout esprit de vengeance tout en restant ferme dans la lutte qui sera encore longue, encore douloureuse. Mais que votre foi en la victoire de notre peuple sur sa propre histoire ne vous quitte jamais. Merci au nom du peuple ivoirien pour votre combat, pour l’ampleur de vos sacrifices. Veuillez transmettre mes salutations et mes sincères amitiés aux membres de vos familles respectives dont je mesure la souffrance endurée de façon injuste.
Pour tous les nombreux autres Ivoiriens encore détenus ou en exil, je ne cesse de prier pour eux et leurs familles. Je crois en la capacité des hommes à surmonter leurs divergences les plus aigues. C’est pourquoi je continue d’espérer que la sagesse finira par l’emporter afin que notre destin commun reste le seul repère de toutes nos actions. A cette fin, je continue de demander la libération de tous les autres prisonniers dont le prolongement dans les sous sols de notre République au nom de leur choix politique, prolonge la douleur de notre nation et empoisonne l’Histoire de notre valeureux peuple. Le débat politique est possible en Côte d’Ivoire, il est même indispensable. La recherche de la vérité sur le drame qu’a connu notre pays est inévitable. Il nous faudra répondre aux interrogations des générations futures qui ne manqueront pas de nous questionner sur ces douloureux événements qui sont encore hélas le prolongement de l’Histoire douloureuse de notre peuple. Espérer pouvoir faire l’économie de la recherche de cette vérité, c’est faire fausse route. La déchirure de la société ivoirienne est suffisamment profonde pour que nous n’en mesurions pas l’impact sur le bonheur individuel de chacun de nous. Mais est-il possible d’engager un débat politique et un dialogue républicain autour des questions essentielles qui sont les fondements de notre nation lorsque, certains des nôtres se trouvent injustement privés de leur liberté ? Sans être un objectif politique, votre libération et celle des autres prisonniers constituent le préalable pour l’avènement d’un débat politique, condition sine qua non de la consolidation de la Nation, objectif qui transcende nos ambitions personnelles.
Je vous prie donc d’associer vos prières aux miennes afin que Dieu continue d’apporter son soutien et son réconfort à tous ceux qui sont encore détenus dans les différentes prisons ou en exil et également à leurs familles.
Veuillez agréer Monsieur le Premier Ministre (ex-Premier ministre, Ndlr), l’expression de ma profonde amitié.
Pour le Président Laurent GBAGBO
Le Ministre KONE Katinan Justin
Le Porte Parole du Président Laurent GBAGBO
N.B : Les titres et le chapô sont de la Rédaction.
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