Par Xinhua
Le président directeur général de la société chinoise StarTimes, spécialisée dans l’audiovisuel, Xinxing Pang, a indiqué lundi à Abidjan sa volonté d’accompagner la Côte d’Ivoire dans son processus de migration de l’analogie à la radiotélévision numérique.
« Ma présence à Abidjan doit être perçue comme mon grand souhait d’accompagner le gouvernement ivoirien dans le processus d’administration de la radiotélévision pour développer ainsi ensemble le secteur de la communication, pour le bien-être du peuple ivoirien », a déclaré M. Pang, au sortir d’une audience avec le Premier ministre ivoirien, Jeannot Kouadio-Ahoussou.
StarTimes est une société de « haute technologie » en Chine travaillant dans le secteur de la radiodiffusion et de la télévision.
« Notre spécialité, c’est le domaine de la télévision numérique, notamment la recherche, la conception, le développement de la technologie numérique et l’exploitation de réseaux de télévision numérique », a précisé M. Pang.
Le PDG de StarTimes faisait partie d’une délégation de près de 200 hommes d’affaires chinois venus prospecter, en août à Abidjan, le marché ivoirien, sur invitation du président ivoirien Alassane Ouattara.
« Avec le Premier ministre, on a une fois encore exprimé notre souhait de faire de l’investissement dans l’industrie de la radiodiffusion télévision numérique, notamment dans le cadre de la migration de la radiotélévision en Côte d’Ivoire, de l’analogique vers le numérique », a réitéré le PDG de StarTimes.
Le gouvernement ivoirien est résolu à faire basculer le pays vers la télévision numérique terrestre (TNT) à l’horizon 2015. Un groupe de travail de 20 experts commis par le gouvernement pour réfléchir sur la question a remis début juillet les conclusions de ses travaux.
Selon le rapport du groupe de travail, le passage au numérique va coûter près de 58 milliards de franc CFA (108,7 millions de dollars), soit 32 milliards (60 millions de dollars) pour les infrastructures et 25,7 milliards (48,7 millions de dollar) pour le coût social.
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Libéralisation de l’espace audiovisuel en Côte d’Ivoire : Le dossier traîne, les Ivoiriens s’impatientent
Le Nouveau Réveil
L’Etat de Côte d’Ivoire s’est lancé, depuis 1990, dans un processus de libéralisation du secteur de l’audiovisuel. Il s’agit, au bout du parcours, d’autoriser, après souscription à un appel d’offres ou appel à candidatures, des opérateurs privés de droit ivoirien, à user des fréquences de radio diffusion sonore ou télévisuelle. Des discours ont été pondus, des engagements ont été pris à ce sujet, des promesses fermes ont été faites, mais les choses ne semblaient pas bouger. Après vingt-deux ans de réflexion, d’ateliers, de séminaires, de rencontres formelles et informelles, nocturnes et diurnes, c’est le gouvernement actuel qui a décidé de se jeter à l’eau. Le ministre de la Communication, Diakité Coty Souleimane, et le président de la Haute autorité de la Communication audiovisuelle (Haca), Ibrahim Sy Savané, ont affirmé, à maintes occasions, la détermination du gouvernement à faire aboutir ce projet au plus vite : « La libéralisation de l’audiovisuel est une affaire nationale », disait Sy Savané face à la presse le 6 février 2012. On avait même donné rendez-vous aux Ivoiriens pour le début de l’opération en mars 2012. Mais à l’épreuve du terrain, le démarrage de cette opération a été reporté en 2013. La marche vers cette libéralisation, contrairement à ce qui est annoncé, est timide, selon certains acteurs du secteur. C’est comme si l’Etat marchait sur des œufs. Pour eux, il y a bien une raison qui plombe la course vers la libéralisation totale de l’audiovisuel.
A l’analyse, le contexte politique délétère actuel ne permettrant pas selon certaines voix, à l’Etat d’aller vite et à vau-l’eau. Malgré sa volonté affichée, l’Etat a-t-il peur de lâcher trop vite les manettes de l’information aux mains de privés qui pourraient en faire mauvais usage ? La question est d’importance et mérite que l’on s’y attarde. Mais pour en arriver là et pour mieux comprendre le contexte actuel dans lequel l’on conduit cette ouverture de l’espace audiovisuel, il faut faire, dans un flash-back, l’état des lieux.
Etat des lieux
Avant 1990, la Radio diffusion télévision ivoirienne (Rti), groupe de chaînes d’Etat, occupait sans partage l’espace audiovisuel ivoirien. L’évolution de cet environnement audiovisuel de la Côte d’Ivoire a fait, il y a quelques années, l’objet d’une étude de « la Mission économique d’Abidjan » de l’Ambassade de France en Côte d’Ivoire, publiée sur le site de « Investir en zone franc », izf.net.
