Assane Niada source: l’Inter
Décidément, ce pays n’est pas encore sorti de l’auberge. A la lecture du fameux rapport des experts onusiens sur la Côte d’Ivoire rendu public jeudi 18 octobre dernier, on ne peut s’empêcher de penser que le pays n’est pas à l’abri d’une éventuelle conflagration.
Tous ceux qui rêvent d’une stabilité après la chute de Laurent Gbagbo, devraient déchanter : la paix n’est pas pour demain. Du moins si l’on en croit les révélations contenues dans le rapport qui fait tant jaser depuis qu’il a été éventé. Il en ressort que les partisans de l’ancien président Laurent Gbagbo rêvent de prendre leur revanche sur ceux qui sont sortis vainqueurs de la guerre post-électorale. De là où ils se sont retirés depuis la chute de leur mentor, ils ne renoncent pas au « match retour », c’est-à-dire à une reconquête, par les armes, du pouvoir perdu.
A en croire les enquêteurs onusiens, ils y pensent chaque jour en se rasant la barbe. Mieux, se donnent les moyens de donner corps à ce rêve obstiné de renverser le successeur de Laurent Gbagbo ou, à défaut, de gâcher son quinquennat en perpétrant par intermittence, des attaques. Selon le rapport, 5 milliards Fcfa (10 millions de dollars) au moins, auraient été engagés dans ce projet de déstabilisation, et d’importants moyens logistiques et humains. Les éléments recrutés seraient équipés de téléphones satellitaires Thuraya. « Ce matériel sophistiqué et coûteux prouve que les combattants ont reçu beaucoup d’argent pour conduire une opération bien planifiée », soulignent les auteurs du rapport, qui précisent que c’est une chaîne de commandement digne d’une véritable armée qui a été mise sur pied pour piloter le projet en préparation. « Selon divers interlocuteurs, il s’agit là d’un réseau bien organisé, capable de planifier et de mener des opérations d’envergure… », relèvent en effet les experts onusiens. Des noms d’officiers bien connus pour avoir servi, parfois avec zèle, le régime Gbagbo et d’illustres dignitaires de la défunte refondation sont cités au nombre des activistes de ce plan de déstabilisation.
Au cas où ce « match retour » devrait se traduire dans les faits, le danger pourrait partir du Ghana, du Liberia et à un degré moindre, du Mali. Le régime Ouattara pourrait ainsi se retrouver pris dans l’étau de mercenaires et autres ripoux recrutés dans ces trois pays. Il faut donc se rendre à l’évidence, la Côte d’Ivoire est toujours sous la menace d’événements aussi tragiques que ceux que nous avons connus le 19 septembre 2002, et plus récemment, entre mars et avril 2011. Des jours noirs guettent le pays, en dépit des incantations sur la réconciliation et des assurances données par les gouvernants sur le retour effectif de la paix. En effet, les pro-Gbagbo en exil ne semblent pas près de s’avouer vaincus : de là où ils se sont réfugiés, ils préparent activement leur retour au pays…au son des crépitements d’armes de guerre.
A la vérité, point n’est besoin d’être un devin pour comprendre que les partisans de l’ancien président ne se résigneraient pas à broyer du noir à l’extérieur aussi longtemps que certains de leurs compagnons seront maintenus en détention ou qu’ils vont se savoir traqués ou simplement tenus éloignés du pays.. D’où le doigt accusateur constamment pointé sur eux par les sécurocrates de Ouattara ; lesquels se voient du reste confortés dans leur position par cette enquête d’experts mandatés par les Nations Unies. Il est à craindre que devant cette menace constante qui plane sur sa tête, Alassane Ouattara ne durcisse son régime en suspectant jusqu’à l’obsession, tous ceux dont le passé, les propos et les agissements peuvent être interprétés comme ayant partie liée avec les déstabilisateurs.
Par ailleurs, le souci de mettre son pouvoir à l’abri des déstabilisateurs pourrait conduire le chef de l’Etat à privilégier désormais les dépenses militaires au détriment des dépenses d’investissement auxquelles il a fait une part belle jusque-là. En définitive, le spectre du « match retour » risque de replonger le pays dans le marasme socio-économique déjà vécu ces dix dernières années.
Assane NIADA
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