Egypte: Sit-in place Tahrir contre Mohamed Morsi

AP/MOSTAFA EL SHEMY


Le Monde.fr avec AFP et Reuters

De violentes manifestations ont eu lieu vendredi 23 novembre en Egypte pour dénoncer un décret qui accorde de nouvelles prérogatives au président Mohamed Morsi, accusé par l’opposition de confisquer les acquis de la révolution de 2011 et de se comporter en « nouveau Pharaon ».
Au Caire, la place Tahrir a été envahie par des milliers de manifestants demandant son départ et l’accusant d’un « coup d’Etat ». La police a tiré des grenades lacrymogènes pour tenter de les disperser mais les opposants ont entamé vendredi soir un sit-in sur cette place emblématique de la révolution pour demander au dirigeant islamiste de revenir sur sa décision de renforcer considérablement ses pouvoirs.

« Toutes les forces politiques révolutionnaires se sont mises d’accord pour commencer un sit-in vendredi », a déclaré dans un communiqué le Courant populaire, dirigé par Hamdeen Sabbahi, candidat de gauche arrivé troisième à l’élection présidentielle de juin, appelant à une grande manifestation mardi. Jusqu’à présent, 26 mouvements et partis politiques ont accepté de prendre part au sit-in, ont indiqué les organisateurs.

Mais à l’appel des Frères musulmans, des milliers de partisans du chef de l’Etat se sont également rassemblés près du palais présidentiel, brandissant des portraits de Mohammed Morsi.

Ailleurs dans le pays, trois antennes du Parti de la liberté et de la justice, issu des Frères musulmans, ont été incendiées par des opposants. Des heurts entre partisans et adversaires de Morsi ont fait 12 blessés à Alexandrie.

MORSI QUALIFIÉ DE « PHARAON »

Elu en juin premier président civil et islamiste du pays le plus peuplé du monde arabe, M. Morsi s’est arrogé dans une « déclaration constitutionnelle » le droit de « prendre toute décision ou mesure pour protéger la révolution » de 2011. « Les déclarations constitutionnelles, décisions et lois émises par le président sont définitives et ne sont pas sujettes à appel » tant que ne sera pas achevée la nouvelle Constitution, prévue mi-février, selon cette déclaration.

M. Morsi cumule déjà les pouvoirs exécutif et législatif – la chambre des députés ayant été dissoute en juin –, et entretient des relations tendues avec une grande partie de l’appareil judiciaire. Il avait renforcé son pouvoir en écartant en août le ministre de la défense de l’ex-régime, Hussein Tantaoui.

Renforcé par son succès diplomatique dans l’imposition d’une trêve entre Israël et les Palestiniens de Gaza, Mohammed Morsi, issu du mouvement islamiste des Frères musulmans, a justifié sa décision par sa volonté de « plaire à Dieu et à la nation ». « Je prends mes décisions après avoir consulté tout le monde », a-t-il dit. Selon lui, l’Egypte est sur la voie de « la liberté et la démocratie ».

Lire : Morsi renforce ses pouvoirs, l’opposition appelle à manifester

UN DÉCRET QUI SOULÈVE « DE TRÈS GRAVES QUESTIONS »

Les avocats, Mohamed El Baradei et Amr Moussa, opposants de poids, ont accusé M. Morsi de « monopoliser les trois branches du pouvoir », et de chercher à « anéantir l’indépendance du pouvoir judiciaire ». « Morsi a jeté de l’huile sur le feu au lieu d’agircomme un président pour toute l’Egypte » et conduit le pays vers « un enfer politique » selon M. Achour.

Le décret publié jeudi donne à l’Assemblée deux mois de plus pour rédiger la Constitution égyptienne, ce qui pourrait repousser au mois de février l’achèvement du processus nécessaire à la tenue de nouvelles élections législatives.

Le président, qui a limogé le procureur général, a également ordonné la tenue de nouveaux procès pour les responsables de l’ancien régime impliqués dans des violences contre des opposants lors de la « révolution du Nil » de janvier-février 2011, ce qui implique qu’Hosni Moubarak, condamné en juin à la prison à vie, devrait lui aussi être rejugé.

A Genève, le porte-parole de Navi Pillay, haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, a souligné que le décret du président Morsi soulevait de « très graves questions » sur les droits de l’homme. A Bruxelles, l’Union européenne a appelé le président égyptien à respecter le processus démocratique.

Washington a rappelé que « l’une des aspirations de la révolution [de 2011] était de s’assurer que le pouvoir ne serait pas trop concentré entre les mains d’une seule personne ou d’une institution ». L’Union européenne a appelé M. Morsi à respecter « le processus démocratique » et Paris a estimé que les décisions prises jeudi n’allaient pas « dans la bonne direction ».

Abonnez-vous
à partir de 1 € Réagir Classer Imprimer EnvoyerPartager facebook twitter google + linkedin
L’Egypte après Moubarak

Commentaires Facebook