Cette étude a mis en évidence une volonté de l’Etat, d’abord, de diversifier et d’étendre les activités de la Rti. Au niveau de la télévision, il y a aujourd’hui des chaînes publiques, une chaîne nationale (Rti, la première devenue aujourd’hui Rti 1), et deux chaînes locales (Tv2 et Tv Bouaké). Ce sont des chaînes généralistes de service public. Avec l’avènement d’un opérateur privé qui, lui, met à la disposition des Ivoiriens des chaînes étrangères sous forme de bouquet, dès les premières initiatives de libéralisation du secteur audiovisuel, il se développe très vite la télévision à péage. Canal+Horizons-Sedaci (Société d’étude et de développement audiovisuel en Côte d’Ivoire) est aujourd’hui le seul fournisseur de chaînes à péage tant en analogique (Mmds et Hertzien) qu’en numérique (Rds, bouquet, le Sat/Dstv). L’Agence des télécommunications de Côte d’Ivoire (Atci) est chargée de louer les canaux et les fréquences aux différents opérateurs. Le territoire ivoirien est également couvert, selon l’étude de « La Mission économique d’Abidjan, par « des satellites qui diffusent gratuitement des chaînes variées venant d’Europe, d’Asie ou du Proche-orient (en analogique et en numérique) ». En 1996, Tv5 est commercialisées en complément des programmes de Canal+horizons. A cela, il faut ajouter des chaînes par satellites « Cfi et Tv5 en analogique, en clair sur le satellite Nss803, Cnn, en clair numérique sur le Nss803 ». Il y a aussi des chaînes arabes sur Arabsat. En analogique, il y a « Tv5 Orient, Cnn en anglais, Lbc, Mbc, Yemen Tv, Barbain Tv, Sudan Tv, Saudi Channel 1 et 2, Emirates média Channel, Abu Dhabi Tv, Kuwait Space Channel ». En numérique, il faut compter « Dubaï sport Channel, Abu Dhabi Tv, Future Tv, etc. ». Il est important de noter qu’avec la diffusion de ces chaînes étrangères, est né un phénomène nouveau en Côte d’Ivoire : « Le piratage par câblage de plusieurs usagers ». Malgré des mesures dissuasives prises par les opérateurs concernés, le mal a pris de l’ampleur. Dans le secteur des radios, à l’origine, la Côte d’Ivoire n’avait que « Radio Côte d’Ivoire », la station nationale diffusée en bande Fm dans la capitale et les stations étrangères (Rfi, Bbc, Africa n°1) sur les ondes courtes.
Mais très vite, le secteur se développe avec la libéralisation des ondes en modulation de fréquence en 1992 et l’attribution de licence et de concessions à des opérateurs privés. Des radios publiques nationales ou régionales aux stations Fm privées, en passant par des radios de proximité à caractère associatif et limitées en couverture (10km), ce sont plus de 150 stations de radios qui diffusent des programmes en Côte d’Ivoire. Le groupe Rti possède aujourd’hui, la radio nationale avec une couverture nationale (aujourd’hui, certaines zones du pays ne reçoivent pas les programmes de cette radio pour cause de crise depuis 2002), Fréquence 2 et radio Bouaké. Des radios privées ont fait leur apparition, notamment Nostalgie, (radio à capitaux majoritaires ivoiriens, affiliée à Nostalgie international, lancée en 1993), Radio Jam. Des radios privées internationales diffusent leurs programmes en Côte d’Ivoire. Parmi celles-là, il faut citer Bbc (couverture internationale et en Fm sur Abidjan, Bouaké et Korhogo), Rti et Africa n°1.
Le premier test de la libéralisation de l’espace audiovisuel, c’est donc l’autorisation des radios de proximité. Ces radios dites locales émettent dans un rayon de 10km (zone d’émission autorisée). Ces radios sont financées par les municipalités, des conseils généraux ou des opérateurs privés. Elles ont pour but de sensibiliser les populations aux problèmes d’hygiène et de santé (la pandémie du Sida, par exemple). Ce qui veut dire qu’elles sont contraintes, dans le respect de leur cahier de charges, de ne se contenter que d’un rôle de seconde zone en ne faisant pas de l’information, par exemple.
