…La nécessité d’un référendum
Nous y sommes ! La boîte de pandore est ouverte depuis le mercredi 21 novembre 2012, avec le vote de la loi sur le mariage faisant de la femme l’égal de l’homme dans les charges du foyer. Le passage en force réalisé par le Rdr d’Alassane Ouattara en usant de pressions et de chantage sur ses alliés du Rhdp que sont le Pdci-Rda et l’Udpci, ouvre ainsi un boulevard d’incertitudes qui conduit insidieusement le peuple ivoirien a accepter ce que l’on a voulu vainement lui imposer par perfidie, un certain 23 janvier 2003 dans une banlieue parisienne. Il s’agit en occurrence de l’idée devenue de force loi issue du gentlemen agreement de Linas-Marcoussis signé par le Fpi, Mfa, Mjp, Mpci Mpigo, Pdci-Rda, Pit, Rdr, Udcy et Udpci et qui n’avait pu aboutir, grâce au grand manœuvrier qu’est Laurent Gbagbo qui en avait retardé l’échéance. Maintenant que le leader charismatique fondateur du Front populaire ivoirien militairement vaincu le 11 avril 2011 n’est plus aux affaires, le processus de naturalisation peut être repris de là où il avait été abandonné. Alassane Ouattara revient à la charge. A tout seigneur tout honneur. Dans le vaste complot ourdi contre la Côte d’Ivoire, c’est lui la main exécutrice de la naturalisation massive. En 2003, il était adoubé par la France de Jacques Chirac sous la supervision ô combien éminentissime du juriste constitutionnel Pierre Mazeaud assisté du juge sénégalais Keba Mbaye.
L’annexe de l’Accord de Linas Marcoussis est bien claire sur la question, relative à la mission de «Réconciliation» concernant la «Nationalité, l’identité, condition des étrangers», confiée en son temps au Premier ministre Seydou Elimane Diarra. Notamment en son point 1 précisément au paragraphe 4 qui dit : «La Table Ronde estime que la loi 61-415 du 14 décembre 1961 portant code de la nationalité ivoirienne modifiée par la loi 72-852 du 21 décembre 1972, fondée sur une complémentarité entre le droit du sang et le droit du sol, et qui comporte des dispositions ouvertes en matière de naturalisation par un acte des pouvoirs publics, constitue un texte libéral et bien rédigé. La Table Ronde considère en revanche que l’application de la loi soulève de nombreuses difficultés, soit du fait de l’ignorance des populations, soit du fait de pratiques administratives et des forces de l’ordre et de sécurité contraires au droit et au respect des personnes. La Table Ronde a constaté une difficulté juridique certaine à appliquer les articles 6 et 7 du code de la nationalité. Cette difficulté est aggravée par le fait que, dans la pratique, le certificat de nationalité n’est valable que pendant 3 mois et que, l’impétrant doit chaque fois faire la preuve de sa nationalité en produisant certaines pièces. Toutefois, le code a été appliqué jusqu’à maintenant». Et de conclure sur une note martiale : «En conséquence, le gouvernement de réconciliation nationale:
a. relancera immédiatement les procédures de naturalisation existantes en recourant à une meilleure information et le cas échéant à des projets de coopération mis en œuvre avec le soutien des partenaires de développement internationaux;
b. déposera, à titre exceptionnel, dans le délai de six mois un projet de loi de naturalisation visant à régler de façon simple et accessible des situations aujourd’hui bloquées et renvoyées au droit commun (notamment cas des anciens bénéficiaires des articles 17 à 23 de la loi 61-415 abrogés par la loi 72-852, et des personnes résidant en Côte d’Ivoire avant le 7 août 1960 et n’ayant pas exercé leur droit d’option dans les délais prescrits), et à compléter le texte existant par l’intégration à l’article 12 nouveau des hommes étrangers mariés à des Ivoiriennes». Tout cet argumentaire juridico politique devait s’appliquer dans un délai de six mois, comme vous le remarquez au point b. C’est-à-dire, faire vite-vite ! Nullement il n’est fait mention de l’avis du peuple de Côte d’Ivoire. Les décideurs de Linas-Marcoussis n’ont que faire de l’opinion des populations ivoiriennes sur la question primordiale de leur acceptation ou non des étrangers vivant sur leur sol. Aucune consultation préalable. Et donc aucun référendum pour déterminer les conditions dans lesquelles la nationalité ivoirienne s’acquiert, quelle catégorie de demandeurs peut en bénéficier et sur quel critère de sélection. Mais au pouvoir depuis avril 2011, Alassane Ouattara a-t-il si tort de revenir sur la question du projet de naturalisation collective des Burkinabé vivant en