Nord-Sud
Alors qu’il lui reste encore un an pour conduire le processus de réconciliation, Charles Konan Banny est allé remettre, il y a une semaine, un rapport au chef de l’Etat, Alassane Ouattara. Une démarche qui suscite bien d’interrogations au sein de l’opinion publique nationale.
Charles Konan Banny a-t-il plié l’affaire avant terme ? A un an environ de la fin de son mandat, le président de la Commission dialogue, vérité et réconciliation vient de remettre un rapport au président de la République, Alassane Ouattara. Ce document, selon lui, est la résultante des trois semaines de consultation qu’il a eues, au cours du mois de septembre, avec la classe politique, la société civile, les religieux, les ambassadeurs accrédités en Côte d’Ivoire, etc. Une démarche qui a jeté le trouble dans beaucoup d’esprits, d’autant que le président de la Cdvr a déclaré rester à l’écoute du chef de l’Etat, pour la suite à donner à ce rapport. «La prochaine étape ? Nous attendons que le président nous appelle. Sans doute que cela va appeler d’autres discussions ; en tout cas, nous sommes à la disposition du chef de l’Etat», a confié Charles Konan Banny à sa sortie d’audience, après être revenu sur ce qui a motivé les consultations puis la rédaction d’un rapport adressé au président de la République : «après quinze mois d’une relative accalmie, la tension a repris et cela préoccupe tout le monde. Il n’y a pas une couche (de la population, ndlr) que nous avons rencontrée qui ne s’est pas montrée préoccupée. Le chef de l’Etat nous a écouté attentivement, il a pris bonne note de tout ce que nous avons restitué». Un discours aux relents testamentaires qui a amené plus d’un Ivoirien à se demander ce qui le sous-tend. «M. Banny est-il découragé, est-il à bout de souffle ? Est-il excédé d’attendre l’argent qui ne vient pas ?», s’interroge Moussa B. Et pour cause. Le rapport qui a sanctionné les consultations, a été rédigé dans un contexte marqué par une crise de confiance entre Charles Konan Banny et certains militants et cadres du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Cette énième crise est survenue après que Karim Ouattara, un des collaborateurs du président de la Cdvr, s’est offusqué des arrestations des pro-Gbagbo, suspectés d’activités subversives, en rapport avec les attaques contre l’armée ivoirienne.
Comme piquée au vif, à l’époque, en juin dernier, la députée de Tengréla, Marima Traoré avait même appelé le patron de la Cdvr à tirer les conséquences de son échec à la tête de la structure. D’où donc le fait que certains ont pensé que Charles Konan Banny s’est trouvé une bonne excuse pour claquer la porte.
Juste un intermède
«Plus que le document qu’il est allé remettre au président de la République, c’est le fait qu’il dise qu’il est à la disposition de celui-ci qui a jeté le trouble dans mon esprit. Dès lors que son mandat n’est pas terminé, il n’a pas à rester à la disposition du président Ouattara même si c’est lui qui l’a nommé», pense-t-il. Une inquiétude qu’un proche collaborateur de Charles Konan Banny, joint hier, a tenté de dissiper. «Cela ne veut point dire que la Cdvr a fini sa mission», a éclairé ce conseiller de M. Konan Banny. Selon lui, la démarche de son patron participe plutôt de la relance du dialogue entre les protagonistes de la scène politique, après que la tension est montée d’un cran, consécutivement aux attaques contre les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (Frci), en août dernier. «La Cdvr a pris sur elle de consulter l’ensemble des Ivoiriens, pour s’assurer que tout le monde était toujours disposé à aller à la réconciliation. La réponse a été oui. Ensuite, la commission a demandé aux Ivoiriens de faire des propositions pour que le processus soit relancé de manière résolue. Ce sont donc ces propositions que le président Banny a transmises au chef de l’Etat. Les Ivoiriens doivent donc comprendre que notre mission est loin d’être terminée, elle continue jusqu’à septembre 2013 au moins», a insisté le collaborateur de l’ancien chef du gouvernement. Ce fidèle de Charles Konan Banny se veut même optimiste pour l’avenir, relativement aux soucis financiers évoqués comme cause de la lenteur de la commission. «Nous avons des promesses. Les besoins de la commission sont inscrits dans le budget de l’année 2013 qui passera bientôt devant les députés », assure-t-il.
Marc Dossa
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