Au total, ce n’est pas maintenant que sonne l’heure de la libéralisation de l’espace audiovisuel. Elle a été mise en route depuis 1990. Ce qui apparait aujourd’hui comme un élément nouveau, avec la loi du 14 décembre 2004, fixant le régime juridique de la communication, c’est la prise en compte de la télédiffusion. Le processus a été longtemps. Cette fois sera-t-elle la bonne ?
Un long processus
Depuis son indépendance en 1960 jusqu’à l’avènement, en 1990, du retour au multipartisme, la Côte d’Ivoire a maintenu son espace audiovisuel hors de portée des chaînes privées. La consolidation de la nation naissante et le maintien d’un environnement de paix semblaient avoir guidé les dirigeants d’alors dans leur décision de rendre restrictif l’espace audiovisuel. Il a donc fallu attendre longtemps avant que l’Etat ne se décide à étendre le champ de la libéralisation. En 2001, lors du Conseil des ministres du 25 juillet, le gouvernement prend la décision de libéraliser le secteur de l’audiovisuel afin de permettre la mise en place de nouvelles chaînes de radios et de télévisions.
Mais, selon le Directeur général de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (Haca), Me René Bourgoin, « c’est aux termes de la loi du 14 décembre 2004 fixant le régime juridique de la communication audiovisuelle, que furent organisées formellement les modalités de la libéralisation, incluant cette fois la télévision ». La Haca est l’institution de régulation mise en place par ordonnance du 30 avril 2011 (remplaçant le Conseil national de la communication, (Cnca), qui a « la mission de la mise en œuvre effective de la libéralisation de la télédiffusion »
Malgré la loi du 14 décembre 2004, qui a donné beaucoup d’espoir aux Ivoiriens, surtout aux maisons de production, le projet n’a pas connu un début de réalisation. La raison ? L’Etat ne s’était pas donné les moyens juridiques pour rendre applicable cette loi qui, en la matière, restait comme une maison inhabitable parce qu’inachevée. Le projet a donc marqué le pas tant et si bien que les opérateurs du secteur avaient rangé leurs matériels, entre 2001 et 2012. C’est seulement en février 2012 que le ministre Souleïmane Coty Diakité a présenté les deux décrets d’application adoptés par le gouvernement et signés par le président de la République. Ce sont le « décret n°2012-228 du 29 février 2012 fixant les règles et les procédures d’appel d’offres et d’appel à candidatures en vue des autorisations d’usage des fréquences de radiodiffusion sonore ou télévisuelle » et le « décret n°2012-229 du 29 février 2012 fixant les conditions d’exploitation d’usage des fréquences de radiodiffusion sonore et télévisuelle ». Me René Bourgoin précise que « relativement au 1er décret, (…) la procédure d’appel d’offres ne concerne que les radios et les télévisions commerciales, tandis que l’octroi des autorisations d’usage des fréquences pour radios et les télévisions non commerciales est, lui, régi par la procédure d’appel à candidatures ». Le dernier acte vers la libéralisation du secteur de l’audiovisuel a été la mise en place, le vendredi 20 juillet 2012, de la commission d’examen des dossiers d’appel d’offres ou d’appel à candidatures qui va se charger d’évaluer les dossiers de candidatures des radios et des télévisions privées qui vont être autorisées à émettre dans le cadre de la libéralisation de l’audiovisuel. Selon le ministre Diakité Coty, l’arrêté consacrant la nomination des membres de cette commission « vient parachever ce long processus ». Là encore, l’Etat a attendu longtemps avant de désigner les personnalités devant accomplir cette mission. Il s’agit d’un collège de neuf membres qui aura à dépouiller les offres et aura à choisir les opérateurs. Ce sont : « 1 représentant du ministère de la Communication (qui assure la présidence), 1 représentant du ministère de l’Intérieur, 1 représentant du ministère de l’Economie et des finances, 1 représentant du ministère de l’Environnement, 1 représentant du ministère de la Culture, 1 représentant du ministère de l’Education nationale, représentant de l’Agence des télécommunication de Côte d’Ivoire (Atci) ». La neuvième personne émane de la Haca et assure le secrétariat permanent.