Côte d’Ivoire ? La Constitution ivoirienne nous interpelle sur ce point. Voici ce que dit la loi n°2000-513 du 1er août 2000 portant Constitution ivoirienne en son Titre III du Président de la République et du Parlement, article 43 : «Le Président de la République, après consultation du bureau de l’Assemblée nationale, peut soumettre au référendum tout texte ou toute question qui lui parait devoir exiger la consultation directe du peuple. Lorsque le référendum a conclu à l’adoption du texte, le Président de la République le promulgue dans les délais prévus à l’article précédent». En fait, dans l’esprit de la Constitution, il est important de soumettre toutes les modifications de lois qui engagent de façon décisive et irréversible l’avenir du pays et le sort de la nation au peuple souverain, par voie référendaire. Ainsi en a-t-il été de la modification du code électorale, en ce qui concerne l’éligibilité à la Présidence de la république, sous le général Robert Guéi. Cette loi votée au référendum de 2000 à plus 86% de voix a traduit la volonté des Ivoiriens animés d’une volonté indiscutable de défendre et protéger les intérêts du pays. C’est la démarche indiquée pour un Président qui se veut vraiment à l’écoute de son peuple. Mais est-ce encore le cas depuis le 11 avril 2011 ? Rien ne le montre. Au contraire ! Un chef de l’Etat qui s’échine contre vents et marée à concéder à tour de bras à des étrangers la nationalité dans un pays dont il est le premier gardien, n’est en réalité que quelqu’un qui ne peut que se battre pour assurer et préserver des intérêts étrangers. Et la Constitution notamment en son article 35 n’a pas tort lorsqu’elle verrouille à sept (7) tours, l’accès à la présidence de la République. «Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Il n’est rééligible qu’une fois ; Le candidat à l’élection présidentielle doit être âgé de quarante ans au moins et de soixante quinze ans au plus; Il doit être ivoirien d’origine, né de père et de mère eux-mêmes ivoiriens d’origine; Il doit n’avoir jamais renoncé à la nationalité ivoirienne; Il ne doit s’être jamais prévalu d’une autre nationalité; Il doit avoir résidé en Côte d’Ivoire de façon continue pendant cinq années précédant la date des élections et avoir totalisé dix ans de présence effective…». A l’évidence, cet article 35 qui préservait le fauteuil présidentiel contre les ambitions démesurées, a dû faire l’objet de compromis avec la signature de l’Accord de Twané (Pretoria) signé le 06 avril 2005 en Afrique du Sud. Lequel Accord de Pretoria en son point 14 remet en cause tout le travail abattu en août 2000 pour doter la Côte d’Ivoire de sa Constitution actuelle. Et stipule ceci sur la question de l’Eligibilité à la présidence de la République :
«Les participants à la rencontre ont discuté de l’amendement de l’article 35 de la Constitution, Ayant écouté les points de vue des différents leaders ivoiriens, le Médiateur s’est engagé à se prononcer sur ce sujet après avoir consulté le Président de l’Union africaine, Son Excellence le Président Olusegun Obasanjo et le Secrétaire général des Nations Unies. Son Excellence Kofi Annan, La décision issue de ces consultations sera communiquée aux leaders ivoiriens. Le médiateur fera diligence pour régler cette question». De retour à Abidjan, le Président Laurent Gbagbo s’engagera dans une série de consultations à l’issue desquelles il applique l’article 48 de cette même Constitution qui lui permet de prendre des décisions exceptionnelles. «Lorsque les Institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacées d’une manière grave et immédiate, et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exceptionnelles exigées par ces circonstances après consultation obligatoire du Président de l’Assemblée nationale et de celui du Conseil constitutionnel. Il en informe la Nation par message. L’Assemblée nationale se réunit de plein droit». Dit l’article 48.
Beaucoup d’efforts ont été consentis du 19 septembre 2002 (date de la première attaque de l’ex-rébellion) au 11 avril 2011. Soit neuf ans de lutte contre l’invasion de la Côte d’Ivoire et le bradage des richesses de ce pays. Et c’est tous ces efforts qui risquent d’être vains, si Alassane Ouattara réussit comme il a fait avec la loi sur le mariage, à brader la nationalité ivoirienne. Surtout avec les colonies de peuplement et la vague d’expropriation qui ont cours à l’ouest de la Côte d’Ivoire.
Simplice Allard
Le Temps
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