À la suite de l’article « Côte d’Ivoire : un gâteau à 2 milliards d’euros » du mois dernier, le service de presse du groupe Bouygues précise « que Bouygues ne détient plus qu’une participation financière de 21,5% dans Finagestion, société holding qui coiffe les activités de gestion de l’eau et de l’électricité en Côte d’Ivoire, à travers ses filiales CIE et Sodeci. Bouygues n’est donc plus opérateur de l’électricité et de l’eau en Côte d’Ivoire. » L’évocation dans notre article du « règlement d’une grosse facture d’eau et d’électricité à Bouygues » est donc erroné. Quoique…
Si cette participation désormais minoritaire fait que Bouygues n’est en effet plus directement l’opérateur, le groupe n’est pas pour autant désintéressé dans le règlement d’une facture à une holding dont il détient des parts.
Mais il faut surtout préciser que cette facture est notamment destinée aux fournisseurs de gaz qui alimentent les centrales thermiques et que l’État ivoirien ne payait plus pendant la crise post-électorale. Les fournisseurs sont Afren CI (ce producteur coté à Londres était présent au Nigeria, mais maintenant sur toute la côte ouest-africaine), CNR International (producteur canadien, présent aussi au Gabon) et surtout Foxtrot International (présent seulement en Côte d’Ivoire), qui, en 2010 a produit 65% du gaz ivoirien. Et Foxtrot est contrôlée par SCDM, la société privée des frères Olivier et Martin Bouygues.
Notons que c’est aussi via SCDM que les frères Bouygues contrôlent 18,1% des parts (et 27,3% des votes) du groupe Bouygues.
Enfin, ce que le service de presse du groupe Bouygues omet de préciser, c’est que, depuis 2009, l’investisseur majoritaire de la parisienne Finagestion est Eme- rging Capital Partners (ECP). Il s’agit d’un groupe de capital-investissement américain qui gère d’importants fonds visant le secteur privé africain. Le co-président exécutif d’ECP, Vincent Le Guennou est aussi vice-président de Finagestion. C’est un ancien de Bouygues en Côte d’Ivoire (qui détenait jusqu’en 2005 le groupe Saur, et donc sa filiale CIE).
Les secteurs de prédilection d’ECP sont les secteurs bancaire, des télécoms et des ressources naturelles. Totalisant plus de 1,8 milliards de dollars, ses fonds sont alimentés par des institutions financières de développement (OPIC américaine, CDC britannique, Proparco française, BEI européenne, BAD africaine…) pas toujours très regardantes sur les investissements réalisés.
Un rapport du parlement britannique s’inquiète des investissements d’ECP dans des banques nigérianes qui seraient impliquées dans du blanchiment d’argent sale. Le même rapport relève l’entrée en 2006 d’ECP dans le capital d’Anvil Mining, une société accusée de complicité dans le massacre de Kilwa (Katanga) en RDC en 2004. Fin 2010, la justice québécoise a été saisie d’une plainte contre Anvil Mining par un collectif de victimes de Kilwa .
Bref, un bien beau partenaire financier pour le groupe Bouygues.
David Mauger – Source: survie.org
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