Cette commission, prévue, selon le Directeur général de la Haca, à l’article 5 de la loi susvisée du 14 décembre 2004, a un rôle central dans le processus de libéralisation, de l’audiovisuel. Cette commission qui, s’agissant des appels d’offres et des appels à candidatures, décide de leur recevabilité, procède à l’ouverture des offres en séance publique, puis instruit et analyse les offres. Selon le Dg de la Haca, « il est utile de préciser que l’examen technique des dossiers s’opère sur la base des spécifications et des normes techniques des équipements proposés, ainsi que sur celle des paramètres de diffusion, de transmission et de réception, indiqués dans la soumission suivant les termes d’une annexe au décret, laquelle annexe a, bien sûr, la même valeur que le décret auquel il est joint ». A la suite de ce travail, un rapport technique faisant l’évaluation des offres soumises à son analyse est fait par la commission d’appel d’offres et d’appel à candidatures, laquelle procède au classement desdites offres. C’est une fois ce travail effectué que la commission transmet à la Haca le rapport technique détaillé pour décision. La Haca, à son tour, devra se réunir « pour arrêter la liste définitive des sociétés de droit privé ou associations auxquelles elle délivre les autorisations d’usage des fréquences de radio diffusion sonore et télévisuelle, pour une durée de 10 ans pour les télévisions et de 5 ans pour les radios », Cette autorisation est « subordonnée à la signature d’une convention entre la Haca, représentant l’Etat, et le candidat retenu après avis des ministères de la communication et de l’Economie et des finances ». Aujourd’hui, le constat est qu’aucun appel d’offres encore moins d’appel à candidature n’a été lancés. Au niveau de la commission d’examen des dossiers, on est au stade de la formation des membres. Le chemin est long et la démarche méticuleuse avec des pas hésitants et des précautions, quelque peu « maniacales ». De quoi l’Etat a-t-il donc peur pour prendre autant de précautions ?
Des pas hésitants de l’Etat
Il est vrai que le processus de libéralisation de l’audiovisuel n’est jamais allé aussi loin dans sa réalisation qu’aujourd’hui, surtout avec une donnée essentielle, l’inclusion « de la libéralisation de la télédiffusion ». En réalité, c’est autour de ce dernier aspect d’une décision prise il y a environ vingt-deux ans que se situe l’enjeu véritable du débat. On l’a vu, depuis 1990, furent autorisées les radios privées commerciales ainsi que celles non commerciales, notamment les radios de proximité ou confessionnelles. Or, c’est seulement maintenant que l’Etat se donne les moyens de libéraliser la télédiffusion, même s’il y a une explosion en Côte d’Ivoire de la télévision à péage diffusée en bouquet. Car en réalité, ce n’est pas tous les Ivoiriens qui ont les moyens de s’abonner au bouquet. Le sentiment qui se dégage des pas hésitants de l’Etat est qu’on a peur de lâcher précipitamment les manettes. Au cours de sa conférence publique lors de la célébration à l’Istc de la journée mondiale de la liberté de la presse, Me René Bourgoin a dit à demi-mot cette crainte de l’Etat de voir la libéralisation de l’espace audiovisuel desservir la paix et la cohésion nationale : « Les enjeux, qu’ils soient politiques, économiques, culturels et sociétaux, technologiques et même géopolitiques, sont tels qu’il est impérieux de ne pas « se louper ». Il suffit de voir ce qui, hélas, s’est passé dans certains pays voisins pour se convaincre d’une libéralisation ratée ». En réalité, ce que la seconde personnalité de l’instance chargée de la mise en œuvre de cette ouverture de l’espace audiovisuel désigne par « libéralisation ratée », c’est l’éventualité que le paysage audiovisuel, ainsi libéralisé, tombe entre les mains de personnes indélicates, enjambant le cahier des charges, pour utiliser la télévision à des fins politiques. D’ailleurs, le contexte sociopolitique actuel encore délétère pourrait ne pas être favorable, selon certains Ivoiriens, dont des acteurs clés du secteur, à cette libéralisation. La limitation du nombre de chaînes de télévision concernées par la libéralisation à cinq (5) pourrait être l’un des signes des hésitations de l’Etat à aller à une libéralisation tous azimuts. Le montant astronomique du cautionnement accompagnant les dossiers d’appel d’offres et d’appel à candidatures a pour but d’avoir affaire à « des entreprises fiables » qui exploitent, dans le respect des lois, les fréquences qui vont être mises à leur disposition. Le décret n°2012-228 du 29 février 2012 fixe le montant comme suit : « 1 milliard F Cfa pour les télévisions commerciales, 400 millions de F Cfa pour les radiodiffusions sonores privées commerciales, 500 millions F Cfa pour les télévisions privées non commerciales, 03 millions F Cfa pour les radiodiffusions sonores privées non commerciales ». Pour Philippe Monhin, président de l’Union des maisons de production et producteurs audiovisuels de Côte d’Ivoire (Umaproci), «ces conditions sont difficiles pour les producteurs ivoiriens.» Il a clairement ajouté qu’aucun producteur privé ivoirien n’a les moyens de créer une chaîne de télé » en l’état actuel des choses.
FRANÇOIS KONAN
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